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Manuel Bompard : "le Parti socialiste vend des illusions aux Français"

Par Adélaïde Motte

ENTRETIEN SUD RADIO - "Le Parti socialiste vend des illusions aux Français" selon Manuel Bompard, député des Bouches du Rhone et coordinateur de la France insoumise. Il était “L’invité politique” sur Sud Radio. 

socialiste
Manuel Bompard interviewé par Maxime Lledo sur Sud Radio, le 24 octobre 2025, dans “L’invité politique”.

La lettre rectificative du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, la primaire de la gauche pour l'élection présidentielle 2027... Au micro de Sud Radio, Manuel Bompard a répondu aux questions de Maxime Lledo.

La lettre rectificative du projet de loi de financement de la Sécurité sociale est "tout sauf une victoire"

Maxime Lledo : La lettre rectificative du projet de loi de financement de la Sécurité sociale a été entérinée hier. Bravo aux socialistes ? Ils ont réussi leur pari ?

Manuel Bompard : "Je ne crois pas. D’abord, cette lettre rectificative confirme un point : contrairement à ce qui a été dit, y compris par la Première ministre, il ne s’agit pas d’une suspension de la réforme des retraites, mais bien d’une proposition de décalage dans le temps. L’âge de départ reste fixé à 64 ans, mais c’est une génération plus tard qui atteindrait cet âge."

"Cette lettre démontre aussi que cette proposition se fait en contrepartie d’une sous-indexation, c’est-à-dire d’une absence de revalorisation des pensions de retraite sur la base de l’inflation. En clair, si une génération peut peut-être partir trois mois plus tôt, l’ensemble des retraités perdra du pouvoir d’achat, car leurs pensions baisseront. Et surtout, ce décalage d’un an ne peut exister que si le budget de la Sécurité sociale est adopté. Or, dans ce budget, il y a des mesures scandaleuses : le doublement des franchises médicales, la mise à contribution des personnes atteintes de maladies chroniques… C’est un budget invotable."

Pourquoi ne pas simplement s’en réjouir ? Vous-même, vous demandiez cette lettre rectificative il y a encore quelques jours.

"Oui, parce qu’elle permettait d’inscrire la modification de la réforme des retraites dans le budget de la Sécurité sociale. Mais je ne vais pas me réjouir du fait que quelques personnes partiront peut-être trois mois plus tôt, alors que leur pension va baisser pendant quatre ans. J’aimerais pouvoir dire que c’est une victoire, mais ce n’est pas la réalité."

"La génération concernée, c’est celle de 1964 — environ 600 000 à 800 000 personnes —, et même pour elles, ce n’est pas une victoire. D’autant plus que toutes les personnes partant avec le dispositif “carrières longues”, c’est-à-dire ayant commencé à travailler avant 21 ans, ne sont pas concernées. Cela représente environ 20 % de cette génération. Donc non, tout le monde n’y gagne pas, contrairement à ce qu’on entend."

Pour les socialistes, c’est vanté comme une victoire. Et pendant ce temps, on a l’impression que vous regardez passer les trains.

"Pas du tout. Toute la semaine, il y a eu le débat en commission des finances. Cet après-midi commence celui dans l’hémicycle. Notre rôle, c’est d’essayer d’empêcher l’adoption de mesures inacceptables. Dans ce budget, il est prévu par exemple un gel du barème de l’impôt sur le revenu — ce qui veut dire que 18 millions de personnes verront leurs impôts augmenter. Il y a aussi la baisse des pensions et la réduction des indemnités pour les malades de longue durée. Nous, on essaie de s’y opposer et de proposer des recettes supplémentaires."

Boris Vallaud dit que les Insoumis “n’ont rien ramené aux Français”.

"Qu’a-t-il ramené, lui ? On a un débat sur un décalage de la réforme des retraites, mais pour qu’il s’applique, il faut que le budget de la Sécurité sociale soit voté. Est-ce que le Parti socialiste a l’intention de voter ce budget ? Je ne veux pas vendre des illusions. Dire aux gens qu’ils vont bénéficier d’une suspension de la réforme, alors que ce n’est pas dans le texte, c’est leur mentir."

"Le patrimoine des 500 Français les plus riches a été multiplié par deux depuis 2017. C’est là qu’il faut aller chercher l’argent."

Les complémentaires santé vont augmenter. Est-il illogique que les retraités participent à l’effort collectif ?

"Évidemment, un effort est nécessaire, mais il y a des choix politiques à faire. Le gouvernement choisit de faire peser ce coût sur les retraités et sur ceux qui ont des mutuelles. Quand on taxe les mutuelles sans bloquer leurs tarifs, cela se traduit mécaniquement par une hausse de prix pour les assurés. Il y avait d’autres solutions."

Quand on voit que les retraites coûtent 413 milliards, soit 14 % du PIB, n’est-il pas normal que les retraités contribuent un peu ?

"Je vous invite à en parler avec un retraité qui touche 1 500 euros par mois. Si vous pensez qu’il vit dans l’opulence, libre à vous. Mais ce n’est pas le cas. En revanche, le patrimoine des 500 Français les plus riches a été multiplié par deux depuis 2017. C’est là qu’il faut aller chercher l’argent. Qu’il y ait des retraités aisés, je n’ai pas de problème à ce qu’ils contribuent davantage, mais la majorité ne roule pas sur l’or."

Donc une contribution ciblée sur les retraités les plus riches ?

"Oui, à travers un impôt sur le revenu plus progressif. Les plus riches — y compris les retraités — contribueraient davantage, tandis que ceux aux revenus modestes ne seraient pas pénalisés."

"Je ne participerai pas à une primaire avec Raphaël Glucksmann"

Votre contre budget prévoit 168 milliards de dépenses nouvelles et 183 milliards de recettes. Est-ce réaliste, alors que la note de la France risque d’être dégradée ?

"Il faut relativiser. La note actuelle équivaut à un 16/20. Ce n’est pas catastrophique. Le vrai problème, c’est la baisse des recettes, car Emmanuel Macron a fait des cadeaux fiscaux aux plus riches et aux multinationales. Résultat : un manque à gagner pour l’État."

"Nous proposons une autre voie : la relance écologique et sociale. En investissant dans les services publics et la transition, on fait redémarrer l’économie et on augmente les recettes fiscales, au lieu d’entretenir un cercle vicieux d’austérité."

Participerez vous à une primaire ?

"Non. Il faut être sérieux : on ne peut pas faire croire qu’on sera tous d’accord indépendamment des programmes. Je ne participerai pas à une primaire avec Raphaël Glucksmann, car je ne partage pas ses positions. Le principe d’une primaire, c’est de soutenir ensuite celui qui gagne. Moi, je ne ferai pas campagne pour un programme auquel je ne crois pas."

"Nous continuerons à défendre le programme commun de la NUPES et du Nouveau Front populaire. C’est celui que toute la gauche a porté en 2022 et en 2024. Quant au choix de notre candidat pour 2027, nous le ferons en temps voulu."

Retrouvez "L’invité politique" chaque jour à 8h15 dans le Grand Matin Sud Radio

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