Françoise Degois, l'un des événements de la semaine est le livre de Nicolas Sarkozy « Journal d'un prisonnier ». 210 pages que vous considérez comme très politiques et un peu fielleuses.
« Oui, fielleuses parce qu'on sent bien que Nicolas Sarkozy a beaucoup de choses qui lui sont restées en travers de la gorge. Notamment l'attitude d'Emmanuel Macron. Pourquoi ? Car le président ne l'a pas prévenu quand on lui retirait la Légion d'honneur. C'est vrai que c'est quand même assez cavalier.
Ce qui vaut à Macron d'être traité dans ce livre de lâche et d'insincère. Il semble loin le temps où Sarkozy considérait que Macron c'était « lui en mieux ». Et qu'il frisait même « une forme de génie ».
"Emmanuel Macron a parfaitement manipulé Nicolas Sarkozy"
Alors de l'eau a coulé sous les ponts. Le jeune président a parfaitement manipulé l'ancien président. Essentiellement par la vanité, le péché mignon de tant de politiques pour conquérir définitivement la droite. Voilà ce qu'a fait Emmanuel Macron. Mais Nicolas Sarkozy l'a aussi utilisé pour garder son influence, continuer à exister, rester dans la roue.
Ce temps-là est bien fini et l’ex-prisonnier ne fera plus aucun cadeau au chef de l'État qui est lui aussi dans un moment crépusculaire. C'est très intéressant car ses pages sur Emmanuel Macron sont particulièrement violentes. C'est ça que j'appelle le caractère fielleux. »
"La dissolution semble inévitable"
« Mais s'il y a une personne qui trouve grâce aux yeux de Nicolas Sarkozy, c'est Marine Le Pen qui a eu des mots assez forts au moment de son incarcération. Probablement parce que ses propres ennuis judiciaires la poussent aussi à une forme de solidarité. Sarkozy décroche alors son téléphone et la remercie. Et c'est là qu'intervient la partie la plus politique de ce livre. Que lui dit-il ? D'abord que la dissolution semble inévitable dans quelques semaines. Ça, c'est l'analyse de Nicolas Sarkozy.
Et surtout qu'il n'appellera pas à un vote et à un front républicain. Au contraire, il évoque « un esprit de rassemblement sans exclusif », autrement dit, la droite et le rassemblement national. Rappelons que Nicolas Sarkozy a reçu Jordan Bardella et Sébastien Chenu. Au moins, les choses sont claires. Il n'y a plus, pour Nicolas Sarkozy, de cordon sanitaire avec l'extrême droite. C'est bien sûr la tendance de la droite actuelle.
Nicolas #Sarkozy ne s'associera pas à un "front républicain" contre le RN : "C'est la première fois qu'il s'exprime aussi clairement sur l'union des droites. Ce fantasme devient jour après jour une réalité" affirme @francoisedegois #GrandMatin https://t.co/zErVwxZNBq pic.twitter.com/BLNcjq7juQ
— Sud Radio (@SudRadio) December 8, 2025
Il suffit d'écouter Bruno Retailleau qui explique que le RN est dans l'arc républicain, alors que LFI n'y est pas. Ou alors Laurent Wauquiez qui estime que pour lui, le choix est clair entre LFI et le RN. Mais c'est la première fois que Nicolas Sarkozy s'exprime aussi clairement sur un rassemblement qui serait en fait l'alliance des droites, théorisée par l'un de ses conseillers favoris puis répudiés, Patrick Buisson.Ce qui était un fantasme devient donc jour après jour une réalité et s'ancre un peu plus sous la plume de l’ex-président. »
"L'Elysée est une drogue dure"
« Nicolas Sarkozy dit cela parce qu'il pense que c'est le sens du temps d'abord, c'est son analyse politique. Plus profondément, il y a toujours le même moteur au fond de lui comme François Hollande d'ailleurs, comme Valéry Giscard d'Estaing qui toute sa vie a couru après une réélection à l'Elysée.
Ce pouvoir-là, l'Elysée est une drogue dure et il est difficile de la quitter. Il suffit de voir comment Emmanuel Macron s'accroche à toutes les branches pour y rester, mais il est difficile de quitter même l'idée de la conquête. Parce que c'est mourir un peu.
"Il doit continuer à écrire sa légende"
Nicolas Sarkozy fait un calcul assez simple : si Jordan Bardella n'est pas assez solide dans une présidentielle, si les circonstances politiques et économiques s'aggravent, eh bien le pays aura peut-être besoin d'un homme fort dans la tempête, autrement dit un homme fort comme lui. C'est évidemment son vœu, il doit pour cela continuer à écrire sa légende, c'est-à-dire à transformer des faits délictueux qui lui valent condamnation en épopées romanesques.
C'est le but de ce livre, je ne sais pas s'il l’atteindra. Mais on est à peu près certain qu'il en vendra beaucoup, qu'il signera beaucoup d'exemplaires dans les librairies. Je rappelle quand même à tous fins utiles que les queues devant les librairies ne valent absolument pas bulletin de vote. »
Retrouvez Soyez libres dans le Grand Matin Sud Radio au micro de Patrick Roger.