Accord UE–Mercosur, souveraineté alimentaire, réveil alimentaire du 8 décembre, viticulture en crise, arrachage des vignes, grippe aviaire et gestion des épizooties. Au micro de Sud Radio, Annie Genevard a répondu aux questions de Maxime Lledo.
"Le vin suppose un apprentissage"
Maxime Lledo pour Sud Radio : Les viticulteurs sont en grande difficulté. Votre plan de 130 millions d’euros pour arracher des vignes et moderniser la filière sera-t-il suffisant ?
Annie Genevard : “Certains vignobles souffrent beaucoup. Ils souffrent à la fois de surproduction, on produit trop de vin, et de déconsommation. Les Français boivent moins de vin et en particulier de vin rouge. Les cuves sont pleines et les bourses sont vides.”
Pourquoi aider une filière si la consommation ne suit plus ?
“La viticulture française est un fleuron de l’agriculture. Nous avons des vignobles d’exception, des savoir-faire remarquables. Adapter le volume de la production aux capacités du marché, c’est l’ambition de l’arrachage. Il faut réduire le volume de la production pour assurer des revenus.”
A-t-on eu tort de présenter le vin comme un alcool comme un autre ?
“Le vin n’est pas un alcool comme un autre. C’est un univers d’une richesse incroyable en termes gustatifs, c’est un patrimoine, c’est une histoire, ça accompagne les grands moments de la vie. C’est un alcool qu’il faut consommer avec une certaine modération, mais le vin suppose un apprentissage.”
.@AnnieGenevard, ministre de l'Agriculture : "On produit trop de vin ! (...) Le vin n'est pas un alcool comme un autre" #GrandMatin
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Vous dites que le rapport des Français au vin a changé ?
“Le repas pris en famille, la bonne bouteille qu’on ouvre le dimanche, c’est une habitude qui s'est perdue un peu. C’était aussi le moment de l’apprentissage du vin, car le vin est un univers à apprendre.”
Vous assumez cette phrase forte au micro de Sud Radio ?
“J’assume.”
"En l’état, le projet du Mercosur n’est pas acceptable"
L’Assemblée nationale a adopté à l’unanimité une résolution demandant de s’opposer à l’accord UE–Mercosur. Qu’est-ce que cela change ?
“Ça confirme surtout l'opposition des Français à ce projet d'accord. Il expose notre agriculture à une concurrence qui est déloyale et ça n’est pas acceptable.”
Est-ce un signal pour refuser définitivement cet accord ?
“Le Parlement dans son unanimité a dit : ce projet d'accord tel qu'il existe aujourd'hui, nous n'en voulons pas.”
Il faut donc écouter le Parlement ?
“Il faut toujours écouter le Parlement.”
Quelles conditions la France a-t-elle posées ?
“Il faut une clause de sauvegarde, des mesures miroirs, des contrôles de ce qui arrive du Mercosur. Toutes ces conditions à date ne sont pas remplies.”
La position officielle de la France après ce vote est-elle un non ferme ?
“Nous avons fixé les conditions d'exigence de la France, et ça n'a pas varié. Beaucoup de conditions ne sont pas remplies. Aujourd’hui, en l’état, ce projet d’accord n’est pas acceptable.”
.@AnnieGenevard, ministre de l'Agriculture : "La France a posé ses conditions sur le #Mercosur. Elles ne sont absolument pas remplies, à date. En l’état, ce projet n’est pas acceptable" #GrandMatin
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Si l’accord est signé le 20 décembre, la France réagira ?
“La France s'exprimera, naturellement. C’est le plus grand pays agricole de l’Union européenne, elle a une voix forte.”
Que peut faire concrètement la France pour empêcher la signature ?
“Dans l’Union européenne, nous sommes 27. Il faut convaincre les pays européens de ne pas accepter ce projet d'accord en l'état. Mais il n’est pas garanti qu’une majorité s’y oppose.”
Le 20 décembre sera-t-il vraiment décisif ?
“L'histoire n'est pas achevée puisque le Parlement européen aura à se prononcer au printemps. Ce projet a 25 ans d’existence. S'il avait été aussi bon que ça, il serait déjà signé.”
"L'achat est un acte citoyen ! Les produits français ne sont pas toujours plus chers !"
Au fond, l’inquiétude liée au Mercosur renvoie à la souveraineté alimentaire ?
“Nous importons de plus en plus, nous produisons de moins en moins. Quand la géopolitique est instable, pouvoir nourrir sa population est extrêmement important.”
Que visez-vous avec le grand plan “réveil alimentaire” du 8 décembre ?
“Il faut que notre pays puisse nourrir sa population. Il faut que les Français mesurent que l'acte d'achat est un acte citoyen, qu’ils regardent d’où viennent les produits. Le consommateur a une grande partie de la réponse.”
Quelles annonces concrètes ce 8 décembre ?
“A-t-on bien conscience de ce qui se joue quand un poulet sur deux consommé en France n’y est pas produit ? Quand 50 % des fruits et légumes ne sont pas produits en France ? Lorsque nous perdons de l’autonomie alimentaire dans le bœuf, l’agneau, le porc, même le lait ?”
Les produits français seraient trop chers et moins disponibles. Est-ce vrai ?
“Les produits ne sont pas nécessairement plus chers. Nos agriculteurs peuvent couvrir toute la gamme de prix et de produits.”
"Je ne retiens pas l'idée des chèques alimentaires"
Les chèques alimentaires locaux pourraient-ils revenir ?
“Je ne retiens pas pour l'heure cette idée, qui n’a pas prospéré. En revanche, les cantines et la restauration collective soutiennent directement les producteurs français.”
Les agriculteurs touchés par les incendies se relèvent-ils ?
“Il y a des territoires qui vont bien, il faut encourager nos jeunes à aller vers ces métiers. Mais certains endroits connaissent des difficultés, et mon rôle est d’être auprès des agriculteurs.”
La dermatose nodulaire contagieuse est-elle maîtrisée ?
“L’épidémie est en passe d’être maîtrisée. Nous l’avons éradiquée en Savoie, en Haute-Savoie et dans le Rhône. Nous avons protégé plus de 99 % du cheptel.”
Qu’en est-il de la grippe aviaire ?
“Plus de 70 élevages sont indemnisés. Un guichet d’indemnisation a été ouvert. L’État est au rendez-vous.”
Faut-il interdire l’hexan ?
“Moi je me fie à la science.”
Achèterez-vous le prochain livre de Nicolas Sarkozy ?
“Par curiosité sans doute, oui.”
Bruno Retailleau a-t-il encore un avenir politique ?
“Je pense que le jeu est ouvert.”
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