C’est un rendez-vous qui devait refermer les plaies. Mais il les a rouvertes. Censé permettre aux partenaires sociaux et à l’exécutif de retisser un lien après l’adoption contestée de la réforme des retraites en 2023, le conclave social s’est heurté à un mur. FO a quitté les discussions dès les premières réunions, la CGT a claqué la porte dans la foulée et même la CFDT, pourtant présente, a dénoncé l’absence de méthode. Ce matin, un nouveau palier a été franchi : Olivier Faure a ouvertement menacé le gouvernement d’une motion de censure. Les conséquences de cet échec sont déjà là.
Dialogue social : une rupture consommée
La première conséquence de cet échec, c’est la fin de ce que le gouvernement appelait encore il y a peu "le nouveau souffle du dialogue social". Annoncé en janvier 2025, le conclave devait créer un cadre pour aborder plusieurs dossiers brûlants : emploi des seniors, pénibilité, retraites complémentaires, soutien à la reconversion. Mais aucun calendrier n’a été fixé, aucun objectif clair n’a été rempli et aucune méthode n’a convaincu.
Résultat : FO et CGT ont quitté la table, d’autres syndicats comme la FSU ont exprimé leur scepticisme et la CFDT elle-même s’interroge sur la suite du dialogue social. Même les réunions prévues à Matignon ne suffisent plus à sauver les apparences. La fracture entre le gouvernement et les partenaires sociaux n’est, pour le moment, pas près de se résorber.
La méthode de l'exécutif fragilisée
L’échec du conclave touche directement le Premier ministre. En voulant incarner une méthode plus inclusive que son prédécesseur, François Bayrou espérait gagner du crédit auprès des syndicats. Mais l’absence de résultat affaiblit cette ambition. Pire : elle l’expose à un double procès en improvisation et en communication creuse.
Côté présidentiel, le silence d’Emmanuel Macron sur cette séquence interpelle. Le chef de l’État, qui affirmait vouloir "réconcilier les Français avec la réforme", se montre absent pour le moment. Une posture qui alimente le sentiment d’un pouvoir replié sur lui-même, sans cap social clair. Dans les rangs de la majorité, certains redoutent déjà que l’échec du conclave pèse lourd sur les futures réformes, notamment celle de l’assurance chômage.
Des syndicats regonflés… et la rue en ligne de mire
Le revers du gouvernement redonne du souffle à un mouvement syndical qui, après la réforme de 2023, semblait affaibli. En claquant la porte, FO et la CGT ont renforcé leur posture de contre-pouvoir. Leur retrait n’est pas perçu comme un désengagement, mais comme un signal de fermeté.
La CFDT, bien qu’encore présente dans les discussions, ne cache plus ses doutes. Et sur le terrain, la tentation de remobiliser les troupes renaît. Si le gouvernement lance de nouvelles réformes sociales sans base de négociation, l’ombre des manifestations risque de regagner les rues. Des mobilisations sur les retraites complémentaires, ou sur l’emploi des seniors, risquent d’éclater.
La menace de censure de retour dans l’hémicycle
Dernier front ouvert par cet échec : le terrain parlementaire. Mardi 24 juin sur BFM TV, Olivier Faure a mis en garde l’exécutif. Si François Bayrou ne respecte pas sa promesse de laisser le Parlement trancher en dernier ressort sur les retraites, le Parti socialiste déposera une motion de censure. Une menace sérieuse, dans un contexte de majorité relative et de tensions entre partenaires centristes.
Le spectre du 49.3 plane encore, et les oppositions entendent bien l’instrumentaliser. À trop fragiliser le dialogue social, le gouvernement risque de fragiliser son équilibre institutionnel. Si les syndicats sont dans la rue, et l’opposition dans l’hémicycle, la majorité pourrait bien vaciller sur les deux fronts à la fois.
Une fracture toujours ouverte
Le conclave devait reconstruire une confiance. Il n’a fait que révéler l’étendue de la défiance. Loin d’apaiser les tensions, il a élargi le fossé entre le gouvernement, les syndicats et, désormais, le Parlement. Sans cap social clair, sans socle politique solide et sans perspectives concrètes, l’exécutif avance sur une ligne de crête.
Dans cette atmosphère de flou, les conséquences de l’échec ne font que commencer. Pendant que le pouvoir cherche un terrain d’entente, ses interlocuteurs, eux, se tiennent déjà en position. Pour s’opposer. Pour se mobiliser. Ou pour censurer.