Le dernier livre d'Étienne-Alexandre Beauregard s'intitule Anti-civilisation. Pourquoi nos sociétés s'effondrent de l'intérieur (Éditions Presses de la Cité).
Étienne-Alexandre Beauregard : "C'est davantage les plus vulnérables aussi qui récupèrent la facture quand on laisse les pulsions antisociales s'exprimer"
Où en est-on du choc des civilisations et de la fin de l'histoire ? "La thèse Huntington, par exemple, est assez intéressante. Parce que pour lui, c'est vraiment le choc extérieur qui va achever l'Occident, qui va le mettre en difficulté. Alors que vous aurez constaté le sous-titre de mon livre : 'Pourquoi nos civilisations s'effondrent de l'intérieur'. Donc, c'est le pari que j'ai choisi de faire en examinant les dérives contemporaines de la liberté", a répondu Étienne-Alexandre Beauregard.
"Parce que qu'est ce qu'une civilisation ? D'abord, Norbert Elias nous disait : 'c'est quand on est capable de mettre de côté nos pulsions pour bâtir des règles collectives qui nous permettent de vivre ensemble'. Donc, quand je parle d'anticivilisation, pour moi, c'est exactement l'inverse. C'est à dire, quand on sombre dans la déconstruction, quand on décide que le fait qu'on a des normes, qu'on a une culture, qu'on a des mœurs… que ça ne sert plus à rien. Je pense qu'on les prend pour acquis. Et, malheureusement c'est davantage les jeunes, c'est davantage les plus vulnérables aussi qui récupèrent la facture quand on laisse les pulsions antisociales s'exprimer", a poursuivi Étienne-Alexandre Beauregard.
"C'est comme celui qui monte au sommet d'un château et qui pousse l'échelle"
Qu'est-ce qui a profondément changé dans la prise de conscience depuis 50 ans ? "Je crois qu'il y a certainement une différence générationnelle qui s'exprime à peu près partout en politique aujourd'hui. La génération qui a amorcé la déconstruction dans les années 1960 et 1970 avait cette grande chance d'avoir hérité, d'avoir grandi avec cette tradition à laquelle elle a choisi, en quelque sorte, de renoncer librement. Mais le contrecoup qu'elle n'avait pas anticipé, c'est que les plus jeunes comme moi, nous n'avons pas eu cette chance d'avoir cet héritage", a expliqué Étienne-Alexandre Beauregard.
"À partir du moment où on coupe le fil, à partir du moment où on décide de cesser de transmettre, et bien, malheureusement, on appauvrit. Et donc, je ne peux pas dire que ma génération, ceux qui sont nés entre 1995 et 2012, ont eu la même chance que ceux qui ont fait la révolution de 1968 et ont décidé qu'ils ne nous transmettraient plus ces trésors civilisationnels dont eux ont hérité. C'est comme celui qui monte au sommet d'un château et qui pousse l'échelle. C'est exactement la même chose, mais sur le plan culturel", a poursuivi Étienne-Alexandre Beauregard.
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