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Entre usagers et cheminots, la réforme de la SNCF ne fait pas l’unanimité

Par Benjamin Jeanjean

Alors que le gouvernement passe la seconde vitesse ce lundi dans la réforme de la SNCF et du statut de cheminot, ce dernier continue de cristalliser les tensions entre usagers et employés de la SNCF. Reportage.

Illustration grève SNCF (©KENZO TRIBOUILLARD - AFP)

Le statut de cheminot de la SNCF et les avantages qui vont avec vit-il ses dernières heures ? Ce lundi, Édouard Philippe devrait présenter une méthode et un calendrier pour transformer l'entreprise publique sur la base du récent rapport Spinetta, qui préconise la baisse des financements des petites lignes, l'ouverture du réseau à la concurrence ou encore de revenir sur le statut des cheminots. Un statut qui fait quelques envieux, et sur lequel certains usagers aimeraient visiblement revenir.

"Ils se promènent dans les trains aussi à l’aise qu’un fonctionnaire dans son bureau"

À la gare Saint-Charles de Marseille, les voyageurs s’agacent notamment sur la question du départ à la retraite. "Moi je suis infirmière, j’ai travaillé de nuit et tout, et c’est pas évident non plus. Il n’y a pas de raisons qu’ils aient la retraite avant les autres !", s’indigne une voyageuse. "Je vais rejoindre un ami qui est justement retraité de la SCNF, il a été à la retraite dix ans avant moi. Vous pensez si ça me fait râler !", ajoute une autre. "Il est temps de faire bouger un peu les choses. On n’est plus au temps des machines à vapeur où le travail était pénible et où le charbon était lourd à enfourner dans la locomotive. Maintenant, ces messieurs se promènent dans les trains aussi à l’aise qu’un fonctionnaire dans son bureau", peut-on encore entendre sur les quais, alors qu’un voyageur souligne, lui, la spécificité de l’entreprise publique. "La différence ici, c’est que ce n’est pas une société privée mais nationale, donc tout le monde paye...", rappelle-t-il.

"C’est un privilège de gagner 1400€ après 35 ans à faire les 3-8 ?"

De l’autre côté, les syndicats de cheminots veulent mettre les points sur les i. "Si on était vraiment des privilégiés, on ne peinerait pas à recruter. Or, on manque de conducteurs de train aujourd’hui. Deuxièmement, être privilégié, est-ce que c’est vraiment de gagner 1400 euros après 35 ans en faisant les 3-8 et en se levant le matin à 3h pour aller au boulot à 4h, en travaillant trois dimanches sur cinq ? À la SNCF, l’âge de départ à la retraite est en moyenne de 58 ans aujourd’hui. Dans le privé, c’est souvent 56-57 ans", clame Bruno Poncet, secrétaire fédéral de Sud-Rail, au micro de Sud Radio. François Tejedor, secrétaire général CGT-cheminots en Paca, dénonce de son côté le principe des ordonnances, que le gouvernement pourrait une nouvelle fois utiliser. "C'est un déni de démocratie. Ce n’est pas parce qu’on a été élu qu’on peut occulter les débats. Il suffit de regarder EDF et France télécom : au final, la qualité a été complètement détruite", avertit-il.

"La SNCF pourrait voler en éclats si elle ne s’adapte pas"

Il reste que pour certains, cette évolution est indispensable en vue de l’ouverture du secteur à la concurrence. C’est le cas d’Alain Bonnefous, professeur émérite à l'université de Lyon et chercheur au laboratoire Aménagement Économie Transports. "Les roulants des TER en Allemagne roulaient 1005 heures par an. Les roulants des TER français roulent 400 heures par an. Vous pensez bien qu’à partir du moment où l’on ouvrira ce secteur à la concurrence, avec des opérateurs qui seront certainement plus près des 1000 heures que des 400 heures, la SNCF pourrait voler en éclats si elle ne s’adapte pas. Je veux bien faire semblant de croire qu’il n’y a aucun avantage à la réglementation sociale et au statut, mais je pense quand même que ça mériterait d’être revu et nettoyé", assure-t-il.

Propos recueillis par Lionel Maillet et Steven Gouaillier

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