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Une chanson satirique sur France Inter qui a fait scandale.
Diffusée vendredi dans l’émission par Jupiter. Cinq ans après l’assassinat de nos dessinateurs aux cris de Allah Akhbar, le chanteur-humoriste Frédéric Fromet, payé par nos impôts, aurait pu se moquer des Frères musulmans qui contrôlent nombre de nos quartiers. Que nenni. L’urgence était de combattre les intégristes chrétiens qui, au Brésil, ont tenté d’interdire une série mettant en scène une liaison homosexuelle de Jésus.
Ça vous choque ?
Ça a en tout cas choqué pas mal de cathos, comme les caricatures du Prophète publiées par Charlie avaient choqué beaucoup de musulmans. Mais ce qui me choque le plus dans l’humour francintérien (sujet de Beigbeder), c’est qu’il est fort avec les faibles et faible avec les forts.
Face à l’islam radical, dont les représentants sortent leur revolver quand ils entendent le mot critique, on a sur la radio publique une délicatesse de jeune fille. Il ne faut pas froisser le musulman du coin de la rue avec le grossier rappel des exploits macabres commis en son nom (Huffpost a exhumé une chronique sur les frères Coulibaly, du court temps où France Inter était Charlie). Avec les juifs, on n’ose pas. Comme disait Bernanos, Hitler a déshonoré l’antisémitisme.
Avec le catho, tout est permis. Tous pédophiles, tous intégristes, tous fachos. Après l’incendie de Notre Dame Fromet a chanté « elle a cramé la cathédrale » sur un air de comédie musicale.
Vous ne pouvez pas interdire le mauvais goût.
Qui parle d’interdiction ? Mais ce mauvais goût est à sens unique. Il hurle avec les loups. Dernières productions : contre Finkielkraut, contre les violences policières, contre la réforme des retraites. Le jour où il osera se moquer des tartuffes de gauche, du lobby LGBT des féministes puritaines et punitives, des islamo-gauchistes, de Ladj Ly, bref des vaches sacrées et des idées dominantes, on pourra parler d’humour. Pour l’instant, il n’est qu’un mutin de Panurge.
On ne va pas rétablir le délit de blasphème pour les cathos ?
Surtout pas ! J’adjure mes amis catholiques de ne pas céder à à la tentation victimaire, de ne pas devenir la énième minorité vindicative. Il ne s’agit pas de les protéger contre la critique et la caricature mais d’étendre à tous, aux musulmans, aux juifs, aux pêcheurs à la ligne et aux vegans la liberté de critiquer, de penser et de déconner. Commençons par nous en servir en nous payant la tête des ronds de cuir du rire.