La campagne pour les européennes, on savait qu’elle était lancée quand on a vu Emmanuel Macron prononcer un grand discours à Strasbourg devant le Parlement européen, et Bruno Le Maire tenter de convaincre ses homologues de taxer les Gafas en leur expliquant que s’ils veulent aller devant les électeurs en disant qu’ils n’ont rien fait, bonne chance.
On comprend bien que, pour la recomposition politique que veut Emmanuel Macron, les élections européennes sont des élections majeures. Ouverture contre fermeture, méchants contre gentils, c’est parfait. Du coup, Marine Le Pen est sa meilleure adversaire. Et si, autour d’elle, il y a tous ces partis dont les commentateurs français expliquent à longueur d’analyse que les frontistes, à côté, sont des sociaux-démocrates bon teint, c’est encore mieux.
En réalité, il y a les partis politiques, avec leurs différences d’un pays à l’autre, et il faut se souvenir qu’en 2014, Marine Le Pen avait échoué à rassembler autour d’elle et à constituer un groupe au parlement européen.
Le Front National était considéré par nombre de partis européens comme un paria dont il fallait se tenir éloigner pour ne pas risquer d’être soi-même diabolisé. Et puis il y a les mouvements des peuples. Les choses ont changé depuis 2014. Dans tous les pays européens, des insurrections par le vote ont fait progresser de façon spectaculaire ce que certains appellent les partis populistes. Populistes ?
Leur point commun est en effet de servir aux électeurs pour manifester leur colère devant un système qu’ils n’ont pas choisi et qui leur semble de plus en plus oligarchique. En Italie, la Ligue du Nord a opéré une percée considérable aux dernières élections. En Allemagne, l’AFD est entrée massivement au Bundestag, et puis, en Autriche ou en Hongrie, ce sont bien des partis considérés comme populistes ou d’extrême droite qui tiennent le gouvernement. De quoi faire rêver Marine le Pen.
Elle est d’ailleurs encore créditée de 23% dans un sondage récent qui s’amuse à rejouer la présidentielle.
Les mêmes causes produisent les mêmes effets. Et Emmanuel Macron, qui est visiblement plus intelligent, ou plus lucide que ses homologues européens, l’a compris. Son élection n’est qu’une parenthèse dans la vague populiste, due au mode de scrutin français. Mais l’aspiration à reprendre le contrôle ne s’est pas éteinte.
Écoutez la chronique de Natacha Polony dans le Grand Matin Sud Radio, présenté par Patrick Roger et Sophie Gaillard