Emmanuel Macron va dévoiler jeudi dans les Alpes un nouveau service militaire volontaire censé répondre aux besoins des armées, au moment où l'exécutif et l'état-major mettent en garde contre les menaces russes et les risques accrus de conflit, quitte à enflammer le débat politique.
Le chef de l'Etat a pris les devants en assurant, mardi sur RTL, qu'il ne s'agit pas "d'envoyer nos jeunes en Ukraine", après la polémique sur les propos du chef d'état-major des armées, le général Fabien Mandon, qui avait estimé que le pays devait être prêt à "accepter de perdre ses enfants".
Le président est attendu en fin de matinée auprès de la 27e Brigade d'Infanterie de Montagne (BIM) de Varces, en Isère, où il doit prononcer un discours sur ce dispositif, qui signera aussi l'enterrement du service national universel (SNU) qui lui était cher.
Promesse du candidat Macron en 2017 au nom de la "cohésion nationale", lancé en 2019, le SNU, destiné aux mineurs de 15 à 17 ans, n'a jamais pu être généralisé. Et il "n'est aujourd'hui plus adapté au contexte stratégique" créé par l'invasion russe de l'Ukraine en 2022, reconnaît l'Elysée.
Son successeur s'en éloignera en réalité largement, même s'il doit répondre au même "besoin d'engagement de la jeunesse".
Détail de l'uniforme d'un soldat français lors d'exercices à Honhenfels, en Allemagne, le 14 septembre 2023
Christof STACHE - AFP/Archives
Cette "nouvelle forme de service national" se fera "sur la base du volontariat" et sera "beaucoup plus militarisée", dit un proche du président. Destiné aux jeunes majeurs, hommes et femmes, il sera aussi plus long que les "séjours de cohésion" de 12 jours du SNU.
Emmanuel Macron avait annoncé en janvier son intention de "permettre à une jeunesse volontaire d'apprendre avec les armées et d'en renforcer les rangs" en cas de besoin. Sans toutefois aller jusqu'à rétablir la conscription, service militaire obligatoire supprimé en France en 1997.
Depuis, le gouvernement et les hauts gradés ont planché sur les meilleurs moyens de donner une "masse supplémentaire" aux armées. Afin de "créer un réservoir de personnes mobilisables en cas de crise", postule la revue stratégique publiée le 14 juillet.
Le nouveau service national va naître en temps de grave disette budgétaire, alors qu'il faudra héberger, équiper et encadrer les jeunes recrues. Son émergence sera donc "phasée dans le temps", dit un conseiller du chef de l'Etat, promettant un projet "réaliste" qui "tient compte de l'état de nos disponibilités aujourd'hui".
- Montée en puissance -
"Ça démarrera lentement", selon une source ayant connaissance du dossier, qui évoquait récemment un effectif de 2.000 à 3.000 personnes la première année, avant une "montée en puissance" avec un objectif à terme de 50.000 par an.
Selon des informations de presse non confirmées, la durée envisagée serait de dix mois et il serait rémunéré à hauteur de plusieurs centaines d'euros.
L'actuel service militaire volontaire (SMV), créé en 2015 et choisi par 1.000 jeunes environ par an, ainsi que son équivalent ultramarin, le service militaire adapté (SMA, près de 6.000 jeunes par an), perdureront en parallèle, a assuré l'Elysée. Leur objectif est différent: il s'agit de dispositifs de formation et d'insertion professionnelle avec un encadrement militaire.
Douze pays en Europe ont préservé ou rétabli la conscription obligatoire. Face à la dégradation de la situation stratégique, une demi-douzaine d’autres ont décidé de rétablir un service volontaire.
La Norvège, dont le modèle est évoqué au sommet de l'Etat, a rendu obligatoire une conscription de 12 mois, même si le service est réellement effectué seulement par 15% des membres d'une classe d'âge, sélectionnés selon des critères de qualifications et de motivation.
Le chef d'état-major français Fabien Mandon lors d'une conférence de presse du président Emmanuel Macron, à l'Elysée, le 25 novembre 2025
JULIEN DE ROSA - POOL/AFP
Depuis des mois, Emmanuel Macron alerte sur la "montée des périls" et les menaces venues essentiellement de Russie.
Le général Mandon a ainsi déclaré la semaine dernière que le pays devait restaurer sa "force d'âme pour accepter de nous faire mal pour protéger ce que l'on est" et soit prêt à "accepter de perdre ses enfants".
La déclaration a été jugée "va-t-en-guerre" par une partie de la gauche tandis que, du côté du Rassemblement national, on dénonçait une "faute" et on prévenait que les Français n'étaient pas "prêts à aller mourir pour l'Ukraine".
Depuis, les autorités ont tenté d'éteindre l'incendie, tout en assumant la nécessité d'alerter et de préparer les esprits aux risques géopolitiques.
Par Francesco FONTEMAGGI avec Mathieu RABECHAULT / Paris (AFP) / © 2025 AFP