Lundi 12 mai, l’Assemblée nationale a entamé l’examen de deux propositions de loi sur la fin de vie. L’une vise à renforcer l’accès aux soins palliatifs, l’autre à légaliser l’aide à mourir pour les adultes majeurs atteints d’une maladie incurable, en phase avancée ou terminale.
Ces textes vont faire l’objet de débats clivants pendant deux semaines. Car si la question divise profondément les députés, un fait rare mérite d’être souligné : aucun parti n’a imposé de consigne de vote. Une liberté est laissée à chacun, au nom du caractère intime et éthique du sujet.
Des Républicains et membres de l’UDR vent debout contre le texte
À droite, l’opposition à la légalisation de l’aide à mourir est nette. Philippe Juvin, député des Hauts-de-Seine et médecin anesthésiste, s’est dit hier défavorable au projet :
« Quelle société voulons-nous construire ? Une société du soin ou une société où la compassion se résumera à fournir la mort sur demande ? », a-t-il interrogé à la tribune.
Éric Ciotti, président de l’UDR, partage cette position. Dans une tribune publiée dans Le Journal du dimanche, co-signée avec Hanane Mansouri, députée de l’Isère, il affirme :
« Une société qui légalise le suicide assisté ou l’euthanasie ne se libère pas. »
Ce texte a été signé par quinze élus, dont quatorze députés et le professeur Laurent Castillo, député européen.
Prétendant à la présidence des Républicains, Bruno Retailleau est aussi en désaccord totale avec ce texte. Le ministre de l’intérieur, en désaccord avec Catherine Vautrin, ministre de la santé, estime que « S’il était voté en l’état, il deviendrait plus facile de demander la mort que d’être soigné.»
Rassemblement National : Marine Le Pen opposée au texte, mais laisse la liberté de vote
La présidente du groupe RN à l’Assemblée, Marine Le Pen, a annoncé qu’elle voterait contre la proposition de loi sur la fin de vie.
« À titre personnel, je ne voterai pas en faveur de ce texte. », a-t-elle déclaré face à la presse. Pour autant, elle a laissé une liberté totale de vote à ses députés, soulignant la dimension intime du sujet.
À l’issue d’une réunion en marge de l’examen parlementaire, le groupe RN a rappelé sa volonté de « défendre la dignité et l’égalité d’accès à l’accompagnement », sans se prononcer unanimement contre le projet.
De son côté, le vice-président du parti, Sébastien Chenu, s’est montré plus nuancé.
« Je suis prêt à voter ce texte, à condition qu’on ne l’ouvre pas à l’euthanasie pour les mineurs, comme le veut la gauche ! », a-t-il affirmé sur le plateau de France 2 le mardi 13 mai.
À gauche, un soutien majoritaire au droit à mourir
Du côté des partis de gauche, le soutien à la légalisation de l’aide à mourir est largement partagé. La majorité des députés insistent sur la liberté de choix et le respect de la volonté des patients confrontés à des souffrances incurables.
Les Socialistes, ainsi que les Ecologistes, Insoumis et Communistes sont ainsi unanimes : la majorité des députés voteront la proposition de loi pour l’aide à mourrir.
Oceane Godard, députée de la 1ère Circonscription de la Côte-d’Or du PS, a déclaré hier : « Pour la dignité, pour la liberté d'être et d'agir, une large majorité du groupe Socialistes votera la proposition de loi pour le droit à l'aide à mourir. »
Renaissance et ses alliés divisés mais engagés
Dans les rangs de la majorité présidentielle, les positions sont plus contrastées. Si le gouvernement soutient le texte, Emmanuel Macron ayant lui-même exprimé à plusieurs reprises son souhait d’ouvrir un « droit à mourir dans la dignité », les députés Renaissance, MoDem et Horizons ne votent pas en bloc.
Le rapporteur du deuxième texte, Olivier Falorni (groupe MoDem), a défendu avec force l’idée d’un recours possible à l’aide à mourir :
« Oui, il y a encore pire que la mort, quand la vie n'est devenue qu'une inexorable agonie », a-t-il déclaré, estimant que ce dispositif doit rester « un ultime recours » pour les patients.
Lundi dernier, Emmanuel Macron a réaffirmé son soutien à cette évolution sociétale, estimant que le débat ne devait pas se limiter à une opposition binaire entre la vie et la mort, mais plutôt interroger ce qui constitue, dans certaines situations, le moindre mal.
Les députés doivent désormais se pencher sur 3 081 amendements pendant les débats. À l'issue de ces discussions, deux votes solennels auront lieu, un pour chaque proposition de loi. Le vote final sur ces textes est prévu pour le 27 mai, et marquera un moment clé dans ce débat de société profondément clivant.