Au-delà de la polémique sur le Maréchal Pétain, cette itinérance mémorielle n’est pas un chemin bordé de roses.
La question des carburants est venue toute la semaine percuter la solennité et le travail de mémoire voulu par l’Elysée. Pas un déplacement dans la rue sans qu’il soit interpellé, parfois de façon virulente. Hier, un retraité le traitait d’’escroc’, une autre lui a dit "Pourquoi vous nous massacrez ?"
Les mots sont très durs et sont relayés sur toutes les chaînes d’info et les radios.
Le fait que le président réponde toujours la même chose, "J’entends la colère mais je ne changerai rien" a amplifié l’image d’une rupture toujours plus grande entre Macron l’exécutif et le reste du pays.
Et je ne crois pas au hasard de cette déclaration sur Pétain. Elle n’est pas mal calibrée. Macron connaît parfaitement l’adage prêté à Pasqua : "Quand on est emmerdé par une affaire, il faut susciter une affaire dans l’affaire, jusqu’à ce que personne n’y comprenne plus rien."
La question de Philippe Pétain a été tranchée par la Nation. Il a été condamné à mort et frappé d’indignité nationale.
Fallait-il faire ressurgir, face à ce Pétain antisémite total, collaborateur zélé du régime nazi, le soldat victorieux de Verdun ? Non, évidemment. En tout cas, pas de la part d’un président de la République. Car dans ces temps précis de confusion, le relativisme sur une figure honnie de notre histoire entraîne encore plus de confusion.
En tout cas, le fracas a masqué quelques heures le problème des carburants. À ce jeu pervers et dangereux, c’est assez réussi.
Rien n’est jamais hasard en politique. Rappeler la face moins sombre de Pétain, c’est aussi adresser un message à cette France nostalgique, cet électorat d’extrême-droite qui pratique le relativisme. J’entends déjà les cris d’orfraie sur cette accusation d’électoralisme pur. Et pourtant, difficile d’imaginer qu’un homme aussi intelligent qu’Emmanuel Macron se risque à une déclaration entre deux portes, sur un sujet aussi brûlant, sans viser un but.
Cette itinérance avait deux objectifs. Rencontrer les Français et faire œuvre de pédagogie sur la grande guerre. La rencontre s’est transformée en choc frontal quotidien. Il y a très peu d’images chaleureuses, de sourires. Il n’y a que des reproches. Quant à la pédagogie, c’est totalement raté.
Sa phrase, "Il est légitime de rendre hommage à Philippe Pétain" va lui coller aux basques pendant toute la commémoration. Et elle occulte la volonté de pédagogie de cette itinérance, qui s’est déjà transformée en chemin de croix dans l’opinion.