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Georges-Marc Benamou : "François Mitterrand fait partie des hommes qui m'ont impressionné dans la vie"

Le journaliste et producteur Georges-Marc Benamou était l’invité de Valérie Expert et Gilles Ganzmann sur Sud Radio le 10 mai dans "Le 10h - midi". Journaliste proche de la gauche, son livre publié en 2005 "Le Dernier Mitterrand" est tiré de ses conversations avec le président de la République à l'époque de l'écriture des "Mémoires interrompus", qu’il a co-écrit avec lui. Georges-Marc Benamou vient raconter "son" François Mitterrand.

Le journaliste et producteur Georges-Marc Benamou, invité de Valérie Expert dans "Le 10h - midi" sur Sud Radio.

Georges-Marc Benamou : "À la différence de certains trousseurs de la politique, Mitterrand s'est toujours bien comporté avec les femmes"

Il y a 40 ans, François Mitterrand accédait au pouvoir. "J'étais très jeune le 10 mai 1981, explique Georges-Marc Benamou. J'ai été proche de lui à la fin, j'ai connu le 'monarque Mitterrand' malade, je l'ai connu sur la pente descendante". Sur la réputation de séducteur de l'ancien président de la République, "les femmes et l'amour étaient l'un des sujets de nos conversations pendant nos déjeuners du samedi, beaucoup ! confirme le journaliste. Mais il en a toujours parlé comme un Casanova, qui était son inspirateur, avec beaucoup de respect et sans jamais la vulgarité machiste ou paillarde qu'on aurait pu imaginer chez d'autres hommes politiques, assure-t-il. Un rapport de séduction, mais en même temps une grande élégance ! Selon lui, il n'a pas laissé de mauvais souvenirs aux femmes, il n'y a pas de dégâts, de harcèlement. À la différence de certains trousseurs de la politique, il s'est toujours bien comporté avec elles !"

Georges-Marc Benamou revient sur son premier échange avec François Mitterrand : "c'était une mega interview, qui s'appelait 'Tonton et nous', que j'avais organisée au moment où la droite Chirac-Pasqua allait gagner les législatives de 1986. On a fait une immense interview de la jeunesse avec Mitterrand. Ça a été un entretien dans les salons de l'Élysée qui a duré toute une journée, et qui a eu énormément de retentissement, se souvient-il. Je l'ai revu véritablement et notre amitié s'est consacrée plutôt en 1992 quand j'ai fait un colloque sur l'Europe, au moment où commençait à courir la rumeur de son cancer, peu avant sa maladie. J'ai connu plutôt la partie des tempêtes et des maladies de la fin, qui était passionnante mais un peu sombre, un peu shakespearienne. Ça va finir dans le scandale, dans les affaires de financement politique, la révélation de Mazarine, de son passage à Vichy et le cancer, rappelle-t-il. C'est le monarque au crépuscule, une autre époque que le 10 mai glorieux, festif ".

 

"François Mitterrand a été l'un des grands présidents français, mais plutôt un très bon et le dernier de cette lignée !"

François Mitterrand a-t-il été un bon président ? "Il me dit le jour du dernier Conseil des ministres en mai 1995 cette phrase qui a beaucoup marqué : 'je suis le dernier grand président !' confie Georges-Marc Benamou. Pour lui, ça a été un grand président dans le sens où ça a été un règne long, l'un des plus longs dans l'histoire de France. Plus long que son rival de Gaulle, ce qui était pour lui l'orgueil suprême ! Pour moi qui n'ai jamais été gauchiste, je n'ai jamais cru à l'homme providentiel, ce qui est très important en France dans ce pays compliqué, c'est de faire tenir les Français ensemble, c'est la cohésion du pays, que les Français s'aiment, qu'il y ait des œuvres d'art, le moins de misère possible, que le pays tienne. Mitterrand était comme de Gaulle, un chef de la nation qui tenait à cette cohérence, affirme-t-il. Il y avait des problèmes, il y avait déjà des banlieues ; probablement a-t-il été un peu conservateur, un peu frileux, peut-être était-il trop vieux, lui même le disait lors de sa réélection.

"Pour moi, ça a été l'un des grands présidents français, avec des ombres et des lumières, mais plutôt un très bon et le dernier de cette lignée ! Ce qui est dû principalement au bricolage délirant qu'ont fait un couple d'amateurs qu'est Jacques Chirac et Lionel Jospin, qui ont inventé cette chose aberrante qui est le quinquennat et qui fait étouffer la démocratie ! On élit les députés en même temps que les présidents, ça ne respire pas, le système va craquer", redoute-t-il.

 

"Dans l'exercice du pouvoir, il était assez Roi Soleil mais dans le privé, il était plutôt assez frugal"

François Mitterrand était-il préoccupé par l'image qu'il allait laisser ? s'interroge Valérie Expert. "À la fin de sa vie, il y avait le contrôle absolu de l'image, reconnaît Georges-Marc Benamou, mais pas au sens communicant, sondages. Comme un grand écrivain, comme Napoléon, cette volonté de maîtriser son image par rapport à l'histoire. Son dernier livre est une manière de sculpter sa stature, de reparler de ses erreurs ou de ses errances à Vichy. Même s'il était machiavélique, il pouvait agir selon des convictions, il ne lisait pas les sondages pour décider".

Sur son image de monarque, "ce n'est pas Louis XIV ! tient à préciser Georges-Marc Benamou. C'est un des premiers rois français, c'est un mérovingien, un roi pauvre, un roi croyant, un roi terrien ! Il n'était pas fastueux, c'était un type qui vivait très simplement, assure-t-il. Chez lui, c'était une maison française bien tenue, de la bourgeoisie moyenne, et plutôt simple, insiste-t-il, même s'il avait par ailleurs le souci à l'Élysée de l'étiquette, d'une très bonne cuisine. Dans l'exercice du pouvoir, il était assez Roi Soleil mais dans le privé, il était plutôt assez frugal".

 

"François Mitterrand fait partie des hommes qui m'ont impressionné dans la vie"

La dernière fois qu'il a vu François Mitterrand, "c'était 7 jours avant sa mort, raconte Georges-Marc Benamou. Il a décidé depuis 3 heures d'arrêter de s'alimenter, il nous annonce qu'il a arrêté les médicaments, qu'il va mourir au fond... Commence sa mort choisie, qui va mettre quelques jours. C'est un regard terrible, on imagine qu'on ne le reverra probablement plus. Il y avait quelque chose d'un adieu définitif assez bouleversant, se souvient-il avec beaucoup d'émotion, je revois son dernier regard... C'est un homme que j'aimais beaucoup..."

"Je n'étais pas socialiste, j'étais plutôt un républicain de gauche, dans une tradition de Clémenceau, mais ce qui m'a attiré tout de suite, c'est cette dimension un peu 'hugolienne'. Quand j'avais 8 ans, je le prenais pour Victor Hugo ! Il fait partie des hommes qui m'ont impressionné dans la vie... L'Abbé Pierre, Daniel Cordier et François Mitterrand. Des hommes totaux, des hommes d'action, des intellectuels, des hommes de cœur".

 

 

 

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