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Existe-t-il des prénoms interdits ?

Natacha Polony revient aujourd'hui sur la polémique engendrée par le choix d'un couple de prénommer son enfant "Jihad".

Des parents, vivant à Léguevin (Haute-Garonne) ont eu la bonne idée de baptiser leur enfant Jihad. La mairie a signalé le cas, de sorte que le procureur de la République, s'il le souhaite, peut saisir le juge des affaires familiales, lequel pourra demander la suppression du prénom du registre de l'état civil. Concrètement, ce n'est pas encore fait !

Le plus fabuleux, c'est que l'on voit certaines personnes faire valoir un peu partout, sur les réseaux sociaux ou dans des discussions, que "Jihad est un prénom musulman courant", ou encore "qu'en arabe, ce terme signifie abnégation, effort, lutte ou résistance, souvent traduit à tort par guerre sainte". On se croirait dans le film "Le prénom", pourquoi pas l'appeler Adolphe, c'est joli Adolphe, non ?

Existe-t-il des prénoms interdits ? La réponse est oui, évidemment ! Quand on choisit un prénom à son enfant, on lui dessine un destin rêvé, on l'entoure des symboles que porte ce prénom : la mémoire d'un aïeul, un héros ou un personnage célèbre porteur de certaines valeurs. Alors, soit ces parents sont parfaitement idiots et ne comprennent pas que ce prénom est un mot qui véhicule aujourd'hui une idéologie et des morts, dans ce cas l'État a le devoir de limiter leur bêtise pour l'intérêt de l'enfant. Soit ils savent très bien ce qu'ils font et c'est encore pire. Il faut tout de même rappelé que l'état civil a récemment refusé d'inscrire un prénom breton porteur d'un "N" avec une tilde. Donc les prénoms bretons, non, et "Jihad", ça passerait ? Ça révélerait un léger problème collectif car les prénoms sont aussi des marqueurs collectifs. Il fut un temps où seuls les prénoms du calendrier chrétien étaient autorisés en France. La liberté individuelle s'est peu à peu imposée dans la loi - tant mieux - jusqu'aux excès de l'individualisme contemporain, quand, par exemple, on autorise trop facilement le changement de prénom en laissant croire à chacun qu'il pourrait se débarrasser de cet héritage symbolique et effacer tout ce qui a précédé.

Le prénom, c'est un signe entre individuel et collectif qui raconte une société. Les parents du petit "Jihad" ont donc choisi de dire à leurs concitoyens que les attentats ne les concernent pas et qu'ils n'y penseront pas au moment de parler à leur enfant. Pourtant, il y en a d'autres des prénoms : parmi les enfants morts à Nice le 14 juillet 2016, l'un s'appelait Mehdi, l'autre Yanis... Préférer Jihad, c'est plus qu'un message, c'est un crachat !

>> L'intégralité de la chronique est disponible en podcast

 

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