Crise agricole et la dermatose nodulaire contagieuse (DNC), abattage des troupeaux, souveraineté alimentaire, accord Mercosur, narcotrafic, corruption et recomposition politique. Au micro de Sud Radio, Aurélien Pradié a répondu aux questions de Jean-François Achilli.
"J'ai honte de la manière dont la crise agricole est gérée"
Jean-François Achilli pour Sud Radio : La coordination rurale et la Confédération paysanne appellent à poursuivre la mobilisation contre l’abattage total des troupeaux touchés par la DNC. Est-ce que vous les soutenez ce matin ?
Aurélien Pradié : “Oui, je les soutiens. Je les soutiens pas par facilité politique ou par populisme, mais parce que j’ai honte de ce qui est devenu mon pays. J’ai honte de la manière dont cette crise agricole est gérée depuis le début. On gère avec une froideur des sujets absolument essentiels, humainement pour nos producteurs et parce qu’il s’agit de la souveraineté alimentaire de notre pays.”
Vous parlez d’une gestion à vue.
“Oui, on navigue à vue depuis des semaines. Le premier cas de cette maladie, c’était en juin. Qu’est-ce qu’on a foutu depuis juin ? Tout le monde se réveille aujourd’hui, mais depuis juin, on a fait quoi ?”
Annie Genevard était hier sur l’antenne de Sud Radio. Est-elle à la hauteur selon vous ?
“Cette crise a été gérée de manière catastrophique. Et ce qui est le plus grave dans ce moment politique, c’est que nous nous habituons à des situations insupportables.”
Les annonces du gouvernement sont-elles à la hauteur de la situation ?
“On a une crise sanitaire, une crise agricole et une crise morale absolument majeure. La réponse ne peut pas être un comité théodule. La vérité, c’est qu’on nous refait la même histoire que la gestion de la misère au moment du Covid. Au moment où on n’avait pas les moyens de faire, on nous a expliqué un jour qu’il ne fallait pas, un jour qu’il fallait. Ce que nous payons aujourd’hui, c’est la faillite totale de la parole de l’État et de la parole politique.”
Crise agricole : "On nous refait la même histoire qu'au moment du COVID ! On paie la faillite totale de la parole de l'État (...) Il faut vacciner 80% du cheptel , c'est la clé !" réclame @AurelienPradie #Agriculteurs #GrandMatin
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Que faudrait-il faire concrètement selon vous ?
“Sur la question de l’abattage total ou partiel, il faut qu’on soit capables d’avoir une religion un peu moins dure. Il faut retester l’abattage partiel. Et la vaccination, c’est la clé. Aujourd’hui, il n’y a pas de plan massif. Nous devons vacciner 75 à 80% du cheptel, c’est la seule manière de contenir la maladie.”
“Le Mercosur, c’est non”
Emmanuel Macron évoque un possible report de l’accord Mercosur. Que lui répondez-vous ce matin sur Sud Radio ?
“Gagner du temps ne servira à rien. Le Mercosur, c’est non. Cet accord est d’un autre temps, au moment même où on affaiblit notre cheptel et notre agriculture.”
Certains défendent un accord surtout technique.
“Comme Maastricht, ce n’est pas un accord technique, c’est un accord politique. À partir du moment où on signe le Mercosur alors que les Français y sont défavorables, on met le dernier clou sur le cercueil de notre souveraineté alimentaire.”
Donc pas de renégociation possible ?
“Non. Dire non clairement aujourd’hui. Gagner du temps serait une faute et une tromperie à l’égard des agriculteurs.”
Narcotrafic : “Nous sommes en danger de mort”
Vous avez signé une tribune sur le narcotrafic. L’amende forfaitaire portée à 500 euros est-elle dissuasive ?
“C’est une bricole. Ça ne dissuadera pas les consommateurs et une grande partie de ceux qui sont sanctionnés ne paient déjà pas l’amende.”
Pourquoi parlez-vous d’une bataille existentielle ?
“Parce que nous sommes en danger de mort. Le narcotrafic mène une guerre contre notre pays et nous ne mesurons pas cette guerre.”
Vous évoquez une corruption qui gangrène l’État. De quoi parlez-vous précisément ?
“Il vous suffit de lire la presse toutes les semaines. Ce sujet de la corruption n’est pas abordé publiquement. Des magistrats, des hauts fonctionnaires sont corrompus, il faut regarder la réalité en face. Il y a des affaires qui éclatent régulièrement. Le narcotrafic pèse plusieurs milliards d’euros et ces milliards servent notamment à corrompre.”
Narcotrafic : "L'État français est en danger de mort. Des magistrats, des hauts fonctionnaires sont corrompus, il faut regarder la réalité en face" affirme @AurelienPradie #GrandMatin
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Vous allez jusqu’à parler d’élus de la République.
“Ces affaires sont des affaires publiques. Il y a des maires qui ont été condamnés parce qu’ils ont trempé dans des affaires de corruption liées au narcotrafic. Nous sommes dans une situation équivalente à ce que l’Italie a connu avec les mafias. Il faut regarder lucidement la situation et accepter d’ouvrir le capot.”
La France est-elle aujourd’hui à la hauteur de ce défi ?
“Non. Il y a une guerre intérieure à mener contre le narcotrafic, qui contamine les esprits, propage l’idée que la violence est un outil de vie quotidienne et qui, par la corruption et le trafic d’armes, sabote les fondements de la République et de la Nation.”
Borloo, Ménard, Villepin : “Il faudra que tous ces pirates qui aujourd’hui ont une parole parfois détonante se mettent à se parler ensemble”
Vous êtes député non inscrit. Envisagez-vous un retour chez Les Républicains ?
“Aujourd’hui, ce statut me donne une liberté de parole. Je ne veux pas participer à tout ce bousin, à ce spectacle consternant qui sent la fin de la IVᵉ République.”
Avec qui peut se reconstruire une alternative politique ?
“Il y a ici ou là des voix originales, des personnages indépendants. Il faudra à un moment donné que tous ces pirates qui aujourd’hui ont une parole parfois détonante se mettent à se parler ensemble.”
Vous pensez à certaines personnalités comme Jean-Louis Borloo, Robert Ménard ou Dominique de Villepin ?
“Je ne vous donnerai pas de nom. Vous pouvez citer Jean-Louis Borloo, vous pouvez citer Robert Ménard, vous pouvez citer Dominique de Villepin. En dehors des marchandages politiciens, il y a des femmes et des hommes qui paraissent un peu bizarres à première vue et qui, s’ils unissent leurs forces, peuvent reconstruire ce pays.”
Un dernier mot sur la démission du maire de Chessy.
“Oui, il a eu raison. Quand les valeurs fondamentales ne sont pas respectées, c’est courageux de prendre ses responsabilités.”
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