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Marc Fesneau (MoDem) : "RN et LFI manipulent la crise agricole !"

Par Adélaïde Motte

INTERVIEW SUD RADIO - Budget, dissolution, crise agricole : Marc Fesneau, député du Loir et Cher et président du groupe Démocrates à l'Assemblée Nationale était "L’invité politique" sur Sud Radio. 

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Marc Fesneau interviewé par Jean-François Achilli sur Sud Radio, le 23 décembre 2025, dans “L’invité politique”.

"RN et LFI manipulent la crise agricole !" : au micro de Sud Radio, Marc Fesneau a répondu aux questions de Jean-François Achilli.

Budget des finances publiques : "la loi spéciale est un pis-aller"

Jean-François Achilli : Il y aura donc une loi spéciale au pied du sapin de Noël des parlementaires. Est-ce un échec pour Sébastien Lecornu, qui n’a pas réussi à faire voter le budget dans les temps ?

Marc Fesneau : "C’est d’abord un échec pour les parlementaires, en particulier pour ceux de l’opposition qui disaient : « Laissez-nous faire, nous sommes capables de nous entendre. » Force est de constater que nous n’en sommes pas là. La loi spéciale, je le dis au passage, est un pis-aller. Ce n’est pas une loi qui permet de résoudre les problèmes budgétaires du pays. Elle permet simplement de lever l’impôt, de reconduire le budget précédent, de reconduire un certain nombre de dépenses, de payer les fonctionnaires et d’emprunter sur les marchés. Ce n’est pas une solution satisfaisante et cela ne peut pas durer. Le Premier ministre avait fait le choix, à la demande d’un certain nombre, de ne pas utiliser le 49.3, en disant au fond : les parlementaires sont des êtres adultes, ce que je crois, et doivent être capables de s’entendre. Ce n’est pas ce qui s’est passé, parce que chacun essaie de rester sur ses lignes rouges. Reconnaissons que nous avons réussi à le faire sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, et qu’on pouvait espérer que sur le projet de loi de finances, on pouvait le faire aussi. Reconnaissons également qu’il y avait un certain nombre de points de convergence, y compris entre le Sénat et l’Assemblée nationale."

Aujourd’hui, l’ennemi, c’est le Sénat ?

Non. L’ennemi n’est pas le Sénat. D’abord, il faut respecter les deux chambres. On peut avoir des désaccords avec le Sénat, mais ses prérogatives ne sont pas celles de l’Assemblée nationale. Le dernier mot revient à l’Assemblée. Il faut saluer le travail qu’a fait Sébastien Lecornu pour essayer de trouver un compromis. Il n’y a pas de querelle entre Sébastien Lecornu et le Sénat. Il y a manifestement une querelle entre les Républicains, parfois entre les Républicains du Sénat et ceux de l’Assemblée nationale. On peut le regretter, mais ce sont les affaires des Républicains. Je regrette d’ailleurs qu’au final, le texte sorti du Sénat présentait un déficit qui dépassait les 5 %, autour de 5,3 ou 5,4 %. Il va donc falloir se remettre au travail dès la rentrée pour essayer de trouver un budget.

Philippe Juvin estime que le Parti socialiste sera d’accord pour un 49.3. C’est ce qui va finir par arriver ?

"J’ai toujours été interrogatif sur la question du 49.3. J’ai toujours dit : est-ce qu’on a besoin de se priver de cet outil, qui n’est pas un outil antidémocratique ? Le 49.3, c’est quoi ? C’est le gouvernement qui engage la responsabilité qui est la sienne sur un texte. Si les parlementaires votent contre, le gouvernement est renversé. Si ce n’est pas un acte démocratique, je ne sais pas ce que c’est. J’aimerais qu’on ait un budget voté par les forces politiques de façon naturelle. Mais si nous n’avons pas de budget voté par les voies normales, il reste le 49.3. J’entends un certain nombre de socialistes dire, plutôt derrière les micros que devant, que le 49.3 pourrait être une solution. Mais comme ils en ont fait un sujet de principe, ils n’osent plus dire qu’ils sont capables d’assumer un 49.3. La vie politique, à un moment, c’est assumer des choix. Assumer le choix de dire « je ne veux pas voter le budget », ça peut s’entendre. Mais assumer le choix de dire « il faut quand même un budget pour le pays », ça peut s’entendre aussi. Et à ce moment-là, le 49.3 s’imposerait."

"L’échec du parlementarisme, c’est la dissolution"

Avec les municipales qui arrivent, le PS peut vouloir se poser en parti responsable ?

"C’est une hypothèse sur laquelle on peut travailler. Mais les socialistes sont une soixantaine, le bloc central est autour de 200. Ce n’est pas simplement le choix des socialistes qui va faire le budget.
La logique, c’est qu’on trouve un point d’équilibre entre des forces politiques qui ne sont pas d’accord, et que ce ne soit pas simplement les conditions du Parti socialiste qui dictent les choses.
Tout le monde a intérêt à ce que nous entrions dans la séquence municipale, puis présidentielle, avec cette affaire budgétaire derrière nous, pour pouvoir envisager sérieusement les politiques publiques à conduire."

Horizons et les Républicains pourraient ne pas voter ce budget ?

Plus on se rapproche des municipales et de la présidentielle, plus le risque est que chacun essaie de marquer son identité. Ce n’est pas une navigation d’eau douce. On est plutôt par gros temps, sans majorité. Plus on se rapproche de la présidentielle, plus les écoutilles vont se fermer, et plus certains diront : « Moi, c’est mes lignes rouges, et rien d’autre », en oubliant un peu l’intérêt du pays.

Est-ce l’échec du parlementarisme ? La dissolution aurait-elle été la solution ?

Non. L’échec du parlementarisme, c’est justement la dissolution. On a réussi à travailler sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale. C’est une réussite du parlementarisme. Dissoudre, c’est six semaines d’élections. On ne règle pas les problèmes de fond, et on peut se retrouver dans la même situation de déséquilibre politique. Qu’est-ce que ça change ? Rien.

Crise agricole : "La France insoumise et le Rassemblement national à l’Assemblée nationale essaient de s’en saisir pour en faire un objet politique"

"La crise agricole est-elle mal gérée ?"

"Non, je pense qu’elle est gérée comme on a souvent géré les crises sanitaires, si vous me parlez de ça, parce qu’elle démarre sur une crise sanitaire. Il n’y a pas que ça, à mon avis, dans la crise agricole. Cette crise sanitaire nécessite de prendre des mesures qui sont des mesures extrêmement violentes pour les éleveurs qui sont concernés. La vérité m’oblige à dire que ce ne sont pas des mesures qui sont nouvelles. C’est une stratégie scientifique étayée dans de nombreux pays, qui montre plutôt ses effets. En tout cas, c’est la moins mauvaise des solutions. Mais nous sommes dans une société qui est très fracturée. Certains se servent de ça pour manier les théories du complot et inventer des problèmes qui n’en sont pas. Et il faut écouter la parole d’agriculteurs qui disent : « Je n’ai pas envie de voir mon troupeau abattu totalement. » Et donc, progressivement, la vaccination gagnant, peut-être que ça pourra faire évoluer le protocole sanitaire, mais nous sommes face à des contraintes. La ministre, comme tous les ministres de l’Agriculture qui ont été contraints à ce type de mesure, essaie de trouver un point d’équilibre entre ce que sont les nécessités sanitaires, les nécessités économiques et l’attention qu’il faut porter aux éleveurs, parce que c’est vrai que, pour un éleveur, perdre en vingt-quatre heures l’ensemble de son troupeau, c’est un drame. Ils ont raison quand ils disent qu’il faut essayer autre chose, c’est-à-dire isoler les bêtes touchées. Il ne faut jamais être fermé à la discussion. Ce n’est pas parce que c’est une urgence qu’on fait n’importe quoi. C’est une maladie avec 5 à 10 % de mortalité. Si toute la France était contaminée, c’est entre 900 000 et 1,5 million de bovins qui meurent. Donc on ne va pas tester pour voir. Il faut qu’on fasse des choses qui soient scientifiquement étayées. On peut regarder des choses nouvelles, mais il faut que ce soit étayé par la science, parce que sinon on est dans quelque chose qui ressemble à l’apprenti sorcier. Un ministre, un responsable public, ne peut pas être un apprenti sorcier."

Donc blocage non légitime à vos yeux, là, aujourd’hui.

"Non, je n’ai pas dit non légitime. Je ne rentre pas dans ce genre de considération. Il y a une émotion qui est très forte et je pense qu’il faut essayer de trouver les mots pour dire qu’on entend vraiment et qu’on écoute vraiment. On a essayé, moi quand j’avais eu l’affaire de la grippe aviaire, avec d’autres, de regarder s’il y avait des adaptations du protocole qui pouvaient être faites. Mais on ne peut pas en rabattre sur les questions sanitaires, parce que c’est l’intérêt général. Personne ne peut croire que tout ça est fait pour embêter les éleveurs. Personne ne peut croire que c’est fait pour autre chose que pour sauver les filières. On peut ne pas être d’accord, mais de grâce, ne nous faisons pas des procès en mauvaise foi. Les agriculteurs sont de bonne foi."

Vous pensez que certains sont manipulés politiquement ?

"Ils sont assez adultes pour ne pas être manipulés, me semble-t-il. Certains essaient de les manipuler, oui. Certains essaient de jouer. On voit bien que les extrêmes, par nature, et d’ailleurs dans une forme de collusion, quand on entend La France insoumise et le Rassemblement national à l’Assemblée nationale, on voit bien que, dès qu’il y a une crise, ils essaient de s’en saisir pour s’emparer de la misère du monde et en faire un objet politique. Il suffit de les voir à l’Assemblée nationale, venir avec leurs écharpes, les mêmes à La France insoumise qui empêchent, tous les matins, dès qu’on essaie de lever un certain nombre d’entraves et de contraintes, tous les textes qu’on essaie de faire voter à l’Assemblée nationale. On ne peut pas avoir un double discours. On ne peut pas dire « je défends les agriculteurs » et laisser à ce point un certain nombre d’entraves vis-à-vis de ce que sont leurs métiers et leurs contingences."

L’accord Mercosur, est-ce qu’à vos yeux il sera signé en janvier, en février ?

"Je n’en sais rien. Le président de la République a fixé un certain nombre de conditions. On ne peut pas à la fois dire qu’il faut des conditions de réciprocité, des clauses de sauvegarde, c’est-à-dire que si ça déséquilibre les marchés, on stoppe les importations, et, si on les obtient, dire de toute façon qu’on ne signera pas. Par ailleurs, les accords commerciaux, il y a vingt-sept pays membres. Il faut une minorité de blocage. Si le président de la République n’avait pas trouvé cette minorité de blocage depuis des années, le Mercosur serait déjà signé. Par ailleurs, on a besoin d’échanger. Ça fait vingt-cinq ans que ça dure."

Les mesures miroir, les clauses de sauvegarde, on en parle au dernier moment parce que les agriculteurs sont dans la rue.

"C’est le problème de ces accords, et en particulier du Mercosur. Ce sont des accords dont la négociation a commencé il y a vingt-cinq ans. Entre-temps, il s’est passé beaucoup de choses. Personne n’est au courant, puis tout d’un coup le périscope sort et on dit : « Eurêka, on a trouvé un accord. » Il y a un problème de méthode. Mais dès lors qu’on obtiendrait un certain nombre de choses, la question se posera. Et par ailleurs, on peut être tout seul contre, ça ne change rien dans l’espace européen. Il vaut mieux dire la vérité. Le problème de fond de l’agriculture, c’est un problème de compétitivité : accès à l’eau, charges, contrats."

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