On l’oublie trop souvent ce ministère. Mais l’agriculture est d’abord et avant tout un ministère à connotation économique. Tout simplement parce qu’on y traite des problèmes des agriculteurs qui sont encore 516.000. Soit autant de petites entreprises. Tous ensemble ils assurent l’entretien de 27 millions d’hectares. Cela représente la moitié de la superficie de la France. Et puis l’agriculture reste le pétrole vert du pays. C’est-à-dire qu’avec nos exportations agricoles nous avons une balance commerciale excédentaire de 12 milliards d’euros. Ce qui n’est pas neutre.
Pourtant personne ne se bat pour avoir ce ministère. C’est vrai que le ministère de l’agriculture a toujours été réputé difficile. Et le seul ministre qui en a gardé un bon souvenir, c’est Jacques Chirac. Ça ne date donc pas d’hier. Ça tient au fait que depuis que l’agriculture est un sujet européen, il y a des négociations tous les ans avec des gagnants et des perdants. Et ceux qui perdent, qui sont de plus en plus nombreux, n’hésitent pas à se faire entendre par tous les moyens. À cela s’ajoutent maintenant les problèmes environnementaux puisque le ministre de l’agriculture est là pour défendre une profession qui utilise encore des pesticides, qui fréquente des abattoirs et tout cela n’est pas très populaire.
Didier Guillaume a donc plusieurs chantiers qui l'attendent. Le principal c’est la mise en œuvre de la loi alimentation, qui vient d’être votée et qui doit, en principe, offrir de meilleurs revenus aux agriculteurs. Comment ? Et bien en faisant en sorte que les prix des produits alimentaires ne soient plus définis par les grandes chaines de distribution, mais à partir des coûts de production. Ce qui va obliger les interprofessions à s’organiser pour donner les bons prix de revient aux hypers ou aux supermarchés. Avec à la clé un bras de fer dont tout le monde ignore encore ce qu’il va donner.
Mais il y a encore beaucoup d'autres défis pour ce ministre kamikaze. Trouver une solution pour remplacer le fameux glyphosate, s’occuper du bien-être animal, encourager les filières bio, négocier la future politique agricole commune au sein d’une Europe délestée du Royaume-Uni. Que des chantiers simples et excitants ! Mais s’il ne fallait en retenir qu’un seul : je dirais que ce qui est le plus important, c’est d’encourager les circuits courts. Ça consiste à limiter le nombre d’intermédiaires et à permettre un lien plus étroit entre le producteur et le consommateur. C’est synonyme de prix plus bas et de qualité plus grande. C’est dire si ce doit être le dossier principal de Didier Guillaume.