Depuis le mouvement des gilets jaunes en 2018, le slogan « Macron démission » accompagne chaque moment de tension politique. Mais depuis quelques mois, le refrain prend une tournure institutionnelle. Après la démission express du Premier ministre Sébastien Lecornu dix heures après la nomination de son gouvernement, le chef de l’État se retrouve sans majorité, sans gouvernement stable et désormais sans véritable soutien politique solide.
Presque unanimement, les partis politiques, de la gauche radicale à l’extrême droite, convergent pour dénoncer une impasse politique. Et réclament sa tête. Jean-Luc Mélenchon a martelé que « le président n’a plus de majorité, plus de gouvernement, plus de légitimité ». Il demande « l’examen immédiat de la motion déposée par 104 députés pour la destitution d’Emmanuel Macron ». Le député LFI David Guiraud estime également que « l’avis du président n’a plus d’importance ». La cheffe des Ecologistes, Marine Tondelier, propose, elle, trois issues : « la destitution, la dissolution ou la cohabitation ».
.@MathiasLeboeuf : "Je pense à Ubu roi, d'Alfred Jarry, quand je vois Emmanuel #Macron. On est dans un cas de figure ubuesque. On est vraiment chez les dingues !"#MettezVousDaccord pic.twitter.com/PX1rchJ8sf
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De Mélenchon à Le Pen en passant par Lisnard et Bardella
À l’extrême droite, Marine Le Pen dénonce un président « puéril et irresponsable » qu’elle accuse de « contribuer au blocage » du pays. Et en conclut que « deux voies sont possibles : soit la démission, soit la dissolution ». Son bras droit, Jordan Bardella, va dans le même sens. Il estime qu’« il ne peut y avoir de stabilité retrouvée sans un retour aux urnes et sans la dissolution de l’Assemblée nationale ».
Même son de cloche chez certains membres des Républicains. Le maire de Cannes, David Lisnard, juge que « l’intérêt de la France commande qu’Emmanuel Macron programme sa démission pour préserver les institutions ». Selon lui, « il est le premier responsable de cette situation » et « de nouvelles législatives devront suivre l’élection du nouveau président ».
Même Édouard Philippe réclame sa tête
Mais les coups les plus rudes pour Emmanuel Macron ne viennent plus de ses adversaires, mais de ses anciens alliés. À commencer par Édouard Philippe, aujourd’hui à la tête d’Horizons. Il a appelé ce mardi matin au micro de RTL le président à « organiser une présidentielle anticipée » après avoir nommé un Premier ministre chargé « d’exécuter les affaires courantes et de faire adopter un budget ». L’ancien chef du gouvernement estime que le président « s’honorerait » en annonçant qu’il quitterait ses fonctions dès ce budget adopté.
.@mbaccialone : "Ce qui me fait doucement rire c'est que Gabriel #Attal et Edouard #Philippe s'inventent une nouvelle virginité alors qu'ils ont participé à l'aventure macronienne"#MettezVousDaccord pic.twitter.com/vPLGEYRjiX
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Droit dans ses bottes
Depuis ses débuts en politique, Emmanuel Macron revendique un rapport singulier au pouvoir, inspiré d’une conception « jupitérienne » qu’il avait lui-même théorisée dès 2017. À l’époque, il expliquait vouloir redonner au président une « verticalité » perdue, en s’élevant au-dessus du tumulte partisan. Dans une interview au Point, il précisait : « Le président de la République n’est pas seulement un acteur de la vie politique, il en est la clé de voûte ».
Cette vision quasi monarchique du rôle présidentiel, héritée du gaullisme et de la philosophie politique classique, guide encore aujourd’hui sa manière d’affronter la crise. Se taire, observer, trancher au moment opportun. Crise des Gilets jaunes en 2018, Covid-19, révolte sur la réforme des retraites, puis aujourd’hui effondrement de sa majorité. À chaque fois, Macron a choisi la même posture : tenir bon, quitte à être perçu comme déconnecté.
Une première depuis De Gaulle ?
Si pourtant Emmanuel Macron venait à démissionner, l’événement serait d’une portée historique sans précédent. Depuis l’instauration du suffrage universel direct pour l’élection présidentielle en 1965, aucun chef de l’État n’a quitté volontairement l’Élysée avant la fin de son mandat. La seule exception, Charles de Gaulle en 1969, avait préféré partir après la désapprobation populaire du référendum sur la réforme du Sénat. La démission d’un président élu, en dehors d’un échec électoral ou d’une destitution, ouvrirait une brèche institutionnelle et symbolique majeure dans la Ve République. Un scénario que Macron, fidèle à sa posture de résistance, ne semble aujourd’hui nullement vouloir envisager.
Capable de tout, même de jeter l'éponge ?
Actuellement, trois scénarios dominent les discussions à Paris : une dissolution, une cohabitation ou une démission. Selon son entourage, Emmanuel Macron « prendra ses responsabilités » en cas d’échec dans les négociations confiées à Sébastien Lecornu. Si l’hypothèse de la démission reste le moins probable, Emmanuel Macron a déjà démontré qu’il pouvait être le roi du contre-pied. Capable de tout depuis sa première élection en 2017, Emmanuel Macron pourrait-il à nouveau surprendre son monde en 2025 et renoncer à la présidence du pays ? Réponse dans les prochaines heures.