single.php

Élisabeth Lévy:"Abdeslam est un sans grade du djihadisme qui essaye de se présenter à son avantage"

Au procès des attentats du 13 décembre, Salah Abdeslam brise le silence.

Au procès des attentats du 13 décembre, Salah Abdeslam brise le silence.

C’est ce qu’espéraient les parties civiles, venues en grand nombre. Mardi, Mohamed Abrini avait prétendu qu’Abdeslam l’avait remplacé au pied levé parce que lui-même avait renoncé. Les parties civiles attendaient donc sa version. Mais dès le début, malgré l’insistance du président, il se mure dans le silence. Le représentant du Parquet antiterroriste ne réussit pas non plus à le faire parler.

C’est une avocate du partie civile qui le fait craquer. Claire Josserand-Schmidt la joue presque complice, elle rappelle qu'il lui avait promis de lui répondre, elle lui rappelle sa fiancé, comme si elle parlait à un ami un peu entêté. Elle lui dit qu’il y a des sensibilités différentes sur le banc des parties civiles, que ses clients veulent comprendre, qu’ils ne recherchent pas la vengeance. Bref, elle la joue « vous n’aurez pas ma haine ». Et le fait effectivement parler. Une fois de plus, il se présente presque comme une victime mais explique que, contrairement à ce qu’il a a dit à ses copains en Belgique, il a choisi de ne pas faire sauter sa ceinture. Elle conclut ses propos en le remerciant de ses paroles, ce qui enrage ses confrères : "je vous remercie de rien du tout" a lancé l'un des avocats.

Mais au moins elle a réussi à le faire parler 

Mais il n’a rien dit de nouveau. Il n'a fait que confirmer ce qu’il avait déjà dit le 9 février, à savoir que c’est volontairement qu’il n’avait pas actionné sa ceinture d’explosifs. Sauf qu’il prétend que ce n’est ni par lâcheté, ni par peur mais parce qu’il ne voulait pas tuer. Comme c'est touchant ! 

Le journaliste du Monde, qui croit au père Noel et à la Rédemption, écrit cette phrase ahurissante : le miracle a eu lieu. Un miracle ? Parce qu’une avocate s’est fait trimballer par un assassin ? 

Cette séquence qui a ulcéré nombre des parties civiles illustre l’aporie d’un tel procès. Certes, il peut permettre de connaître le déroulement des faits et de définir les responsabilités de chacun et nous aussi fournir des éléments précieux pour la connaissance de l’idéologie de nos ennemis. Mais croire qu’il va permettre aux familles endeuillées de comprendre - parce que finalement nous sommes tous humains - c’est une illusion perverse. Imagine-t-on un avocat dire à Eichmann avec des trémolos: vous m’aviez promis de parler ? Le remercier pour ses paroles ? Certes, Abdeslam n’est pas Eichmann, juste un sans grade du djihadisme qui essaye de se présenter à son avantage. Non, jamais des familles ne comprendront pourquoi on leur a pris un enfant, un frère, une sœur, un mari ou une femme. Il y a dans le mal un mystère, un noyau qui échappe à la raison. Et c’est précisément notre incapacité à comprendre qui fait de nous des humains. 

L'info en continu
16H
15H
14H
13H
12H
Revenir
au direct

À Suivre
/