Au procès de Cédric Jubillar, Anne, proche amie de Delphine, a assuré mercredi que l'accusé "rabaissait" la jeune mère, ouvrant une fenêtre inédite sur l'intimité de l'infirmière disparue et de son mari accusé de l'avoir tuée mais qui s'en défend.
Cette mère au foyer, âgée de 48 ans, a raconté à la barre avoir rencontré Delphine Jubillar en 2016 et que la scolarité de leurs enfants à la même école de Cagnac-les-Mines (Tarn) les avait rapprochées. La présence "très soutenante" de Delphine lors de sa propre séparation a achevé d'en faire une amie très proche, a-t-elle confié.
Sous les yeux de l'accusé dans son box, vêtu d'un gilet noir à rayures gris sombre, cette intime des Jubillar a raconté avoir "connu un couple relativement complice quand ils ont eu Louis et Elyah, avec quelques gestes affectueux", puis avoir noté leur éloignement progressif, avec un "point de non retour" lorsque Cédric ne signe finalement pas un CDI à l'été 2020.
"Je pouvais passer tout un après-midi avec Delphine, avoir devant moi une personne joviale, souriante, qui parle librement, très à l'aise avec moi, puis l'arrivée de Cédric pouvait provoquer ce off/on chez elle où, même quand je lui parle, je n'ai même pas un acquiescement", a raconté Anne.
- "Elle n'existait plus" -
"Il la rabaissait verbalement (...) elle n'avait pas de place pour s'exprimer, elle n'existait plus avec Cédric", a-t-elle expliqué. "Quand je passais une soirée avec eux, je n'arrivais quasiment pas à parler avec Delphine. Il occupait toute la place."
"Finalement, on ne sait jamais véritablement comment fonctionnent les gens quand la porte de leur intérieur se referme derrière eux", avait anticipé mardi Laurent Boguet, l'un des avocats des enfants du couple, Louis, 11 ans, et Elyah, 6 ans. "Et pour autant, c'est l'impérieux devoir d'une cour d'assises que d'essayer d'apprécier un petit peu les tensions qui pouvaient exister."
L'audition d'Anne a aussi permis d'évoquer la personnalité du peintre-plaquiste, 38 ans aujourd'hui, décrit mardi comme violent envers son fils Louis par les frères, soeur et cousines de la disparue.
Lors d'une sortie au lac avec quelques parents de l'école, les enfants s'étaient éclipsés sans prévenir pour faire un tour du plan d'eau, a raconté Anne à la cour. Au retour de Louis, "Cédric enlève sa tong, tient Louis par le bras et donne de sacrés coups sur les fesses. Le corps de Louis oscille sous les coups de la tong", s'est-elle rappelée.
Elle a aussi relayé des réactions marquantes attribuées à l'accusé : il aurait par exemple répondu "alors je vais me pendre" à Delphine qui lui annonçait fin octobre son intention de divorcer ; ou encore assuré à Anne que "si elle a un amant, je lui ferai à l'envers".
"N'entre pas en guerre", avait alors recommandé par message à Delphine son amie Anne, inquiète des propos de Cédric et encore marquée par sa propre séparation conflictuelle.

Laurent Boguet, avocat des enfants du couple Jubillar, à la cour d'assises du Tarn, à Albi, le 22 septembre 2025
Lionel BONAVENTURE - AFP/Archives
Delphine née Aussaguel, disparue dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020, travaillait en tant qu'infirmière de nuit à la clinique Claude-Bernard d'Albi. Plusieurs de ses collègues doivent prendre la parole mercredi au palais de justice d'Albi.
- "Pilier" -
Mardi, magistrats et jurés ont entendu la sœur et les frères de Delphine Jubillar, ainsi que d'autres proches qui, unanimes de chagrin à la barre, ont décrit une personnalité rayonnante, "pilier" de la famille.
Tous ont dit à quel point il leur semblait "impensable" que Delphine parte, tant elle "aimait ses enfants". "C'est forcément que quelque chose de grave est arrivé", a estimé son petit frère Mathieu, dont elle s'était beaucoup occupée pour soulager sa mère.
"Je l'aimais, j'étais amoureux d'elle (...) et après on s'est perdus", avait répondu Cédric Jubillar, situant le moment de la fracture "à partir du moment où elle a demandé le divorce".
Interrogé sur les raisons qu'il avait évoquées concernant la disparition de son épouse, dont celles de l'endoctrinement dans une secte ou d'un départ pour le jihad, il a répondu: "Elle est peut-être partie, on sait pas. Ce qui est sûr, c'est que moi je lui ai rien fait à Delphine."
Le verdict est attendu le 17 octobre.
Par Valentin GRAFF, Daniel MARTINEZ / Albi (AFP) / © 2025 AFP