Dans la nuit de vendredi à samedi, Mathis, 19 ans, a été mortellement percuté par un automobiliste en fuite. Selon les premiers éléments de l’enquête, le conducteur de 31 ans aurait refusé d’obtempérer à un contrôle de police et roulait à vive allure, après avoir consommé du protoxyde d’azote. Ce fait divers relance le débat sur les dangers de cette substance à la fois banale et redoutable, devenue « à la mode » et désormais au cœur d’une véritable crise sanitaire.
D'abord utilisé chez les dentistes et anesthésistes
Découvert en 1772 par le chimiste anglais Joseph Priestley, le protoxyde d’azote est d’abord un outil médical. Incolore, non inflammable, ce gaz procure une sensation de relaxation et d’euphorie, ce qui lui vaut très tôt le surnom de « gaz hilarant ». Dès le XIXᵉ siècle, il est utilisé par les dentistes et anesthésistes comme analgésique léger pour calmer la douleur des patients.
Mais, déjà à l’époque, la haute société détourne la substance pour des « soirées au gaz hilarant », où les invités s’adonnent à l’inhalation de N₂O dans un but récréatif. Deux siècles plus tard, l’histoire se répète, mais à bien plus grande échelle.
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De la chantilly aux moteurs de course
Le protoxyde d’azote est aujourd’hui omniprésent dans la vie quotidienne. Il est utilisé comme propulseur dans les siphons à chantilly, les aérosols ou encore comme agent oxydant dans certains moteurs de course. On le trouve sous forme de petites cartouches métalliques, vendues librement dans les commerces, les épiceries de nuit ou sur internet pour quelques euros à peine.
Ce faible coût et cette accessibilité en font une drogue de choix pour de nombreux jeunes, qui craquent les cartouches pour en remplir des ballons, avant d’inhaler le gaz. L’effet est immédiat : une brève euphorie, des rires, une sensation de flottement.
Brûlures, vertiges et asphyxie
Mais derrière ce plaisir éphémère se cache une toxicité bien réelle. L’inhalation de protoxyde d’azote prive momentanément le cerveau d’oxygène. À court terme, elle provoque des brûlures dues au froid du gaz, des vertiges, désorientations, pertes de connaissance, voire asphyxie.
À long terme, les risques sont bien plus graves. Une consommation répétée peut entraîner des troubles neurologiques sévères, une atteinte de la moelle épinière, des troubles cardiaques ou psychiatriques. En cas d’usage massif, le gaz détruit même les réserves de vitamine B12, essentielle au bon fonctionnement du système nerveux.
Drogue : "Le protoxyde d'azote, quand il est pris régulièrement, peu provoquer des troubles neurologiques" signale @CatherineDELOR1 (Présidente @FedeAddiction) #LaVéritéEnFacehttps://t.co/DWiOPcXbNg pic.twitter.com/K3yv4XNbvg
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Des statistiques affolantes chez les 18-24 ans
Le protoxyde d’azote est désormais une substance largement expérimentée par les jeunes générations. D’après le Baromètre de Santé publique France, 14 % des 18-24 ans en avaient déjà consommé en 2022. En 2023 addictovigilance que le nombre de signalements a été multiplié par trois entre 2020 et 2023. Et les cas graves ont bondi de 3,8 fois sur la même période. À noter que 10 % des signalements concernaient des mineurs en 2023. Et 59 % faisaient état d’un usage répété sur plus d’un an.
Interdit à la vente... mais pas sur internet
Face à la banalisation du phénomène, la loi n°2021-695 du 1er juin 2021 encadre strictement la vente de protoxyde d’azote. Il est interdit de vendre ou d’offrir ce gaz à des mineurs, dans les commerces, lieux publics ou sur internet. La violation de cette interdiction, bien que courante, est passible d’une amende de 3 750 euros.
La loi punit également de 15 000 euros d’amende toute incitation d’un mineur à un usage détourné du produit. La vente de ballons ou de dispositifs facilitant l’inhalation, comme les « crackers », est également prohibée. Pourtant, malgré ce cadre juridique, les contrôles restent complexes et le commerce en ligne continue de prospérer.