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Procès de la sextape: le maire de Saint-Etienne face à ses propres mots

A la barre des prévenus mercredi, le maire de Saint-Etienne Gaël Perdriau, jugé pour chantage à la sextape, explique avec pédagogie la politique et le budget municipal, mais perd un peu sa contenance confronté à un enregistrement de ses propres propos.

OLIVIER CHASSIGNOLE - AFP/Archives

A la barre des prévenus mercredi, le maire de Saint-Etienne Gaël Perdriau, jugé pour chantage à la sextape, explique avec pédagogie la politique et le budget municipal, mais perd un peu sa contenance confronté à un enregistrement de ses propres propos.

L'édile de 53 ans, exclu des Républicains, est soupçonné d'avoir muselé son ancien premier adjoint et rival, le centriste Gilles Artigues, avec une vidéo intime, et d'avoir financé le piège avec des fonds publics.

Il réfute vivement ces accusations, admettant tout juste avoir eu connaissance de l'existence d'un film montrant Gilles Artigues avec un prostitué, réalisé en janvier 2015 par d'anciens membres de son entourage.

Sauf qu'en novembre 2017, il a clairement menacé son premier adjoint de diffuser ces images, sans savoir que ce dernier l'enregistrait. Et la bande son de cet échange a été produit mercredi par le tribunal correctionnel de Lyon.

"Une fois que c'est sur les réseaux, ce n'est plus du chantage", "c'est une exécution", l'entend-on dire dans cette conversation animée.

Le maire de Saint-Etienne Gaël Perdriau arrives au tribunal de Lyon le 22 septembre 2025

Le maire de Saint-Etienne Gaël Perdriau arrives au tribunal de Lyon le 22 septembre 2025

OLIVIER CHASSIGNOLE - AFP

Gaël Perdriau semble par ailleurs connaître l'existence d'un montage ne comportant que des extraits de la scène compromettante: "ça, c'est peut-être une mise en scène, mais le film complet, ce n'est pas une mise en scène".

Quand Gilles Artigues lui demande s'il est le commanditaire, le maire répond "absolument pas". Mais ajoute: "on m'a remis un clé USB où il y avait à voir, tout ce qu'il y avait à voir..."

- "Bluffe"-

Confronté à ce document accablant, Gaël Perdriau reconnaît que ses propos ne sont "pas glorieux" et se dit "profondément attristé" de savoir que ces "quelques minutes sordides" puissent éclipser ses trente années d'engagement dans la vie politique stéphanoise.

Il déroule surtout point par point ses arguments pour tenter de minimiser leur poids.

D'abord, quand il dit avoir la clé USB, il "bluffe" dans le cadre d'un rapport de force avec Gilles Artigues, assure-t-il.

Ensuite, ses mots ont "dépassé sa pensée" parce qu'il était "en colère" contre son premier adjoint, accusé d'être déloyal.

Il admet aussi qu'il y a bien eu "menace, oui, mais du chantage, non ! Il n'y a pas de contrepartie demandée".

Gilles Artigues au tribunal de Lyon le 22 septembre 2025

Gilles Artigues au tribunal de Lyon le 22 septembre 2025

OLIVIER CHASSIGNOLE - AFP

Gilles Artigues, qui a déposé plainte pour chantage aggravé une fois la vidéo révélée par Mediapart en 2022, soutient, lui, qu'il a été obligé de mettre en sourdine ses ambitions sous peine de voir ce film révélé.

Gaël Perdriau assure que son premier adjoint n'a jamais été brimé. Mais à la fin de leur échange de 2017, il lui lance : "tu me fais chier avec ton existence politique propre".

- "Equilibriste" -

Les débats ont ensuite abordé un autre élément délicat: le versement en 2014 et 2015 de deux subventions de 20.000 euros, prises sur la réserve du maire, à des associations qui les ont ensuite reversées à l'auteur principal du piège, Gilles Rossary-Lenglet.

Leur montant a semblé "exceptionnel" à la présidente du tribunal, qui a rappelé qu'en moyenne les subventions attribuées sur cette réserve étaient de 1.688 euros en 2014.

La magistrate s'est également interrogée sur le caractère "dérogatoire" et rapide de la procédure d'attribution, ce qui a entraîné de longues explications de Gaël Perdriau sur le fonctionnement du budget municipal.

"Il répond bien, mais il répond à côté", a ironisé à la suspension d'audience l'avocat des parties civiles, André Buffard, raillant son "numéro d'équilibriste".

L'ancien directeur de cabinet du maire de Saint-Etienne, Pierre Gauttieri, arrive au tribunal de Lyon, le 22 septembre 2025

L'ancien directeur de cabinet du maire de Saint-Etienne, Pierre Gauttieri, arrive au tribunal de Lyon, le 22 septembre 2025

OLIVIER CHASSIGNOLE - AFP

Interrogé au total pendant une dizaine d'heures, le maire est également revenu sur le témoignage de son ancien directeur de cabinet qui, la veille, l'avait accusé d'avoir donné le feu vert au projet de sextape. "Pierre Gauttieri se retourne contre moi sans doute pour atténuer sa responsabilité", a-t-il supposé.

A quoi, ce dernier a rétorqué: "en 2023 j'ai craqué, j'en ai ras-le bol de lire que je suis le seul responsable (...) désolé, j'ai un patron au dessus de moi !"

Gaël Perdriau encourt dix ans de prison et une peine d'inéligibilité. Le procès durera jusqu'à lundi et le jugement sera sans doute mis en délibéré.

Par Charlotte PLANTIVE / Lyon (AFP) / © 2025 AFP

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