Une performance qui ne se fait pas n'importe où, n'importe comment, puisque qu'après avoir été enfermé dans une pierre, le monsieur va s'enfermer dans un rectangle de plexiglas pour une durée de 21 à 26 jours, afin de couver une douzaine d'œufs. La prestation se déroule au Grand Palais de Tokyo, dans le même temps une bonne partie des « oeuvres habitables » du monsieur y sont exposées jusqu'au 8 mai prochain.
Que l'on se rassure, le bonhomme dispose de tout ce qu'il faut pour survivre. L'air et la température sont stables, il y a de quoi boire, manger et lire. Afin de ne pas craquer l'as de la performance loufoque s'est tout même autorisé une petite sortie par jour, mais attention, elle ne doit pas durer plus d'une demie-heure. Il se permet une unique coquetterie, puisque pour couver, il se couvre d'un manteau traditionnel coréen réalisé par l'artiste Seulgi Lee. Dure vie que celle de l'homme qui désire éprouver le frisson du gallinacé.
L'œuf ou la poule ?
Comme c'est sa première confrontation artistique avec le vivant, Abraham Poincheval est plus anxieux qu'à son habitude, surtout que l'acte est retransmis en direct via la plate-forme Youtube. Il explique la raison de son choix : « Qu'un homme couve des œufs m'intéresse parce que cela pose la question de la métamorphose et du genre. Ce sont des énonciations très précises qui peuvent tout à coup devenir poreuses, s'éroder, se transformer. »
Une explication totalement dans l'air du temps parisien, que l'on peut complèter de l'habituelle caution littéraire, puisqu'il semblerait que la performance soit inspirée d'une nouvelle de Guy de Maupassant. Toine, l'anti-héros de la nouvelle éponyme, est un cabaretier fêtard qui se retrouve paralysé par une attaque cardiaque. Sa femme trouve alors un emploi évident pour son pauvre paralytique de mari : lui faire couver des œufs. C'est une farce normande qui se moque de l'esprit simplement pratique des paysans.
Lorsque la farce devient réalité, on ne sait plus très bien s'il faut en rire ou s'en désoler.