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Christophe Urios : "Si tu n'as pas de leaders, tu ne gagnes rien"

Par Clément Combes

Christophe Urios était l'invité d'Au Coeur de la Mêlée Le Mag hier soir. La victoire bonifiée contre le Stade Français qui permet de respirer en championnat, la demi-finale de Challenge Cup à venir, la construction de son effectif actuel : le manager clermontois a tout abordé, toujours avec la franchise qui le caractérise.

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Christophe Urios avant le match contre Pau, le 23 mars 2024. (Sylvain Thomas / AFP).

Vous aviez donné rendez-vous à vos joueurs pour ce match face au leader parisien. Êtes-vous satisfait de leur prestation, sur la forme comme sur le fond ?

C.U : D'abord je n'avais pas donné rendez-vous, ON s'était donné rendez-vous tous ensemble. C'était important pour moi de savoir ce que nous valions. Pour les joueurs, le staff, il fallait relever ce défi parce qu'on était dos au mur. Sur le match, oui je suis satisfait. Pas forcément en terme de rugby produit, mais sur l'énergie déployée et l'envie d'être ensemble, c'est probablement notre meilleur match de la saison.

Vous faites deux prestations très différentes d'une semaine à l'autre, contre Bordeaux-Bègles et le Stade Français. Comment expliquez-vous cette inconstance ?

C.U : La régularité est un des gros problèmes de notre saison. Dans la jungle qu'est le Top 14, les six premières équipes à la fin seront les plus solides en termes de physique, de cohésion et de rugby. Au regard de notre saison, on souffre de notre irrégularité, d'un match à l'autre mais aussi d'une mi-temps à l'autre. Après ça se joue à tellement peu de choses. Je ne veux pas refaire le film de la saison, mais on a eu trois ou quatre situations où si elles avaient été mieux gérées, on pourrait facilement avoir 10 points de plus au classement. C'est vrai pour tout le monde, pour nous c'est criant. On n'est pas suffisamment costaud, dur et ensemble pour avoir cette régularité.

Vous estimez que l'ASM n'est pas encore maintenu ?

C.U : Je ne parlerai pas de maintien, ni de top six. Aujourd'hui nous n'en sommes pas là. Évidemment que la parenthèse Challenge Cup va nous faire du bien, même si ce sera une opposition très relevée. Notre déplacement à Perpignan viendra ensuite. Certes, l'USAP a une dynamique incroyable qui fait bouger les foules et ça c'est génial pour notre rugby, ça ne changera pas le fait qu'on ira chez eux pour prendre le maximum de points. On fera les comptes à la fin.

 

 

Est-ce que les résultats globaux de ce weekend vous permettent de vous projeter différemment sur la demi-finale de Challenge Cup contre les Sharks de Durban ?

C.U : Évidemment que nous avons bien accueilli les résultats de certains clubs. Ce qui est important c'est nous et ce que nous sommes capables de faire. On n'a pas eu de blessés samedi. Donc maintenant on peut s'orienter sur la demi-finale de Challenge Cup l'esprit libre, sans penser au prochain match de championnat. On est à deux matches d'un trophée, ça nous motive énormément de jouer cette belle équipe des Sharks.

La rencontre se joue samedi à 12h30 heure locale (13h30 en France). Cet horaire inhabituel nécessite-t-il une préparation particulière ?

C.U : On a eu la chance de jouer le huitième et le quart à 13h30. On y est habitué, même si ces deux matches s'étaient disputés au Michelin. On fait le choix de décaler les entraînements rugby en fin de matinée pour essayer de se rapprocher le plus possible de l'horaire du match. Ce n'est pas simple mais il n'y aura pas de problèmes concernant la préparation de cette demie.

Sur votre management, avez-vous assoupli vos méthodes avec la nouvelle génération de joueurs ou utilisez-vous toujours les mêmes leviers que lorsque vous avez débuté ?

C.U : Elle m'amuse cette question, je vais y répondre très simplement. J'ai commencé à entraîner dans les années 2000, et à jouer encore plus tôt, en 1985. Pour moi, les groupes n'évoluent pas. À mon époque de joueur, il y avait le super mec, le gendre idéal, l'enfoiré, le fainéant. On a les mêmes choses aujourd'hui : le mec fiable, l'enfoiré, le courageux, celui qui ne l'est pas, le leader. Ce qui change réellement de nos jours, c'est la médiatisation, l'argent, les agents. Quand on me parle de la nouvelle génération ... il y a des joueurs plus âgés avec qui je peux avoir des problèmes et de superbes relations avec de très jeunes joueurs. Par exemple, Baptiste Jauneau c'est un super gamin, travailleur, leader, qui prend ses responsabilités. J'ai une relation fantastique avec lui. J'ai d'autres gars plus anciens avec qui ça matche un peu moins. Simplement parce qu'un joueur de rugby c'est toujours aussi simple qu'avant.

Dans tous vos groupes, à Oyonnax ou à Castres, vous avez eu un socle de leaders. Est-ce qu'il ne vous manquerait pas 3-4 leaders expérimentés dans votre effectif aujourd'hui pour être plus régulier ?

C.U : Ça fait partie des choses qu'on est en train de mettre en place. Depuis 2-3 ans, Clermont est une grosse équipe, avec un rugby hyper léché et des leaders forts. Je pense à Iturria, Cancoriet. Il reste des garçons comme Fritz Lee, George Moala, mais ce groupe est un peu orphelin des leaders partis. On travaille actuellement sur cette base de leaders qui peut nous permettre à l'avenir de repasser devant. J'ai parlé de Baptiste tout à l'heure. Il a 20 ans, ce n'est pas encore complètement un leader, mais on compte sur lui pour s'affirmer. Si une équipe du Top 14 veut avoir des ambitions, elle doit avoir des leaders solides. Si tu n'as pas de leaders, tu ne gagnes rien.

 

 

On se souvient aussi des Florian Denos, Pierre Aguillon. Des joueurs qui avaient besoin de se relancer, et qui vous ressemble en quelque sorte ...

C.U : J'ai toujours fonctionné comme ça dans mon recrutement. Je viens d'arriver à Clermont donc je n'ai pas encore fait tout ce que j'avais envie de faire ici. Mais j'aime bien la règle des trois tiers : un tiers de joueurs confirmés, solides à leur poste, internationaux si possible, JIFF c'est le graal ; un tiers qui représente le coeur de joueurs ; puis un dernier tiers séparé en deux, avec soit des jeunes, soit des mecs du "ruisseau". Des mecs sortis du contexte, blessés, sur lesquels on ne compte pas. Ces profils-là, j'en ai besoin. Quand tu arrives à t'appuyer sur eux, tu peux aller à la guerre au bout du monde. Les Caminati, Lassalle, Denos, j'en ai eu partout, je peux vous en citer pleins. C'est pour ça que j'ai fait venir Benjamin Urdapilleta à Clermont. Je ne l'avais pas fait venir à Bordeaux pour ne pas faire d'ombre à Matthieu Jalibert, et je l'ai regretté.

L'ASM a une identité propre à elle. Certains ont pu douter de votre capacité d'intégration à Clermont. Comment est-ce que vous vivez cette expérience ?

C.U : Quand je suis parti de Castres, plusieurs clubs me faisaient rêver. L'ASM était de ceux-là. Chaque fois que je jouais contre Clermont je trouvais que c'était la classe. On était bien accueilli, le stade est chouette, y'a une bonne ambiance, ils sont supporters mais pas casse-bonbons. À mon arrivée ici, j'étais content parce que ce club m'a toujours fait rêver. Aujourd'hui on souffre parce qu'on ne fait pas une bonne saison, on n'y arrive pas. Mais je trouve qu'on est en train de bâtir quelque chose d'incontournable dans l'évolution de l'ASM. L'ASM est en reconstruction aujourd'hui, il ne faut pas avoir peur des mots. Je crois que tout le travail fourni qui ne se voit pas encore sera une bonne base pour nous permettre de partir au combat et retrouver les valeurs qui sont les nôtres. Sportivement, on n'est pas encore à la hauteur de la passion fantastique de ce territoire pour le rugby. Ce qu'on traverse en ce moment est un passage obligé. Ce n'est pas facile tous les jours, je ne pensais pas qu'on souffrirait autant. J'ai les mains dans le cambouis mais pas les genoux à terre. Je regarde devant et j'avance.

 

 

Retrouver l'entretien avec Christophe Urios en intégralité :

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