Treize ans après le retentissant assassinat de l'avocat Antoine Sollacaro à Ajaccio, la cour d'assises des Bouches-du-Rhône a condamné jeudi le tireur de l'expédition à une peine de 30 ans de réclusion criminelle.
Le verdict est tombé au terme d'un procès hors normes, débuté le 3 novembre et tenu à huis clos.
Le commanditaire présumé du crime et chef présumé de la bande criminelle corse dite du "Petit Bar", Jacques Santoni, n'a pas été jugé pendant ce procès, pour raisons de santé.
Après plus de neuf heures de délibérations, André Bacchiolelli, considéré comme le tireur qui a abattu l'ancien bâtonnier du barreau d'Ajaccio le 16 octobre 2012, a été reconnu coupable de tous les chefs d'accusations et condamné à 30 ans de réclusion criminelle, assortis d'une peine de sûreté de 20 ans. Son avocat a immédiatement annoncé son intention de faire appel.
"Ce que je retiens, c'est la déclaration de culpabilité", a déclaré de son côté Me Philippe Soussi, l'un des avocats de la famille, à la sortie de la salle d'audience.
"La justice est passée. C'est un moment important, ce soir, pour la famille. Et c'est aussi un moment historique, parce que ça fait 13 ans qu'on attend ce procès", a-t-il souligné.
La veuve et les enfants d'Antoine Sollacaro ne se sont pas exprimés.
L'avocat avait été abattu de cinq balles dans la tête par des assaillants à moto alors qu'il venait d'acheter son journal comme tous les matins dans la même station-service d'Ajaccio.
L'assassinat de l'ancien bâtonnier d'Ajaccio, défenseur d'Yvan Colonna ou de l'ex-dirigeant nationaliste Alain Orsoni reconverti dans les affaires et lié au grand banditisme, avait été qualifié "d'onde de choc" par Christiane Taubira, alors ministre de la Justice.
- Rivalité -
Le cas de Jacques Santoni, commanditaire présumé du crime, qui aurait été commis sur fond de rivalité entre le "clan" Orsoni et la bande du "Petit Bar", poursuivi pour complicité d'assassinat et association de malfaiteurs, avait été disjoint dès le début du procès et renvoyé à une audience ultérieure.
Tétraplégique depuis un accident de moto en 2003, il n'avait déjà pas comparu à ses derniers procès et n'est pas incarcéré malgré une peine de 13 ans de prison pour blanchiment prononcée en juin à Marseille.
Considéré par les enquêteurs comme "proche lieutenant" de Santoni et poursuivi pour association de malfaiteurs en récidive, Mickaël Ettori, en fuite depuis 2020, a de son côté été condamné à 15 ans de prison en son absence.
L'accusation reposait principalement sur les déclarations du premier repenti de France, Patrick Giovanonni, petite main de la bande du "Petit Bar", selon qui Jacques Santoni avait dit après l'assassinat de Me Sollacaro: "c'est nous qui avons tapé".
Lui-même poursuivi pour association de malfaiteurs dans une autre tentative d'assassinat jointe au procès Sollacaro, il a comparu masqué et a été condamné à cinq de prison avec sursis.
Son avocat, Me Laurent-Franck Liénard, a jugé le verdict " parfaitement normal". "C'est un honnête homme qui s'est présenté à la cour, qui a évidemment honte de ce à quoi il a participé, mais qui n'a pas honte de ce qu'il a dit et qui n'a pas honte du virage qu'il a pris".
"La manière même dont a été prononcé ce verdict est révélatrice des conditions dans lesquelles ce procès s'est déroulé à l'abri des regards. Ce verdict qui n'honore pas la justice sera frappé d'appel", a au contraire déclaré de son côté Me Bruno Rebstock, l'un des avocats de M. Bachiolelli.
Par Wafaa ESSALHI et Maureen COFFLARD à Ajaccio / Aix-en-Provence (AFP) / © 2025 AFP