La cour criminelle de l'Hérault a condamné jeudi à huit années de prison le chauffard conduisant sans permis qui avait mortellement fauché Aymen, 13 ans, en marge de la dernière Coupe du monde de football, un verdict qui a profondément déçu la famille de l'adolescent.
"L'avocat général avait proposé 12 ans, mais malheureusement la cour n'a retenu que huit" années, a réagi après le verdict Saïd, le frère aîné du jeune homme.
"Nous sommes déçus par la décision. C'est une douleur qui se rajoute à celle que nous avons déjà. La justice a fait son travail et a décidé comme il le fallait, d'après elle, mais malheureusement, on n'est pas satisfaits", a-t-il ajouté.
Après une heure et demie de délibéré, la cour criminelle a reconnu William C., 23 ans, coupable de "violences volontaires avec arme ayant entraîné la mort sans intention de la donner", écartant la légitime défense.
"Huit ans, pour des faits aussi grave, avec au bout la mort d'un enfant, c'est beaucoup trop peu. Et je ne suis pas sûr que ça conduise à une forme d'apaisement, notamment dans le quartier de la Paillade", dans la banlieue de Montpellier, où le drame s'était déroulé, a réagi l'avocat de la famille d'Aymen, Marc Gallix.
Dans son réquisitoire, l'avocat général, Robert Bartoletti, avait réclamé une peine de 12 années de réclusion criminelle, alors que William C. encourait jusqu'à 20 ans de prison.
- "Drame absolu" -
"C'est pas la faute à pas de chance, c'est la faute uniquement à son comportement", avait estimé le représentant du ministère public, en évoquant le "drame absolu" de la perte d'un enfant.
"Les magistrats ont tenté de trouver un juste équilibre entre la personnalité de l'accusé et les souffrances des parties civiles", a réagi après le jugement l'un des avocats de l'accusé, Mikaël d'Alimonte.
Le 14 décembre 2022, des dizaines de supporters arborant le drapeau marocain étaient descendus dans les rues du quartier de La Mosson/Paillade à Montpellier, à l'issue de la demi-finale remportée 2-0 par la France contre le Maroc.
Au même moment, William C., alors âgé de 20 ans et qui n'avait pas le permis de conduire, a décidé d'aller fêter la victoire de la France avec la voiture de sa mère, drapeau tricolore accroché à la portière.
Le jeune homme, illettré et sans emploi, s'était retrouvé bloqué à proximité des supporters du Maroc, qui le chahutent et arrachent son drapeau français.
Il démarre alors en trombe, effectue un demi-tour sur les voies du tramway où se trouvent des dizaines de personnes et en percute trois, dont Aymen, qui mourra peu après, et en blesse légèrement un autre.
Jeudi, il a réaffirmé que, pour lui, c'était un "accident", mettant son geste sur le compte de la panique.
"Vous pensez que ça va se passer comment, qu'on va sortir et boire le thé ensemble?", avait lancé son autre avocat, Jean-Baptiste Mousset, en réponse à l'avocat-général, qui avait estimé que William C. n'avait jamais été réellement en danger ce soir-là.
- "Cela ne nous rendra pas Aymen" -
"Je le reconnais, je suis coupable, mais j'ai essayé de faire mon possible pour ne pas faire de mal. Je demande de me pardonner, excusez-moi, pardon, pardon...", a répété l'accusé en s'adressant à la famille depuis son box.
"Nous entendons que ce sont des excuses sincères, qu'il regrette vraiment. Ça n'excuse pas l'acte, ça ne nous ramènera pas le petit frère, mais ça nous touche", a répondu Saïd lorsqu'il a été entendu par la cour.
À la tête d'un snack situé à proximité du drame, il s'était rendu immédiatement sur les lieux, en compagnie de son père. "Un ambulancier essaie de lui faire un massage cardiaque. Malheureusement, il est mort dans les bras de mon père", avait ajouté le grand frère.
Le décès du jeune homme avait endeuillé Montpellier et un millier de personnes avaient défilé, roses blanches à la main, pour rendre hommage à l'adolescent. Sa mort avait aussi provoqué des échauffourées dans le quartier de la Mosson.
Par Philippe SIUBERSKI / Montpellier (France) (AFP) / © 2025 AFP