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La France est-elle prête à entrer en guerre ?

Alors que les services de renseignement européens alertent sur une possible confrontation directe avec la Russie, le chef d’état-major des Armées françaises, le Général Mandon, appelle la France à se préparer à un « choc » dans « 3 à 4 ans ». Derrière cette mise en garde, une question essentielle : quelle est aujourd’hui la capacité réelle de l’armée française à affronter un conflit majeur ? Effectifs, équipements, budget… état des lieux d’une armée en pleine transformation.

La France est-elle prête à entrer en guerre ?
©ALAIN-JOCARD

Lors de son audition devant la commission de la Défense de l’Assemblée nationale, le général Fabien Mandon, chef d’état-major des Armées françaises, n’a pas cherché à dramatiser inutilement. Mais a tracé un horizon clair : les forces françaises doivent anticiper un possible affrontement direct avec la Russie d’ici « 3 à 4 ans ». Selon lui, ce parallèle ne concerne pas uniquement les formes hybrides (cyberattaques, ingérences, désinformation) mais aussi la perspective d’un conflit « peut-être plus violent ».  Derrière ces mots, la question n’est plus seulement de dissuader, mais de préparer une armée capable de supporter un choc de haute intensité.

200 000 militaires actifs

Avec près de 200 000 militaires actifs et 40 000 réservistes, la France dispose aujourd’hui de la deuxième armée de l’Union européenne, derrière la Pologne mais devant l’Allemagne. Une position de choix, consolidée par une tradition d’engagement et de projection internationale. Pourtant, derrière les chiffres flatteurs, la question demeure : la France est-elle réellement prête à affronter un conflit de haute intensité ?

Les forces armées françaises s’articulent autour de trois grands corps : environ 100 000 soldats pour l’armée de Terre, 35 000 pour la Marine nationale et 38 000 pour l’armée de l’Air et de l’Espace. À ces effectifs s’ajoutent la gendarmerie, le service de santé des Armées et la direction générale de l’armement. 

La France au 7e rang mondial

Mais au-delà du nombre, la puissance d’une armée se mesure à la qualité de ses équipements et à sa capacité de réaction. À ce titre, la France reste la première puissance militaire de l’Union européenne mais loin des puissances mondiales. Dans le classement mondial établi par le site spécialisé Global Firepower, elle figure au septième rang, derrière notamment les États-Unis (1er), la Russie (2ème) ou le Royaume-Uni (6ème).

197 avions de chasse

L’avantage stratégique de la France repose sur une combinaison unique en Europe : la dissuasion nucléaire, une flotte complète et une aviation de premier plan. La Marine nationale aligne 4 sous-marins nucléaires lanceurs d’engins, 5 sous-marins d’attaque, 1 porte-avions, 15 frégates et 45 Rafale Marine. L’armée de l’Air dispose, elle, de 197 avions de chasse, dont 108 Rafale. Selon le Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI), la France dispose aujourd’hui d’environ 290 ogives, réparties entre ses sous-marins nucléaires lanceurs d’engins et ses forces aériennes.

225 chars Leclerc

Sur terre, l’armée compte 225 chars Leclerc, 79 canons Caesar, 9 lance-roquettes unitaires, 80 hélicoptères Gazelle et 69 Tigre. À première vue, ces chiffres peuvent impressionner mais sont souvent jugés insuffisants pour un conflit prolongé. En réalité, les forces françaises sont conçues pour des interventions rapides et précises, moins pour une guerre d’attrition comparable à celle menée en Ukraine.

Une trajectoire budgétaire revue à la hausse

Sur le plan financier, la France a clairement engagé une remontée en puissance. La loi de programmation militaire (LPM) 2024-2030 prévoit 413 milliards d’euros pour les forces armées, soit une hausse de 40 % par rapport au cycle précédent. Cet effort, qualifié d’« historique » par Emmanuel Macron, répond à la dégradation du contexte sécuritaire mondial, notamment depuis l’invasion de la Russie en Ukraine. Il vise à renforcer les stocks de munitions, la cyberdéfense, les capacités spatiales et les moyens de guerre électronique. 

Objectif 64 milliards en 2027

C’est dans cette logique que s’inscrit le projet de porter le budget militaire à 57,1 milliards d’euros d’ici 2026, avant d’atteindre près de 64 milliards en 2027. Cet effort représente près de 2 % du PIB, soit le minimum exigé pour les membres de l’OTAN. La France se situe donc dans la moyenne des grands pays occidentaux, mais reste loin des 4 % de la Pologne ou des 9 % de la Russie. Sur le plan mondial, la hiérarchie reste largement dominée par les États-Unis, dont le budget avoisine les 1 000 milliards de dollars en 2024. La Chine suit avec environ 314 milliards, devant la Russie, estimée à 149 milliards.  Avec ses 57 milliard d’euros de budget de Défense, la France figure donc parmi les poids lourds en Europe mais très loin des superpuissances mondiales.

Une armée opérationnelle... mais pas infaillible

Peut-on dire pour autant que la France est prête à la guerre ? Tout dépend du type de conflit envisagé. Dans un cadre limité (défense d’un allié, mission de l’OTAN, opération extérieure), l’armée française dispose de moyens crédibles et d’une méthode éprouvée. Mais dans le cas d’un affrontement prolongé contre une grande puissance, la situation serait plus complexe. Les stocks de munitions, les chaînes de production et certains segments de la maintenance restent sous tension.

La France prête à se battre mais pas seule

En définitive, la France reste l’un des piliers militaires du continent européen. Son budget en hausse, sa dissuasion nucléaire et son expérience opérationnelle la placent dans le peloton de tête mondial. Cependant, la réalité stratégique impose une nuance : seule, la France pourrait difficilement soutenir un conflit de haute intensité prolongé. Sa puissance repose autant sur la qualité de ses forces que sur son ancrage dans les alliances occidentales, notamment au sein de l’OTAN et de l’Union européenne. La France est donc prête à se battre mais pas seule. Elle possède les armes, les hommes et la méthode pour mener la guerre, à condition que celle-ci ne se transforme pas en guerre totale.

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