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Marc Fesneau : "Le Contre-budget du PS est une impasse, une fiction qui appauvrit"

Par Adélaïde Motte

ENTRETIEN SUD RADIO - Contre-budget du PS : "c’est une impasse, une fiction qui appauvrit", selon Marc Fesneau, Député du Loir-et-Cher. Il était “L’invité politique” sur Sud Radio. 

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Marc Fesneau interviewé par Jean-François Achilli sur Sud Radio, le 2 septembre 2025, dans “L’invité politique”.

Pour le Premier ministre, François Bayrou, le vote de confiance du 8 septembre approche à grand pas, et il se fera notamment à partir du budget qu'il propose. Invité politique du jour, Marc Fesneau a répondu aux questions de Jean-François Achilli.

"Il y aura pas de confiance majoritaire"

Qu'est-ce que vous lui avez dit à François Bayrou, quand il a annoncé la confiance et tout le reste ? "Super François ton idée de sabordage ?"

Non, je ne lui ai pas dit ça. Je lui ai dit que ça posait une question de fond, avant d'aborder la séquence budgétaire. Nous étions quelques-uns à partager cette idée. Aborder la question budgétaire sans poser la question de la trajectoire c'était au fond faire semblant de rentrer dans le budget, avec toute chance qu'au bout de 3 jours, 10 jours, 15 jours, la censure s'impose à coup de reculs, qu'elle ne tiendrait pas la trajectoire. Donc je pense que c'est utile. Je lui ai dit de poser le débat de confiance qui est celui de "est-ce qu'on est bien d'accord au moins sur le diagnostic ? Est-ce qu'on est d'accord au moins sur la trajectoire ?" Il y a un chemin qui est celui de la responsabilité. Prôner le chemin de la responsabilité, faire le pari de la responsabilité, ce n'est pas une auto-dissolution ou une autodestruction.

Vous êtes d'accord pour dire que c'est fini, il n'y a pas de trou de fourmis comme il l'a dit ?

On est mardi, les éléments que j'ai sur la table me font penser qu'effectivement il y aura pas de confiance majoritaire. Mais vous savez, dans la vie politique, il faut toujours s'attendre à des revirements ou à des évolutions, d'ailleurs c'est pas forcément des revirements. Je pense que la situation qu'a posé François Bayrou, à la fois dans le budget qu'il a proposé le 15 juillet et dans le diagnostic sur lequel il s'est présenté devant nous le 8 septembre, est une situation qui va s'imposer aux uns et aux autres.

C'est le constat d'une impasse ? "Je suis Premier ministre, ça ne marche pas, je m'en vais ?

On verra. On verra ce qu'il adviendra du 8 mais on ne peut pas continuer dans ce pays à faire semblant vis-à-vis de la dette et du déficit. C'est pas pour le plaisir des comptables, c'est pas seulement par la crainte, parce que moi je ne crois pas qu'on manœuvre avec la crainte, seulement du FMI des marchés, quand bien même il faille quand même y faire attention. C'est parce que nous nous empêchons nos capacités d'investissement, nous nous empêchons d'intervenir sur des sujets qui sont des sujets de préoccupation des Français si on continue à creuser la dette et le déficit. On est à 60 milliards de remboursement d'annuité, on va passer à 100, c'est 40 milliards de delta ! Vous croyez pas qu'ils seraient plus utiles dans les services publics, dans la défense, dans la réindustrialisation, plutôt que de les donner aux banquiers au fond ?

Marc Fesneau, vous dites "il faut arrêter de faire semblant". Emmanuel Macron reçoit Marine Le Pen et Jordan Bardella ce matin. Vous, vous y allez en tant que patron du groupe Modem demain. A quoi ça sert de consulter ? C'est pour promener le chien ? C'est pour du petit théâtre ? Tout le monde sait que ça ne sert à rien !

Ca ne sert jamais à rien en démocratie de rencontrer les uns ou les autres, quand bien même ce soient des adversaires résolus. Ils ont déjà dit la messe et en même temps c'est bien qu'ils continuent à entendre. On verra ce qu'il adviendra, c'est bien qu'ils continuent à entendre ce qu'est la réalité du pays. Parce que, que ce soit Madame le Pen ou les autres, tout le monde est en situation de responsabilité. Bayrou a souvent dit d'ailleurs que les 577 députés que nous étions, nous étions tous à équivalence de responsabilités. Et donc quand on est en équivalence de responsabilité il est normal qu'on puisse échanger pour dire "voilà la situation du pays. Voilà pourquoi je pose cette question et voilà ce que j'attends des forces politiques, y compris d'opposition."

"La trajectoire proposée par le parti socialiste est une impasse"

Vous pouvez commenter le parti socialiste, la déclaration d'Olivier Faure qui s'y voit déjà, avec un contre-budget. Vous en pensez quoi du contre-budget du PS ?

C'est pas un contre-budget c'est un déficit augmenté. C'est une forme de fiction au fond. On sait qu'on a une dette et un déficit. D'ailleurs c'est très intéressant parce qu'on reproche à Bayrou d'avoir posé cette question-là. Enfin je vois que cette question mérite d'être posée puisque la trajectoire proposée par le parti socialiste est une impasse. C'est une impasse pourquoi, parce qu'au fond c'est "je ne me préoccupe pas de la dépense et ce je propose c'est quoi ? c'est des impôts pour combler le trou." C'est un puits sans fond les impôts. Parce que la première année vous avez besoin de 32 milliards, ce qui est énorme. La deuxième vous aurez besoin de 40, la troisième vous aurez besoin de 50. vous appauvrissez le pays ! Nous créons chaque année simplement 50 milliards de richesses supplémentaires. L'inflation et la croissance c'est 50 milliards de plus et on va prélever 30 de plus cette année ? Mais on va où au bout de ça ? Et quand je vois la taxation des hauts revenus, quand je vois la façon dont les socialistes abordent la question budgétaire, j'espère que c'est juste un manque de sérieux et que c'est pas une absence de lucidité. Que c'est juste un coup pour essayer de dire quelque chose à une université de rentrée parce qu'il n'y a personne de sérieux qui peut crédiblement croire le plan du parti socialiste. Alors après, au fond l'été a été là-dessus d'ailleurs, qu'est ce que disent les Français ? Moi je pense qu'il ne faut jamais parler au nom des Français. Les Français ne sont pas une homogénéité. Donc je fais attention à ça. Mais je perçois quelque chose qui est de l'ordre de "on a compris qu'il faudrait faire des efforts." Simplement y a quelque chose qui crie plus fort que ça encore c'est "il faut que ce soit juste". Donc il faut que ceux qui peuvent le plus faire des efforts fassent plus d'efforts que les autres.

Les Français que vous citez Marc Fesneau, dans les enquêtes d'opinion, dans les sondages, disent "oui" au départ de François Bayrou et même "Macron démission", voilà ce qu'il disent.

Ce n'est pas qu'un sujet de personne. Le ras-le-bol général il est aussi qu'à la fin, c'est toujours les mêmes qui contribuent, c'est-à-dire la France qui travaille. Et donc c'est aussi là-dessus, et c'est d'ailleurs les pistes qu'avait ouvertes François Bayrou, et qui sont ouvertes, c'est des pistes qui visent à dire "il y a un effort à partager, mais selon votre capacité contributive, selon les efforts que vous pouvez consentir, vous ne serez pas traité de la même façon". Il y a les efforts de l'État dans son train de vie.

C'est un des reproches qui est fait, pas assez de réformes structurelles . On n'ouvre pas le capot de la voiture, on ajoute des impôts on rabote.

C'est inexact, dans le projet de budget qu'a présenté Bayrou le 15 juillet, il y a des mesures structurelles. Quand vous êtes sur la fraude, quand vous êtes sur l'assurance chômage, quand vous êtes sur le le freinage... Je rappelle que Amélie de Montchalin a dit à plusieurs reprises que l'objectif c'était de réduire environ un tiers des agences et des offices. Si ça c'est pas structurel, je sais pas ce que c'est. Alors immédiatement tout le monde hurle en disant "pas celle-là pas celle-là pas celle-là", mais moi je trouve que cette trajectoire était une trajectoire juste. Le structurel c'est forcément un peu de temps.

"Le budget 2025 a permis de freiner la dépense publique et de réduire le déficit"

Édouard Philippe, patron d'Horizon, a déclaré "je crains que la dissolution ne soit inéluctable." Il a raison ?

Non, moi je pense qu'elle n'est pas inéluctable. Je pense qu'elle n'est pas inéluctable parce que ce qu'il faut conjurer, c'est l'irresponsabilité collective de ceux qui aspirent à gouverner un jour et qui disent "au fond c'est pas mon problème, et comme je ne veux pas que ce soit mon problème, je dis dissolution ou destitution". Au fond c'est une fuite en avant cette affaire-là. Or, il y a les capacités à l'Assemblée nationale à trouver des points majoritaires. Je rappelle que le budget 25, qui est un budget mis en œuvre, et pensé par François Bayrou, c'est un budget qui est l'objet d'un compromis. D'ailleurs on a plutôt réussi puisque il était prévu 6,3 de déficit on est sur une trajectoire à 5,4 donc c'était possible de réduire la dépense sans saigner. Ce budget 2025 a permis de freiner la dépense publique et de réduire le déficit. Pas assez, c'est pour ça qu'il faut faire un effort encore sur 2026 2027 et 2020.

Il n'a pas convaincu, pourtant les chiffres sont là. Les fameux 100 milliards d'intérêts de la dette en 2029 ça devrait nous frapper dans notre imagination. Y a-t-il eu des erreurs de comm' ? Les fameux deux jours fériés ?

Reconnaissons qu'il s'est attaqué à un Himalaya qui celui d'une dette et d'un déficit. Il y a beaucoup de responsables politiques qui ont essayé de dire des choses sur le sujet, lui l'a dit il y a très longtemps, vous le savez aussi bien que moi, il l'a dit il y a près de 25 ans. Et finalement il y a quelque chose qui percole un peu, à la fin on penche du côté, collectivement, de la facilité, du sentiment que ça passera bien encore une fois. Mais il y a un moment où ça passera plus et il y a un moment où notre notre incapacité à nous réformer, ça nous donne des incapacités à produire les investissements on a besoin.

Le Modem a participé à ce que décrit François Bayrou, c'est-à-dire des votes successifs de budget en déficit.

Je n'en disconviens pas tout. Tous nous avons participé, mais quand y a eu la crise Covid, qui est venu dire "faut pas protéger les restaurateurs" ? Qui est venu dire "faut pas protéger les salariés qui sont sans activité" ? Qui est venu dire, au moment de la crise inflationniste, "il faut pas faire de bouclier tarifaire" ? D'ailleurs quand vous regardez sur la question de la dette du Covid, tous les pays ont fait ce qu'on a fait globalement, le seul problème chez nous, c'est que jamais les cliquets retour ne se sont mis en place, et donc on a continué à laisser dériver, alors qu'il aurait fallu en raison dire "on ne peut plus le faire".

Vous entendez la petite musique qui monte "Macron démission"... c'est même dit par des gens raisonnables : Jean-François Copé, David Lisnard, Hervé Morin... Ce ne sont pas de dangereux révolutionnaires !

On peut pas en permanence, parce qu'il y aurait des crises ou des difficultés, remettre en cause le suffrage universel. L'Assemblée nationale a été à peine élu il y a un an ! C'est le choix des Français l'Assemblée nationale, il y a un an il y a eu un vote. Et on dit un an et quatre mois après "Ah bah ça marche pas il faut voter" ? Et puis maintenant comme ça ne suffit pas il faut dire "on va revoter aussi sur le président de la République" ? Le président de la République il a été élu pour 5 ans. Cette instabilité permanente, si vous croyez en plus que ça vient pas rajouter de l'instabilité à l'instabilité... Personne peut croire autre chose. C'est une fuite en avant. C'est une fuite en avant pour échapper aux responsabilités. Les responsabilités c'est que ce que nous sommes les uns et les autres. Il y aura des échéances en 2027, c'est pas si loin c'est dans 18 mois que s'enclenchera la campagne présidentielle. Il y a le temps de faire un travail, y compris et notamment budgétaire, dans l'intervalle qui nous sépare de 2027. Il faut que ce soit démocratique, il faut qu'il y ait le temps c'est pas la peine de précipiter les choses. Moi je ne suis pas paniqué dès lors que j'ai encore espoir qu'il y ait des forces politiques qui puissent se parler sans faux-semblants, sans penser à 2027, et avancer. Les gens n'attendent pas des présidentielles, ils attendent qu'on ait un budget.

Retrouvez "L’invité politique" chaque jour à 8h15 dans le Grand Matin Sud Radio

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