Où en est aujourd’hui la crise agricole et sanitaire ?
« Face à la mort qui est programmée et qu’on nous programme, on n’a pas envie de mourir en silence. Pour nous, notre métier est noble. On a fait ce métier-là pour être libres et pour ne pas être contraints. Aujourd’hui, il y a une vraie colère qui est en train de monter. Elle est silencieuse, mais elle se manifeste aussi sur des mouvements et sur des manifestations.
Face à la mort, vous avez deux choix : soit vous la subissez, soit vous êtes en réaction. Et aujourd’hui, il y a une réaction. Il y a une colère qui se lève, qui gagne toute la société rurale qui est derrière nous. Les agriculteurs n’ont pas envie de disparaître en silence.
"C’est une catastrophe pour les éleveurs"
C’est une catastrophe pour les éleveurs. Ça va être une catastrophe pour la filière viande. C’est une catastrophe pour la balance commerciale de la France. Et ça donne une très, très mauvaise image à l’international et au niveau européen de ce qui est fait aujourd’hui en matière de politique sanitaire sur la DNC en France.
Les jeunes sont très inquiets. Des jeunes qui sont dans les établissements de formation, qui sont en train de nous rejoindre sur les mouvements ou dans les lycées agricoles parce qu’ils sont inquiets pour leur avenir. Ils croient en l’agriculture, ils croient en élever des vaches, ils croient en faire pousser du blé. Et aujourd’hui, le message que leur envoie le gouvernement français, c’est de dire : vous n’avez plus d’avenir. L’inquiétude est grande. Elle est en train de gagner toute la société rurale. Et c’est pour ça que je dis que la colère pourrait prendre une ampleur qu’on n’a jamais connue. »
Bertrand Vanteau (président @coordinationrur) :"On ne veut pas mourir en silence, donc la colère agricole monte" #LaFranceDansTousSesEtats
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"On abat des animaux qui sont sains"
Pourquoi êtes-vous contre l’euthanasie systématique des troupeaux touchés ?
« Ce qu’on utilise aujourd’hui est, à mon avis, beaucoup trop brutal. On abat des animaux qui sont sains. On est dans un massacre organisé. Lorsque l’élevage est abattu, bien entendu, la vache contaminée, l’animal contaminé, va à l’équarrissage, à la destruction. Mais on peut supposer que les bêtes abattues qui sont saines, leur viande est comestible. Or, tout est envoyé à la destruction.
On tue des animaux pour rien. Et vous avez des situations complètement aberrantes. Vous avez parfois un lot contaminé avec vingt animaux, et parce qu’ils rentrent tous dans le même bâtiment, vous vous retrouvez avec deux cents bovins qui sont abattus. C’est ce qui s’est passé dans le Doubs, c’est ce qui s’est passé aussi dans l’Ariège.
"C’est une interprétation franco-française"
Le principe de précaution a tellement diffusé dans les strates de décision qu’on est complètement perdus. Regardez ce qui se passe en Italie ou en Espagne : l’approche n’est pas du tout la même. On nous dit que c’est l’Europe. Non, ce n’est pas l’Europe. C’est une interprétation franco-française basée sur le principe de précaution.
Et regardez l’exemple de la tuberculose. On en fait tuer depuis quarante ans. Il y a un carnage sans nom qui est en train de s’opérer. Et la maladie est toujours là. Ça n’a jamais réglé le problème. »
Bertrand Vanteau (président @coordinationrur) :"Le ministère de l’Agriculture est contaminé et il n’arrive pas à se remettre en question" #LaFranceDansTousSesEtats
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"La ministre est très mal conseillée"
Vous plaidez pour la vaccination. Pourquoi est-ce la meilleure solution selon vous ?
« La ministre est très, très mal conseillée. Ça se sent qu’elle est mal conseillée par des gens qui ne vont pas à l’apprentissage, par des gens qui n’ont jamais connu le terrain. Elle a des conseillers qui n’ont jamais été praticiens comme nos vétérinaires ruraux. Ceux-là, ils nous connaissent. Ce sont nos vrais partenaires.
Il faut vacciner le plus tôt possible les zones qui ne sont pas touchées. Et là où la maladie est présente, il faut isoler l’élevage, le confiner, abattre l’animal contaminé et suivre l’évolution de la maladie avant de passer à l’euthanasie générale. On peut faire les choses en deux temps.
"Il faut sauver un maximum d’animaux"
Aujourd’hui, le principe de précaution ne peut pas être la seule boussole. Il faut sauver un maximum d’animaux, un maximum d’éleveurs, parce qu’on va en avoir besoin. Ce qui est utilisé aujourd’hui est beaucoup trop brutal et met en péril les familles d’agriculteurs.
L’approche sanitaire actuelle est totalement différente de ce qu’il faudrait faire. Il faut vraiment qu’elle se réveille pour épargner un maximum d’animaux et avoir une approche sanitaire différente. »
"Il faut déclasser la maladie"
Le gouvernement évoque le risque commercial pour refuser la vaccination. Que répondez-vous ?
« C’est un faux argument. Il faut déclasser la maladie. Une fois qu’elle est déclassée, il n’y a plus de programme bloquant. Ensuite, il faut faire des accords bilatéraux avec nos partenaires commerciaux historiques. Ce n’est pas très compliqué. C’est son travail de ministre. Si ça ne lui vient même pas à l’oreille d’avoir pensé à ça, c’est qu’il y a un problème. Aujourd’hui, on sacrifie nos élevages par rigidité administrative.
On nous explique qu’on va devenir une zone non indemne et qu’on ne pourra plus commercer. Mais regardez ce qui s’est passé avec la grippe aviaire : au début, on disait qu’on ne pouvait pas vacciner à cause des exportations. Et quand les gros élevages ont été touchés, on a vacciné tout le territoire. La gestion de cette maladie est incohérente, brutale et dangereuse pour l’avenir de l’élevage français. »
Ministre de l'Agriculture, @AnnieGenevard sera demain l'invitée politique de Sud Radio. Au micro de #LaFranceDansTousSesEtats, Bertrand Vanteau (président @coordinationrur) avait une question a lui poser
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"Quand est-ce qu’Annie Genevard va apporter une réponse qui corresponde… pic.twitter.com/UPLfE5TOBc
"La ministre ne nous écoute pas"
Vous accusez l’État et la FNSEA d’être responsables de l’impasse actuelle. Jusqu’où peut aller la colère paysanne ?
« La FNSEA a cogéré l’agriculture française pendant des décennies. Aujourd’hui, il y a une déconnexion entre la base et le haut du réseau. Beaucoup d’adhérents partagent notre position mais ne le disent pas publiquement.
La ministre ne nous écoute pas. Je l’ai rencontrée la semaine dernière. Je n’ai pas eu un accueil magistral. Et dès que la rencontre a été finie, on nous a dit : “Bon, il est temps que vous sortiez.” Ce n’est pas correct avec le premier syndicat de France.
"J’en appelle au Premier ministre pour venir trancher ce dossier"
On vit dans la trouille. Moi, je suis éleveur aussi. On vit dans la peur que cette maladie arrive, et on en arrive à mentir quand on a la maladie pour ne pas se faire abattre nos animaux. Vous vous rendez compte ?
J’en appelle au Premier ministre pour venir trancher ce dossier. Sinon, ça va mal finir, et je n’en ai vraiment pas envie. L’agriculture française ne veut pas mourir. On veut continuer à produire, à vivre de notre métier et à être libres. Mais sans réponse politique rapide, la colère va continuer de monter et elle pourrait prendre une ampleur qu’on n’a jamais connue. »