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Frédéric Lauze (Police) : "L'État est bridé dans sa lutte contre l'insécurité"

INTERVIEW SUD RADIO - Invité du "Grand Matin Sud Radio", Frédéric Lauze, le secrétaire général du Syndicat des commissaires de la Police nationale (SCPN), estime que la lutte contre l’insécurité est aujourd’hui entravée par des "verrous" juridiques, en particulier le droit européen et le Conseil constitutionnel.

Frédéric Lauze
Frédéric Lauze

Au micro de Sud Radio, Frédéric Lauze, secrétaire général du Syndicat des commissaires de la Police nationale (SCPN), plaide pour un rééquilibrage institutionnel afin de redonner à l’État des marges de manœuvre en matière de sécurité, non pas dans une logique autoritaire, mais pour garantir la liberté et la sûreté des citoyens. Pour lui, il ne s’agit pas seulement d’augmenter les moyens, mais d’avoir une stratégie claire et des lois efficaces.

"Le Conseil constitutionnel a une conception qui date de 1945"

Maxime Lledo : Lorsqu'il s'agit de lutte contre la délinquance, ne pensez-vous pas que nos instances, notamment le Conseil constitutionnel, ne sont pas à la hauteur et qu'il faudrait revoir leur rôle ?

Frédéric Lauze : Pour moi, il faut clairement revoir leur rôle. Il y a un droit à la sûreté. C'est un droit qui fait partie de la Déclaration des droits de l'homme. Je pense que depuis une quarantaine d'années, le Conseil constitutionnel est sorti de son rôle. Il interprète sa propre jurisprudence. C'est une dérive - ce n'est pas une cour suprême, la Cour suprême, c'est le peuple. Et parfois il sanctionne sur la base de textes déclaratoires, qui sont des textes très généraux qui n'ont pas une portée juridique en réalité : Déclaration des droits de l'homme, le préambule de la Constitution de 1946, qui est intégra la Constitution de 1958… Quand [le Conseil constitutionnel] proclame la fraternité pour limiter une loi de lutte contre l'immigration clandestine, qu'il en fait un principe constitutionnel, évidemment que c'est un problème et qu'il sort, selon moi, de son rôle.

De la même façon, la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme… c'est important qu'il y ait une telle convention, mais elle est totalement inadaptée à à 2025. Il faut la revoir. Quand le Conseil constitutionnel interdit la comparution immédiate des mineurs et qu'il censure la loi de Gabriel Attal sur la délinquance des mineurs, là aussi, il ne nous aide pas. Et puis surtout, il a une conception qui date de 1945.

C'est les verrous. Si on veut rétablir la sécurité et la dissuasion judiciaire, il faut être clair, il faut débloquer ces verrous. Ça veut pas dire qu'il faut tout foutre en l'air. Chacun a sa place, et il y a un principe de réalité qui doit s'imposer pour lutter contre la délinquance. L'État doit avoir les moyens, qu'il n'a pas aujourd'hui, parce qu'il est bridé par le droit européen et également par le Conseil constitutionnel. Et l'objectif, c'est quand même la sécurité des Français. Ce n'est pas simplement un projet sécuritaire. L'objectif, c'est la liberté de tous. Mais aujourd'hui, on n'y arrive pas. La logique n'est pas simplement de donner toujours plus de moyens, toujours plus de moyens. Ça, c'est la pensée paresseuse. C'est aussi d'avoir du pilotage, une stratégie, et de pouvoir avoir des lois efficaces. Et aujourd'hui, on ne le peut pas, en partie à cause de la censure du Conseil constitutionnel et du droit européen, qui n'est plus adapté.

"Développer des polices municipales est absolument nécessaire aujourd'hui"

Maxime Lledo : Quel regard portez-vous sur ces candidats aux maires qui disent "la sécurité est une prérogative de l'État, on ne va surtout pas armer notre police municipale" ?

Frédéric Lauze : Évidemment que c'est aberrant. Les maires, en vertu de l'article 72 de la Constitution, le principe de libre administration, ont le droit de développer des polices municipales. Donc, là-dessus c'est tout à fait normal, et c'est absolument nécessaire aujourd'hui. On voit dans la plupart des villes à quel point les policiers municipaux comme les policiers nationaux sont exposés aux violences. À un moment donné, il va falloir se poser la question du périmètre, de qui fait quoi. Moi, je trouve normal de développer les policier municipales. Je pense qu'elles doivent être toutes armées. Parce que quand vous êtes en bleu sur la voie publique, vous êtes une cible. On a des policiers municipaux, notamment des policières femmes, qui sont mortes sur la voie publique face à des voyous et des terroristes.

Après, la question qui va se poser, c'est la question de l'harmonisation des compétences et de leurs convergence avec le travail de la police nationale. La police municipale, elle dépend du maire. Mais si on lui donne de plus en plus de pouvoir judiciaire, elle ne pourra pas faire le travail de proximité, de tranquillité publique, et on a un risque de confusion avec la police nationale. Je pense donc qu'il faut qu'il y ait des conventions de coordination, en laissant la pleine autonomie de la police municipale. Mais, en même temps, sur le terrain dans une même ville, on peut pas avoir des effectifs de police en bleu qui ne se coordonnent pas.

Retrouvez "La vérité en face" avec Maxime Lledo dans "Le Grand Matin Sud Radio".

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