Delphine Jubillar "n'existait plus avec Cédric", a témoigné sa meilleure amie mercredi, devant la cour d'assises du Tarn, ouvrant une fenêtre inédite sur l'intimité de l'infirmière disparue et de son mari accusé de l'avoir tuée mais qui s'en défend.
L'amie de Delphine, dont le corps n'a pas été retrouvé en près de cinq ans, est aussi revenue sur certains indices jugés déterminants par l'accusation, comme le sens de stationnement de la voiture devant le domicile du couple le 15 décembre 2020, quelques heures avant la disparition.
Cette mère au foyer, âgée de 48 ans, a raconté à la barre avoir rencontré Delphine Jubillar en 2016 et que la scolarité de leurs enfants à la même école de Cagnac-les-Mines (Tarn) les avait rapprochées. La présence "très soutenante" de Delphine lors de sa propre séparation a achevé d'en faire une amie très proche, a-t-elle confié.
Sous les yeux de l'accusé dans son box, vêtu d'un gilet noir à rayures gris sombre, cette intime des Jubillar a raconté avoir "connu un couple relativement complice quand ils ont eu Louis et Elyah, avec quelques gestes affectueux", puis avoir noté leur éloignement progressif, avec un "point de non retour" lorsque Cédric ne signe finalement pas un CDI à l'été 2020.
"Je pouvais passer tout un après-midi avec Delphine, avoir devant moi une personne joviale, souriante, qui parle librement, très à l'aise avec moi, puis l'arrivée de Cédric pouvait provoquer ce off/on chez elle où, même quand je lui parle, je n'ai même pas un acquiescement", a raconté Anne.
"Il la rabaissait verbalement (...) elle n'avait pas de place pour s'exprimer, elle n'existait plus avec Cédric", a-t-elle expliqué. "Quand je passais une soirée avec eux, je n'arrivais quasiment pas à parler avec Delphine. Il occupait toute la place."
- "Formelle" -
Elle est également revenue longuement sur le sens de stationnement de la voiture de Delphine, la veille de la disparition, notamment au cours d'un échange tendu avec la défense.
"Je suis formelle, la voiture était garée dans le sens de la montée devant chez elle. J'ai failli écraser son chien. Je sais parfaitement dans quel sens elle était garée", a-t-elle affirmé à la barre.
Cette déclaration conforte la thèse de l'accusation, pour laquelle cette voiture, retrouvée garée dans le sens opposé au lendemain de la disparition, a pu être utilisée par Cédric Jubillar dans la nuit pour transporter le corps de son épouse.
Elle a aussi affirmé que les lunettes de Delphine, retrouvées cassées après la disparition - un autre indice important pour l'accusation - étaient déjà abîmées, mais en meilleur état que celui dans lequel la paire a été découverte en plusieurs morceaux.
L'audition d'Anne a aussi permis d'évoquer la personnalité du peintre-plaquiste, 38 ans aujourd'hui, décrit mardi comme violent envers son fils Louis par les frères, soeur et cousines de la disparue.
Lors d'une sortie au lac avec quelques parents de l'école, les enfants s'étaient éclipsés sans prévenir pour faire un tour du plan d'eau, a raconté Anne à la cour. Au retour de Louis, "Cédric enlève sa tong, tient Louis par le bras et donne de sacrés coups sur les fesses. Le corps de Louis oscille sous les coups de la tong", s'est-elle rappelée.
Elle a aussi relayé des réactions marquantes attribuées à l'accusé : il aurait par exemple répondu "alors je vais me pendre" à Delphine qui lui annonçait fin octobre son intention de divorcer ; ou encore assuré à Anne que "si elle a un amant, je lui ferai à l'envers".
"N'entre pas en guerre", avait alors recommandé par message à Delphine son amie Anne, inquiète des propos de Cédric et encore marquée par sa propre séparation conflictuelle.

Laurent Boguet, avocat des enfants du couple Jubillar, à la cour d'assises du Tarn, à Albi, le 22 septembre 2025
Lionel BONAVENTURE - AFP/Archives
Delphine, née Aussaguel, disparue dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020, travaillait en tant qu'infirmière de nuit à la clinique Claude-Bernard d'Albi. Plusieurs de ses collègues doivent prendre la parole mercredi après-midi au palais de justice d'Albi.
Le verdict est attendu le 17 octobre.
Par Valentin GRAFF, Daniel MARTINEZ / Albi (AFP) / © 2025 AFP