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Malik Salemkour (LDH) : "Macron nous fait du Sarkozy : un attentat, une loi d’exception"

Par Mathieu D'Hondt

Malik Salemkour (président de la Ligue des droits de l‘Homme) était ce jeudi l'invité du Grand matin Sud radio.

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En cette période marquée par la menace terroriste, le gouvernement d’Édouard Philippe souhaite aller plus loin dans la logique sécuritaire. Un projet de loi pour pérenniser le régime d’exception va ainsi être présenté dans deux semaines en Conseil des ministres. Invité de Dimitri Pavlenko ce jeudi, Malik Salemkour (président de la Ligue des droits de l'Homme) nous confie son inquiétude.

Bonjour Malik Salemkour, quel est réellement le projet du gouvernement ?

Le projet est d’essayer de transmettre dans le droit commun les dispositions exceptionnelles qui ont été prises après les attentats que nous avons vécu il y a à peu près 2 ans. Concrètement, qu’est-ce que c’est l’état d’urgence ? C’est donner au préfet et à la police des pouvoirs extraordinaires sans les juges pour pouvoir intervenir vite contre les terroristes. L’assignation à résidence, les écoutes, des perquisitions, des réquisitions ect… Ces dispositions sont prévues dans la loi, seulement là on veut les mettre sous l’autorité d’un préfet ou d’un policier.

Il n’y aurait donc plus besoin de demander à un juge la moindre justification pour ces opérations ? La police et le préfet pourraient donc décider unilatéralement d’envoyer une équipe fouiller votre domicile sur la simple base de soupçons ?

Exactement ! Sous le moindre soupçon. L’intérêt d’un État de droit, c’est justement que les pouvoirs se contrôlent eux-mêmes donc aujourd’hui un juge permet de vérifier si l’intention du préfet est juste. Or, on a constaté qu’il y avait eu plus de 4 200 perquisitions et on a eu des assignations à résidence. On pourrait se dire que c’est efficace pour lutter contre le terrorisme. Hélas non ! Seulement 20 procédures ont été instruites par le parquet antiterroriste à partir de ces mesures d’exception. 99 % des procédures n’ont pas concerné l’antiterrorisme.

Mais ces 20 dossiers auraient peut-être échappé à la justice sans cet état d’urgence ?

Est-ce qu’ils n’auraient pas été pris par le parquet sans ces dispositions ? Ce que je vois, c’est que derrière on a arrêté des militants syndicaux, des écologistes, des gamins (durant la Cop 21, à Notre-Dame-des-Landes ou les manifestations contre la Loi travail) et concrètement c’est ça que le gouvernement veut inscrire durablement dans la loi. Ça va tous nous concerner.

Quand on voit ce qu’il s’est passé à Londres, on se dit que dans ce genre d’affaire, l’entrée de l’état d’urgence dans le droit a une vraie utilité s’il permet de neutraliser à l’avance des gens qui pourraient passer à l’acte.

Sauf qu’il faudrait que ça soit efficace, or justement on a bien vu que ça ne l’est pas et que ça n’a véritablement pas permis, par ces dispositions, de prévenir les attentats. Qu’il y ait du renseignement et de la surveillance, il n’y a aucun problème mais il faut que ça reste dans le cadre du droit. Qu’attentent les terroristes ? Justement que l’on mette des dispositions qui fragilisent la démocratie, qui mettent les populations les unes contre les autres. Ces dispositions vont amplifier les contrôles au faciès et les procédures arbitraires.

Que suggéreriez-vous au gouvernement pour améliorer la sécurité des Français sans nuire aux libertés individuelles ?

Tout simplement ce qu’a dit Mr Macron lorsqu’il était candidat, c’est-à-dire d'arrêter l’état d’urgence et appliquer le droit commun.

C’est un renoncement de sa part ?

C’est une surprise, mais il fait comme les autres. Il nous fait du Sarkozy : un attentat, une loi d’exception et la poursuite de l’état d’urgence. Il avait dit qu’il en sortirait, il ne l’a pas fait !

 

>> Retrouvez l'intégralité du podcast de l'interview :

 

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