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Adolescent tué à Bordeaux: verdict attendu au terme d'un procès sous tension

Son ouverture, il y a deux semaines, a donné lieu à une bagarre dans le palais de justice. Le procès tendu du meurtre d'un adolescent à Bordeaux, sur fond de rivalité entre quartiers, s'achève vendredi devant la cour d'assises de la Gironde.

LOIC VENANCE - AFP

Son ouverture, il y a deux semaines, a donné lieu à une bagarre dans le palais de justice. Le procès tendu du meurtre d'un adolescent à Bordeaux, sur fond de rivalité entre quartiers, s'achève vendredi devant la cour d'assises de la Gironde.

Trente ans de réclusion criminelle ont été requis contre Abdoulhadre Savane (25 ans) et Marwan Souane (24 ans), accusés d'avoir tiré mortellement sur Lionel, 16 ans, et blessé trois mineurs et un adulte aux Aubiers, quartier populaire du nord de Bordeaux, le 2 janvier 2021.

Une peine de 20 ans a été requise contre le chauffeur présumé du commando, Yassine Salmi (25 ans).

Avant le retrait de la cour pour délibérer vendredi matin, les trois hommes, issus de la cité voisine de Chantecrit, ont nié les faits une nouvelle fois en s'adressant aux proches de l'adolescent décédé.

"Ce qui s'est passé, c'est terrible, j'espère que la famille s'en remettra. Moi, je n'ai tué personne, je suis innocent", a déclaré Marwan Souane. "Je vous donne tout ma force et j'espère que justice lui sera rendue", a dit Abdoulhadre Savane, ajoutant n'avoir "rien à voir avec tout ça".

"Ils n'ont pas hésité à +rafaler+ dans le dos des enfants qui s'enfuyaient", a dénoncé l'avocat général, Jean-Luc Gadaud, fustigeant un mobile "pitoyable", "une simple bataille de rap entre deux quartiers".

"Le premier jour d'audience a montré le niveau de haine", a-t-il ajouté, rappelant "ces hommes en noir venus pour en découdre" le 12 mai.

Tandis que la salle d'audience se vidait, une rixe avait éclaté entre les deux bandes rivales. Le dispositif policier a depuis été renforcé, la jauge de l'assistance réduite.

"Même la mort d'un gamin n'a pas guéri les quartiers de leur haine", a cinglé le magistrat, en voyant dans cette violence "désinhibée" une "photographie de notre temps".

- Intimidations et menaces -

La tension est restée palpable durant le procès, des témoins exprimant leur "peur" de représailles. "Il y a des vérités que je ne dirai pas", a déclaré l'un d'eux, deux femmes refusant de venir déposer devant la cour après des "intimidations".

"Vous avez des accusés qui gardent le silence, qui mentent, des éléments de preuves qui disparaissent, des témoins menacés", a résumé Jean-Luc Gadaud.

Le quartier populaire des Aubiers, à Bordeaux, le 3 janvier 2021

Le quartier populaire des Aubiers, à Bordeaux, le 3 janvier 2021

thibaud MORITZ - MORITZ/AFP/Archives

Il a requis des peines allant de trois ans (dont deux avec sursis) à cinq ans de prison à l'encontre des cinq autres mis en cause jugés pour association de malfaiteurs - tous nient aussi les faits.

Le 2 janvier 2021 en fin de journée, tandis que Lionel et un ami vendaient des pâtisseries au pied d'un immeuble des Aubiers, des témoins ont vu deux hommes cagoulés surgir d'une Clio noire - certains affirmant avoir reconnu la voix et la silhouette de Marwan Souane - conduite par un troisième.

L'accusation s'appuie aussi sur des éléments de téléphonie et l'achat, quelques heures avant la fusillade, de cagoules et de gants en latex - pour faire de la motocross et du ménage, selon les accusés.

"Ces achats signent le crime", a tonné Me Jean Gonthier, l'un des avocats des parties civiles. Mais pour la défense, qui plaide l'acquittement, rien ne prouve la culpabilité des mis en cause.

- "Faire taire les détonations" -

"On a retrouvé l'arme? Non. ADN? Non. Empreintes? Non. Témoin objectif? Non. Lien avec le véhicule volé? Non. Vidéosurveillance? Non plus", a martelé Me Saïd Harir, avocat d'un des tireurs présumés.

Image extraite d'une vidéo prise avec un portable et publiée le 3 janvier 2021 montrant les secours sur les lieux de la fusillade évacuant une des victimes, dans le quartier des Aubiers à Bordeaux

Image extraite d'une vidéo prise avec un portable et publiée le 3 janvier 2021 montrant les secours sur les lieux de la fusillade évacuant une des victimes, dans le quartier des Aubiers à Bordeaux

- - AFP/Archives

Me Christian Blazy, qui défend l'autre, rappelle que selon l'enquête, l'arme utilisée le 2 janvier 2021 l'avait déjà été le 7 mars 2019 lors d'une fusillade à Chantecrit, où un frère de Marwan Souane avait été blessé. Ce qui accrédite, selon le conseil, la piste d'un règlement de comptes impliquant d'autres tireurs, lié au trafic de stupéfiants.

La rivalité entre les Aubiers et Chantecrit s'était exacerbée les semaines précédentes. Après une bagarre dans un bar, une tentative de meurtre avait eu le 14 décembre 2020 sur un jeune des Aubiers. Des tirs avaient eu lieu 11 jours plus tard à Chantecrit.

Et la veille des faits aux Aubiers, un autre frère de Marwan Souane avait été blessé par balle dans la rue.

"La famille vous demande à jamais de faire taire les détonations, dans leur tête mais aussi dans les quartiers", a lancé aux jurés Me Yann Herrera, l'avocat des parents de Lionel, en plaidant mercredi.

Le verdict est attendu en fin de journée.

Par Jean DECOTTE, Marisol RIFAI / Bordeaux (AFP) / © 2025 AFP

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