La ministre de l'Éducation Élisabeth Borne a annoncé mardi qu'elle allait "faire appel" de la décision du tribunal administratif de Lille qui a décidé la semaine dernière de rétablir le contrat d'association avec l'État du lycée musulman lillois Averroès.
Ce contrat d'association entre l'État et ce lycée, qui était jusqu'en septembre 2024 le principal lycée musulman sous contrat de France, avait été résilié en décembre 2023 par la préfecture du Nord, qui avait évoqué des "manquements graves aux principes fondamentaux de la République".
Après la décision de la justice administrative de le rétablir, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a notamment plaidé la semaine dernière pour que l'État fasse appel de cette décision.
"Il y a plusieurs manquements graves qui ont amené l'État à résilier ce contrat", a souligné Élisabeth Borne sur TF1 mardi matin.
Parmi ces manquements "il y a notamment le fait que l'établissement a interdit l'accès à des inspecteurs de l'éducation nationale pour pouvoir faire un contrôle de l'établissement, et ça c'est inacceptable", a-t-elle relevé.
"C'est un établissement sous contrat, ça veut dire qu'il est financé à 75% par de l'argent public, c'est inacceptable qu'on ne permette pas à des agents de l'État d'accomplir leur mission dans l'établissement, donc j'ai décidé en effet de faire appel", a-t-elle insisté.
"Ça légitime une forme de perte de confiance et donc de résilier ce contrat, c'est ce que nous défendrons en appel", a indiqué Mme Borne.
Le tribunal administratif de Lille a expliqué avoir annulé la décision de résiliation parce qu'elle n'établissait pas "l'existence de manquements graves au droit" et que la procédure était "entachée d'irrégularités".
Dans sa décision consultée par l'AFP, la juridiction reconnaît que le refus opposé aux inspecteurs constitue bien "un manquement" à l'obligation de se "soumettre aux contrôles de l'État", mais souligne qu'il s'agit du premier incident de ce type depuis la signature du contrat en 2008, et qu'il n'a pas été réitéré depuis.
Ainsi, ce manquement n'était pas d'une gravité suffisante pour justifier la résiliation, selon le tribunal.
Dans un communiqué, l'association Averroès fait valoir qu'il s'agit d'un "manquement individuel" de l'ancien chef d'établissement, qui s'était expliqué en évoquant la présence ce jour-là d'une commission de sécurité venue vérifier la conformité des locaux. Le Conseil d'administration avait réagi "en mettant fin aux fonctions dudit chef d'établissement".
L'Education nationale a mené plusieurs inspections, sans trouver matière à remettre en cause le contrat d'association.
Sollicité par l'AFP, le directeur du groupe scolaire Éric Dufour a estimé que la décision de la ministre de faire appel n'était pas une "surprise" mais que "c'était décevant". "Il me semble que le tribunal administratif a fait la démonstration nécessaire, tout a été dit", a-t-il déclaré.
Le président de la fédération nationale de l'enseignement privé musulman, Makhlouf Mamèche, a dénoncé un "déchaînement", un "acharnement politique qui s'abat sur le réseau privé musulman", lors d'une audition de la commission d'enquête sur les contrôles des établissements scolaires.
AFP / Paris (AFP) / © 2025 AFP