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Prison : "Faire sa peine, c'est s'en emparer et en faire quelque chose"

Véronique Sousset, directrice du centre pénitentiaire pour femmes de Rennes, auteure de "Fragments de prison - Histoires vécues", aux éditions du Cherche-Midi, était l'invitée de “Bercoff dans tous ses états".

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Véronique Sousset, invitée d’André Bercoff dans "Bercoff dans tous ses états” sur Sud Radio.

Ce qui a attiré Véronique Sousset dans ce métier de directrice de prison : "c’est mon côté obscur", explique-t-elle. "C’est sans doute plus compliqué que ça. C’est toujours compliqué de dire ce qui a déterminé son choix. Il ne s’agissait pas d’un choix par défaut, puisque je n’ai passé que ce concours de la fonction publique à l'issue de mes études. On ne peut pas parler de vocation, je n’aime pas trop ce mot quand il s’agit d’enfermer. En revanche, on se dit qu’on pourra être utile à cette place là. J’ai eu envie, peut-être comme d'autres que ce milieu attire et fascine, de faire quelque chose d’utile", explique-t-elle.

"Lorsque j’ai commencé des études d’avocat, c’était un peu passer de l’autre côté de la force. Je crois que dans une vie professionnelle, c’est formidable d’avoir plusieurs parcours. Tous les pas de côté sont enrichissants pour le parcours. Il y a des opportunités. Je n'engageais que moi, à l’époque, et donc je n’ai pas hésité même si peut-être qu’en 2008 ce n’était pas très raisonnable de quitter la fonction publique pour le libéral", raconte Véronique Sousset, au micro de Sud Radio.

 

"Parler des maisons d’arrêt et de la surpopulation"

"Les personnes condamnées à une peine inférieure ou égale à deux ans exécutent leur peine en maison d’arrêt. Les maisons d’arrêt sont plus connues parce qu’il y a urgence, que c’est le surencombrement, c’est la surpopulation et la promiscuité", explique la directrice d’établissement pénitentiaire. "Les personnes qui sont condamnées à de plus longues peines, les exécutent en établissements pour peine, dans un centre de détention. Les conditions de détention ne sont pas les mêmes. En établissements pour peines, qui représentent près de la moitié des établissements en France, il y a une cellule pour un détenu. C’est le cas à Rennes", explique-t-elle.

"On n’a pas forcément cette idée en tête. On parle, par exemple, de Fleury-Mérogis en région parisienne. Mais à Melun, on est dans un établissement pour peine. On en parle moins parce que l’urgence est aussi à parler des maisons d’arrêt et la question de la surpopulation. Ce n’est pas la même façon d’exécuter sa peine", raconte Véronique Sousset dans son livre. "C’est à chacun, en fonction des conditions de détention et en fonction de son parcours, de donner du sens à sa peine. Évidemment, être incarcéré six mois ou pour de longues années, et bien on n’envisage pas les choses de la même façon", juge-t-elle. "La question du temps a aussi beaucoup à voir avec la prison. Je parle dans le livre de la question des sens. Le goût, l’odorat, le toucher, mais la question du temps est également une question qui échappe peut-être à l’appréciation commune".

 

"En prison, on change"

"Je ne suis ni enfermée, ni incarcérée, donc ce que je dis, c’est évidemment le regard extérieur avec la légitimité peut-être de l’expérience. En tout cas, en prison, on change. On peut évoluer, si tant est qu’on est en capacité dans son parcours, là où on en est, de pouvoir saisir les opportunités qui sont données. La prison n’est pas un lieu de relégation, on peut mettre un temps de côté pour exécuter une peine. Il y a aussi quelque chose de l’expiation. On ne va pas se le cacher. Mais ça ne peut pas être uniquement ça, sinon on rate nos objectifs", explique Véronique Sousset.

"L’enfermement produit des choses. Dans un des chapitres, j'explique que quelqu’un qui est enfermé à l’isolement depuis longtemps, n’a plus l’habitude du face-à-face comme nous le faisons", explique Véronique Sousset. "Il y a comme une mise au point pour pouvoir retrouver un échange. Pour trouver un sens à sa peine, il faut tout d’abord l’accepter, c’est la première étape. Faire sa peine ce n’est pas aligner des petits bâtons sur les murs, c’est s’en emparer et en faire quelque chose", juge-t-elle.

 

Cliquez ici pour écouter l’invité d’André Bercoff dans son intégralité en podcast.

Retrouvez “Le face à face” d’André Bercoff chaque jour à 12h dans Bercoff dans tous ses états Sud Radio

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