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"Ce soir-là, Cédric Jubillar avait la motivation, un mobile et l’opportunité de passer à l'acte"

DOCUMENT SUD RADIO - Au 3e jour du procès de Cédric Jubillar, accusé du meurtre de son épouse Delphine, l'attention des assises du Tarn et la défense se portent en particulier sur la qualité des investigations menées par la cellule « Disparue 81 ». Pour le directeur d'enquête, la culpabilité de Cédric Jubillar ne fait aucun doute. Notre reporter, Christine Bouillot, vous fait vivre ce procès de l'intérieur.

Procès jubillar cédric delphine

Ce mercredi, le procès de Cédric Jubillar, accusé du meurtre de son épouse Delphine disparue en décembre 2020, est entré dans une phase cruciale devant les assises du Tarn. La journée est marquée par l’audition de témoins ayant contacté les gendarmes peu après la disparition.

Quid de la silhouette en doudoune beige ?

Parmi eux, un chauffeur de taxi évoque avoir aperçu une silhouette en doudoune beige marchant en direction de Gaillac, sans pouvoir confirmer s’il s’agissait d’une femme en raison de la brume et de la vitesse à laquelle il roulait. Un autre témoin, automobiliste se rendant au travail, rapporte avoir vu une voiture stationnée sur un chemin, plafonnier allumé : une observation confirmée par une collègue.

La défense conteste la qualité des investigations, tandis que la cour poursuit l’examen des éléments de l’enquête. Deux gendarmes et les officiers en charge du dossier doivent encore être entendus dans les prochains jours.

Plus aucune image de Cédric Jubillar en salle d’audience

Mais avant d'entrer dans le vif du sujet, il a été décidé par la Présidente de la cour d'assises qu'il n'y aurait plus aucune image de Cédric Jubillar en salle d’audience suite à la diffusion hier soir par l'émission Quotidien d'une conversation entre l'accusé et son avocate. Ce qui est strictement interdit par la loi. De quoi rendre furieux les avocats de Cédric Jubillar.

Dans Quotidien, la séquence « volée » montre Emmanuelle Franck, l'avocate de Cédric Jubillar, lui demander de baisser la tête au moment de pénétrer dans le tribunal afin d'éviter les objectifs des caméras et des appareils photos. Gêné, le mari de Delphine Jubillar lui répond alors : « Le problème, c’est que j’ai souri sur une ou deux photos. » Et son avocate de lui glisser : « Non, non… Et en même temps, si tu veux, il ne faut pas se cacher non plus. T’es innocent, t’es innocent. Voilà, c’est pour ça. »

Pour la peine, l'équipe de Quotidien s'est vue retirer son accréditation et ne pourra donc plus assister à la suite du procès.

La cellule "Disparue 81" et ses 50 enquêteurs

Suite donc des auditions des membres de la cellule « Disparue 81 » : cette unité d’enquête spécialisée mise en place par la gendarmerie dans le cadre de la disparition de Delphine Jubillar. L'un des gendarmes raconte quels moyens ont été mis en place pour les recherches : fouilles avec des chiens spécialises dans la recherches de restes humains, dans les bois, dans 40 puits ; des sonars pour sonder le Tarn et autres cours d'eau, les 40 km de voies de trains proches de Cagnac, le cimetière, la déchetterie, les pistes cyclables, le terrain de moto-cross,... Rien malgré les 50 enquêteurs mobilisés.

Et toujours 5 hypothèses sur la table :

  • Un départ volontaire
  • L'intervention d’un tiers
  • Un rôdeur
  • L'amant
  • Le mari

Le gendarme insiste en revanche sur une difficulté majeure : la zone possède trop de trous et puits miniers de l'époque du charbon pour bien investiguer, Cagnac étant une citée minière. Un vrai gruyère, en somme. Le gendarme explique également qu’ils ont aussi vérifié les pistes apparues après les confidences de Jubillar faite à sa nouvelle compagne de l époque, Séverine, selon laquelle il lui aurait dit que Cédric lui avait confié avoir tué sa femme et caché le corps dans une ferme. La Cour entendra d'ailleurs cette femme la semaine prochaine. Au total, les recherches ont porté jusqu’à 15km autour de Cagnac.

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Un portrait de Delphine Jubillar sur une affiche, le 7 décembre 2022 à Cagnac-les-Mines, dans le Tarn (Charly TRIBALLEAU - AFP/Archives)

Des jardins fouillés "de manière visuelle"

Maître Franck demande alors au gendarme quels sont les éléments objectifs qui ont conduit les enquêteurs à réorienter au bout de 6 mois leurs investigations d'enlèvement et séquestration au meurtre. Le témoin répond qu’il n’est pas à l'origine de cette décision.

Malgré les moyens matériels considérables déployés, la défense pointe du doigt la somme exorbitante pour mener à bien ces recherches : 500.000€ « et pourtant, vous n’avez rien trouvé ? » « Rien », répond le gendarme. Et « pourtant aucune trace de vie d’elle depuis 5 ans ».

Les fouilles des différents jardins environnants sont également pointés du doigt : « pas comme les autres endroits mais uniquement de manière visuelle ». Selon lui, il était impossible de tout fouiller : « on peut glisser un corps dans une crevasse sans être vu ».

Et l'avocat d'insister : « Quels sont les éléments objectifs qui vous disent que Delphine est décédée dans la nuit du 15/16 décembre ? »

- C’est de la responsabilité du juge

- Donc pas de démonstration qu’elle est morte cette nuit là !

Fermez le ban.

Cédric Jubillar : "Je me sens discriminé"

La Présidente interpelle Cédric Jubillar : « Votre fils est en colère, vos enfants attendent des réponses comme vous l’a dit (hier) l’administratrice. Que pouvez vous dire ?

- Je ne comprends pas la position qu’elle a. Elle me regarde droit dans les yeux et me dit que mon fils veut savoir si j'ai tué Delphine ! Je peux pas lui répondre. Je me sens discriminé. »

Cédric Jubillar n’est pas très bavard, ses réponses sont courtes et sans émotions. Il explique aussi qu’il n’écrit pas à ses enfants car ses courriers mettent 4 mois pour arriver : « la dernière lettre écrite le 26 juillet n’est toujours pas arrivée ». L’avocate des enfants Louis et Elyah lui fait remarquer qu’il ne fait pas non plus beaucoup de démarches pour garder le lien. Cédric Jubillar répond qu’il ne veut pas que ses enfants le voit en prison.

"Ce soir-là, il avait la motivation, un mobile et l’opportunité de passer à l'acte !"

Durant une bonne heure, le directeur d'enquête va expliquer pourquoi toutes les hypothèses convergent vers Jubillar . :
- Le témoignage de Louis (alors âgé de 6 ans) qui voit ses parents se disputer (entendu 3 fois).
- Les lunettes cassées dont une branche est retrouvée derrière le canapé ou aurait dormi Delphine.
- ⁠Les cris d’une femme entendus dans la nuit par les voisines les plus proches.
- ⁠Les analyses du pyjama de Jubillar où sont retrouvées sur la manche et l'épaule des micro-traces de sang et de salive, ce qui s'explique soit par un geste de câlin, soit un portage de coups.
- ⁠Les 188 appels de Jubillar sur le téléphone de sa femme la nuit de la disparition (entre 3h43 et 10h) - ⁠Son téléphone coupé
- ⁠Les faux mots de passe qu’il donne pour rendre impossible l'étude de son téléphone
- ⁠Le fait qu'il se soit très vite remis en couple .

Et de conclure sa démonstration par ces mots : "Ce soir-là, il avait la motivation un mobile et l’opportunité de passer à l'acte !"

"Une enquête uniquement à charge ?" demande l’avocat général ? "Quand j’arrive sur l’enquête le 17 décembre , l’hypothèse du mari me paraît invraisemblable" précise-t-il.

Quid de tous les délinquants sexuels fichés ?

La fin de cette 3e journée a été consacrée aux questions des avocats de Cédric Jubillar au directeur de l’enquête : un moment difficile pour le major sous le feu nourri des questions, notamment celles de l'avocate Emmanuelle Franck qui souligne des manques ou imprécisons dans l’enquête avec des éléments importants. Comme l’heure de sortie de la voisine qui a entendu des cris mais qui visiblement, ne collent pas avec l’heure de coucher de Louis puisque à l'heure indiquée, l'enfant était encore avec sa mère.

Puisque rien ne prouve que Delphine Jubillar n'est pas sortie seule dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020 et qu'elle aurait pu être victime d'un prédateur sexuel, l'avocate soulève une une autre question : Seulement 65 personnes sur les 288 inscrites au fichier des délinquants sexuels dans un rayon de 50 km ont été interrogés sur le mode déclaratif sans pousser plus les investigations. Aucun PV ne figure dans le dossier. "Pourquoi" demande l’avocate ? Le gendarme n’a pas d’éléments de réponses.

Le mobile mis à mal

Autre question soulevée par la défense : pourquoi l’accusé dont on dit qu’il refusait le divorce (le mobile) avait fait des démarches quelques jours auparavant pour acheter des meubles, qu’il cherchait un logement et que Delphine avait acté un divorce à l’amiable ?

A l'issue de cette 3e journée, les avocats de la défense sont parvenus à démontrer que toutes les pistes n‘ont pas été fermée. Et que la lecture des faits supposés n'est peut-être pas aussi claire comme cela apparaît dans l’ordonnance de renvoi.

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