Des étages vides, des salles d'exposition plongées dans le noir et son célèbre escalator fermé. Lundi à Paris, jour de fermeture du Centre Pompidou pour cinq ans, les visiteurs étaient tristes et les commerçants inquiets.
"C'était hyper symbolique et fort de venir aujourd'hui pour cette dernière", explique Solène Saint-Gilles, responsable de programmes culturels chez France Télévisions, rencontrée dans le hall ouvert encore pour quelques heures du bâtiment à l'architecture tubulaire multicolore.
"Ca nous attriste, c'est long cinq ans. On voulait faire le fameux escalator, mais il a fermé il y a un mois", poursuit son amie Fouzia Kechkech, productrice.
Dans les étages, déjà fermés au public, les grandes salles d'exposition sont vides, certaines plongées dans le noir, et les tableaux ont été déménagés par transpalettes. Quelques escabeaux et aspirateurs de chantier parsèment désormais le plus important musée d'art moderne au monde, avec le MoMA à New York.
Avant la fermeture définitive à 23H00, le public pouvait accéder gratuitement à une dernière exposition.
"Nous sommes deux architectes, c'était une priorité pour nous de le voir avant sa fermeture", explique Tim Bowder-Ridger, vacancier venu de Londres.
"Avant l'été, on est revenues avec mes filles. On a refait toutes les collections permanentes plusieurs fois histoire d'emmagasiner un maximum et de s'en imprégner", se rappelle Claudie Rocard-Laperrousaz, artiste photographe de 65 ans et habitante du quartier.

Le Centre Pompidou à Paris le 22 septembre 2025
JULIEN DE ROSA - AFP
Hugo Nasri, 22 ans, étudiant en architecture, avait l'habitude de venir toutes les semaines à la bibliothèque du Centre Pompidou. "C'est un bâtiment qui faisait partie de ma vie", regrette-t-il.
"Je viens à Pompidou au moins 10 fois par an, dès que je passe devant, même si ce n'est pas pour voir une expo, juste pour monter et regarder le paysage", raconte Melis Selin Kocyigit, doctorante en architecture originaire de Turquie.
"Je pense qu'il va y avoir toute une génération qui va le rater, cette expérience de venir faire les visites, etc", ajoute-t-elle.
- "L'ensemble du quartier va changer" -
Autour du centre, qui a accueilli cinq millions de visiteurs en 2024, les commerçants craignent pour leurs revenus.
"On est très inquiets. C'est l'ensemble du quartier qui va changer", affirme Alexandre Mahfouz, gérant d'une galerie située juste en face de l'entrée du Centre Pompidou et président d'un collectif de commerçants du quartier.
Les touristes "se promènent dans le quartier quand ils sortent du Centre Pompidou, ils viennent dans nos boutiques ou dans les restaurants, ils consomment, et tous ces gens-là, malheureusement, ils ne viendront plus dans le quartier, parce qu'ils venaient pour le Centre Pompidou", selon lui.
Alexandre Mahfouz assure déjà ressentir une importante chute d'activité qu'il estime à "30 ou 40%" depuis la fermeture des collections permanentes en mars dernier.
"Ceux qui nous achètent le plus, c'est les touristes. Ca représente 80% de notre activité", avance le gérant de galerie.
Inauguré en 1977 et conçu comme un lieu "ouvert à tous" par les architectes Renzo Piano et Richard Rogers (disparu en 2021), le Centre Pompidou s'était donné pour vocation d'accueillir toutes les formes de cultures. Aussi appelé Beaubourg, il a révolutionné son époque et conquis un public francilien autant qu'étranger.
Mais il souffre de vétusté. Désamiantage, accessibilité du lieu, sécurité et complet réaménagement intérieur sont au menu de ses importants travaux de rénovation.
Du 22 au 25 octobre, le Centre Pompidou rouvrira exceptionnellement pour trois jours de fête, avec notamment Christine and the queens, Catherine Ringer, Selah Sue et un feu d'artifice en plein jour.
Par Lisa DEFOSSEZ / Paris (AFP) / © 2025 AFP