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Philippe Halimi : "Il y a un climat tendu et un manque de respect à l'hôpital"

Par Benjamin Jeanjean

Auteur du livre "Hôpitaux en détresse, patients en danger", le Dr Philippe Halimi, professeur de médecine à l’hôpital Georges-Pompidou (Paris), était l’invité du Grand Matin Sud Radio ce vendredi pour tirer la sonnette d’alarme.

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Alerte rouge sur l’hôpital. Ces derniers mois, nombreux ont été les témoignages d’une situation de plus en plus désespérée pour de nombreux employés du secteur hospitalier, entre harcèlement, cadences infernales et conditions de travail toujours plus compliquées. Auteur du livre Hôpitaux en détresse, patients en danger, le Dr Philippe Halimi était l’invité du Grand Matin Sud Radio ce vendredi pour en parler. "C’est une lente dégradation du système hospitalier public qui est maintenant arrivée à un stade extrêmement dangereux, la survie de l’hôpital public étant en jeu. Il y a un sentiment de malaise général que l’on observe dans tous les métiers de l’hôpital : agents hospitalier, infirmiers, médecins, cadres administratifs, etc. Ils n’en peuvent plus, ils quittent massivement l’hôpital public, ce qui génère énormément de souffrance avec bien souvent un retentissement sur la qualité de la prise en charge des patients", s’alarme-t-il.

"Bien souvent, les collègues sont associés à la démarche de mise au placard"

Ce professeur de médecine à l’hôpital Georges-Pompidou de Paris raconte par ailleurs comment ce harcèlement se matérialise. "Dans beaucoup d’établissements, il y a un harcèlement institutionnel qui se manifeste de façon très classique. On va fixer à la personne qu’on veut mettre au placard des objectifs inatteignables, et on va lui reprocher de ne pas avoir atteint ces objectifs. On ne va plus le saluer, on va lui donner peu de moyens, s’il est chirurgien on va lui diminuer l’accès au bloc tout en lui reprochant de ne pas avoir assez d’activité… Nous sommes dans un système où ceux qui dénoncent les conditions de travail à l’hôpital public sont pointés du doigt et malheureusement, bien souvent leurs collègues sont associés à la démarche de mise au placard. Il y a donc une sorte de mise en cause de ces personnes à la fois par l’administration et par leurs collègues", expose-t-il.

S’il est difficile de dater précisément le début de la dégradation de la situation à l’hôpital, Philippe Halimi a tout de même en tête deux moments bien précis. "Ça s’est aggravé depuis une dizaine d’années, et pour bien comprendre ce qu’il se passe, il faut d’abord se souvenir de la Révision Générale des Politiques Publiques (RGPP) en 2008, où on a mis en place des directeurs généraux d’établissements hospitaliers publics qui sont des financiers. Ensuite, on leur a donné les moyens avec la loi Hôpitaux, Patients, Santé, Territoires (HPST) de 2009 pour être les vrais chefs de l’entreprise qui s’appelle l’hôpital public et on a supprimé les contre-pouvoirs", dénonce-t-il.

"On n'écoute pas le personnel, on le met en permanence sous pression"

"L’hôpital devrait être un lieu d’écoute, d’attention et d’empathie envers les patients mais aussi les personnels. Les personnels en souffrance n’ont d’une part pas les moyens de prendre en charge correctement les patients, et sont d’autre part eux-mêmes en difficulté. (…) Il y a un climat tendu, un manque de respect. On n’écoute pas le personnel, on le met en permanence sous pression, et tout cela peut générer des erreurs médicales. Quand vous avez des personnels qui ont des compétences très pointues dans un domaine et qui sont en arrêt de travail, plus personne n’est alors en charge de prendre en charge certaines filières de patients", ajoute-t-il.

Enfin, Philippe Halimi plaide pour un changement d’attitude général dans l’hôpital public. "Il ne faut pas que l’hôpital ait comme seule préoccupation de générer des actes en grande quantité sans même savoir s’ils sont nécessaires voire dangereux. Sanctionner les comportements de harcèlement et de maltraitance, car actuellement ce n’est pas le cas. Et enfin traiter la racine du problème, à savoir réintroduire un équilibre des pouvoirs entre l’administration et les personnels soignants", assure-t-il.

Réécoutez en podcast toute l’interview de Philippe Halimi dans le Grand Matin Sud Radio

 

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