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Nathalie Goulet : « La criminalité organisée en France ? 50 milliards d’euros pour seulement 2 % récupérés… »

ENTRETIEN SUD RADIO - Invitée de Vanessa Perez sur Sud Radio, Nathalie Goulet a démonté les annonces sur la suppression du cash et la régulation des cryptoactifs. Dans un contexte de lutte contre les réseaux criminels et de dérives sécuritaires, la sénatrice de l'Orne appelle à une vraie stratégie antifraude, loin des effets d’annonce.

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Nathalie Goulet au micro de Vanessa Perez.

« Darmanin a fait le buzz »

Dans un entretien accordé à Vanessa Perez sur Sud Radio, dans le cadre d’une émission spéciale consacrée à la monnaie du futur et à la surveillance numérique, Nathalie Goulet, sénatrice de l’Orne, a livré une critique méthodique des propositions gouvernementales en matière de lutte contre la criminalité financière. Présidente d’une commission d’enquête sénatoriale sur les réseaux criminels, elle s’est notamment insurgée contre l’idée avancée par Gérald Darmanin de supprimer l’argent liquide, qu’elle considère comme une mesure d’affichage déconnectée des réalités du terrain.

« Il a fait le buzz sur 12 secondes 45 de la commission d'enquête qui avait quand même duré 6 mois (…) Il aurait pu nous dire 50 000 choses… et il a dit supprimer le cash », lance-t-elle d’emblée, soulignant l’absurdité d’une telle annonce. Pour elle, cette posture relève d’un réflexe politique bien connu : « C’était sur le ton : cassons le thermomètre pour faire tomber la température. »

« Des niveaux d'intervention plus importants que le cash »

Goulet rappelle que le cash ne représente qu’une fraction des flux illicites. « Il y a des niveaux d'intervention qui me semblent beaucoup plus importants que le cash. De toute façon, aujourd'hui les services nous disent qu'il n'y a jamais eu autant de cash en circulation. Vous avez tous les jours, Gare du Nord, des gens qui sont arrêtés avec 300 000, 200 000, 100 000 euros en cash. Ce qui prouve que quelque chose ne fonctionne pas. »

Transférer de l'argent sans mouvement bancaire visible

Les circuits de blanchiment sont aujourd’hui bien plus sophistiqués : œuvres d’art, ONG, commerce de seconde main, et surtout le système informel de la « Wallah », qui permet de transférer de l’argent sans mouvement bancaire visible. « L’argent ne bouge pas de France, mais on le retrouve partout au Moyen-Orient », explique-t-elle, pointant la complexité des réseaux transnationaux.

Elle dénonce une approche qui, sous couvert de lutte contre la criminalité, pénalise les citoyens ordinaires. « Je gagne mon argent honnêtement. Je le retire de mon compte bancaire et je le dépense comme je veux », affirme-t-elle. Avant d’ajouter : « Pour taper les réseaux criminels, il faut taper tout le monde. »

L'interdiction des « mixeurs » pointée du doigt

La sénatrice s’inquiète également des dérives sécuritaires liées à la numérisation des transactions. Elle évoque les difficultés croissantes rencontrées par les particuliers dans leurs démarches bancaires : « Vous voulez envoyer 5 000 euros à votre enfant étudiant à New York ? C’est devenu un parcours du combattant. »

Sur les cryptoactifs, elle critique l’interdiction des mixeurs, ces outils qui permettent d’anonymiser les transactions. « Interdire les mixeurs en France, c’est d’une méconnaissance absolue », tranche-t-elle. Pour illustrer leur fonctionnement, elle recourt à une métaphore culinaire : « Vous avez un œuf, vous le brouillez, vous perdez l’origine de votre œuf. » Et de conclure : « C’est l’interdiction de la vie privée, d’une certaine façon. »

« Tant qu’on n’aura pas tapé la fraude fiscale, on fera semblant »

Au lieu de s’attaquer aux symptômes, Nathalie Goulet appelle à traiter les causes. Elle rappelle que la criminalité organisée pèse 50 milliards d’euros en France, pour seulement 2 % récupérés. « Tant qu’on n’aura pas tapé la fraude fiscale, on fera semblant », déplore-t-elle.

Elle plaide pour un renforcement des contrôles à la création d’entreprise, une meilleure interconnexion des fichiers, et une action ciblée sur les flux financiers opaques. « Il faut taper à la source », insiste-t-elle.

« Il faut de la volonté politique »

Au-delà des mesures techniques, la sénatrice appelle à un sursaut démocratique. « On est en train de créer une société de surveillance », alerte-t-elle. Face à la tentation du contrôle généralisé, elle défend le droit à la vie privée et la liberté individuelle. « Il faut de la volonté politique pour s’attaquer au vrai sujet, et le reste est anecdotique. » Son intervention sur Sud Radio sonne comme un rappel : la lutte contre la criminalité doit se faire mais ne peut se faire au détriment des libertés fondamentales.

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