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Jérémie Patrier-Leitus : "Les jeunes délaissent la radio et la télévision, et nous devrions rester les bras croisés ?"

Jérémie Patrier-Leitus, député Horizon du Calvados, était l'invité de Valérie Expert et Gilles Ganzmann sur Sud Radio le 3 juillet 2025 dans "Le 10h - midi".

Jérémie Patrier-Leitus
Jérémie Patrier-Leitus, invité de Valérie Expert et Gilles Ganzmann le 3 juillet 2025 sur Sud Radio dans "Le 10h - midi".

L'Assemblée nationale a commencé à examiner, le 30 juin 2025, la proposition de loi relative "à la réforme de l’audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle". Ce texte prévoit de créer une holding, baptisée "France Médias", qui chapeauterait France Télévisions, Radio France et l'Ina, sous l'autorité d'un président-directeur général. Le texte, porté au Palais-Bourbon par Virginie Duby-Muller (apparenté Droite républicaine) et Jérémie Patrier-Leitus (Horizons), est défendu par la ministre de la Culture, Rachida Dati, tandis que la gauche s'y oppose.

"Face à la concurrence des plateformes étrangères, des réseaux sociaux, face aux ingérences étrangères, il faut que l'audiovisuel public travaille ensemble"

Pourquoi cette loi ? "L'objectif, c'est de dire qu'il faut dans notre pays, à côté d'un audiovisuel privé fort, des radios privées, des télés privées, un audiovisuel public fort, puissant, qui est capable de résister aux plateformes du numérique, qui est capable de résister aux réseaux sociaux, qui est capable de répondre à un chiffre qui devrait tous nous alerter : 70% des jeunes s'informent aujourd'hui exclusivement sur les réseaux sociaux. Et nous, nous disons que face à cette concurrence des plateformes étrangères, des réseaux sociaux, dans cette guerre de l'information, des ingérences étrangères, il faut que l'audiovisuel public rassemble ses forces, travaille ensemble, coopère pour pouvoir répondre à des défis qui sont majeurs. Et on considère que le statu quo aujourd'hui n'est pas acceptable", a déclaré Jérémie Patrier-Leitus.

Une telle fusion n'anéantira-t-elle pas l'indépendance de chacune des rédactions ? "Tout le monde a oublié qu'avant, France 2 et France 4 étaient des entreprises séparées et qu'on a créé en 2009 France Télévisions, qui a rassemblé les télévisions publiques. On avait dit la même chose : 'Il va y avoir un directeur de l'information unique, ça sera un censeur'. Il y a aujourd'hui un directeur unique de l'information pour France Télévisions. Est-ce que ça a empêché de faire un reportage dans 'Complément d'enquête' sur la ministre de la Culture? Non. Donc, expliquer qu'un seul directeur de l'information pour l'audiovisuel public, c'est une censure et une tutelle politique, c'est se raconter des histoires", a répondu Jérémie Patrier-Leitus.

"On préserve l'audiovisuel public d'une privatisation"

Cette fusion ne rendra-t-elle pas une privatisation plus facile à réaliser ? "Je crois que c'est tout le contraire. Je pense que si on a un acteur unique, c'est beaucoup plus compliqué de le privatiser. Les juristes expliquent que privatiser une structure unique, c'est plus compliqué, parce qu'ensuite il y a des filiales. Au contraire, on préserve l'audiovisuel public d'une privatisation. Et puis, si l'audiovisuel public fait mieux, rassemble ses forces, travaille ensemble, peut-être que certains réfléchiront à deux fois avant une privatisation. Si demain on a un média public de proximité, 'Ici', qui fonctionne et qui offre aux habitants des territoires ruraux des contenus, des programmes remarquables comme ils le font aujourd'hui, mais ensemble… peut-être que certains politiques réfléchiront à deux fois avant de le privatiser. Si demain on a une grande chaîne publique de l'information… On ne peut pas se satisfaire des audiences de Franceinfo télévision, qui est loin derrière les acteurs privés. Si demain cette chaîne d'information publique remonte dans les audiences…"

"Est-ce qu'il ne faut pas une stratégie commune entre Radio France et France Télévisions en termes d'intelligence artificielle ?"

Est-ce que l'unique force de Radio France, ce n'est pas d'avoir zéro publicité ? "Il y a les deux. Bien sûr que certains auditeurs vont vers l'audiovisuel public parce qu'ils savent que c'est un sanctuaire, qu'il n'y a pas de publicité. Mais je pense que c'est aussi le fait que l'audiovisuel public ait pris le virage du numérique. Regardez ce que fait Radio France pour les enfants avec des programmes dédiés, des podcasts… Donc, il y a une capacité d'innovation formidable dans l'audiovisuel public, qu'il faut saluer et encourager. Et je pense que cette holding sera une chance. Concernant l'intelligence artificielle, est-ce qu'il ne faut pas une stratégie commune entre Radio France et France Télévisions ? Est-ce qu'on ne peut pas avoir une politique commune en matière d'éducation aux médias ? Comment nos jeunes, qui sont soumis à un flux d'informations et à des fausses informations… Bien sûr que Radio France peut y aller tout seul dans l'éducation aux médias. Bien sûr que France Télévision peut y aller tout seul. Mais est-ce que demain, on ne peut pas avoir un grand programme de l'audiovisuel public qui va dans les écoles, qui va dans les collèges…", a répondu Patrier-Leitus.

"Devrait-on se contenter du statut quo et accepter les menaces ?"

Selon Jérémie Patrier-Leitus, il convient de se battre contre la concurrence des plateformes étrangères et des réseaux sociaux. "J'entends les oppositions de la gauche. Mais les jeunes délaissent la radio et la télévision pour s'informer sur les réseaux sociaux, et nous devrions ne rien faire, rester les bras croisés ? Les géants du numérique assoient leur domination, et on devrait nous résigner. On a aujourd'hui Google qui veut devenir un acteur majeur de la télé. YouTube, aujourd'hui, c'est 15% de la consommation de télé aux États-Unis. Et on devrait se contenter du statu quo et accepter ces menaces ? On est dans un moment où la guerre de l'information fait rage, où il y a de la désinformation, où il y a la concurrence des plateformes étrangères, des réseaux sociaux… Et il faut qu'on se batte contre ça. Et c'est l'objectif de cette réforme. Je ne me résigne pas à ce que des jeunes s'informent exclusivement sur les réseaux sociaux et arrêtent de regarder la télévision et la radio. Ce changement d'usage, ces mutations technologiques, cette concurrence des plateformes étrangères et des réseaux sociaux, il faut y répondre. Chaque entité de l'audiovisuel public le fait avec ses moyens, comme il peut, mais il n'y arrivera pas tout seul si on ne se met pas ensemble pour avoir un accès…"

Retrouvez “L'invité média” de Gilles Ganzmann chaque jour à partir de 10h00 dans “Sud Radio Média” avec Valérie Expert.

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