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Le shutdown américain vient rappeler l'inutilité de la fameuse règle d'or budgétaire

Aux États-Unis, l'administration a dû fermer parce que le plafond de la dette avait été atteint. Preuve qu'instaurer une règle d'or budgétaire ne serait pas suffisant pour imposer la rigueur.

 

C’est le nom qu’on donne à ce que je pourrais appeler les spasmes budgétaires américains. Cette expression américaine est brusquement revenue à la mode. Brusquement, l'Etat ferme boutique, l'administration baisse le rideau. Revenez un autre jour, le budget fédéral ne paie plus, ni les fonctionnaires, en chômage technique, ni le chauffage, ni le loyer. Il ne règle que quelques dépenses d'urgence, ce qui est prioritaire et absolument nécessaire à la vie du pays. 

Le reste s’arrête parce qu’au Congrès, il n’y a pas de majorité pour voter le budget et repousser ce qu’on appelle le plafond de la dette.

En général, après, on rembourse les fonctionnaires, mais il n’y a pas de garantie. Et en attendant, ça coûte cher au pays.

Il y a, pour nous Européens, quelque chose d’absolument invraisemblable à voir tout s’arrêter.

C’est une histoire de plafond. Quand on dépasse le plafond, il faut en voter un autre. En attendant, plus d’argent.

Ça devrait être une leçon pour tous ceux qui croient à cette vieille histoire de règle d’or, c’est-à-dire de plafond légal qu’on impose au budget et aux dépenses publiques.

Cette règle d’or est une vieille chimère. On inscrit dans la Constitution, dans un Traité, que l’État n’a pas le droit de dépasser un plafond de dépenses et et dette.

Quand le plafond est atteint, l’État est obligé de stopper ses dépenses. Ou alors, prévoyant que le plafond s’approche, de présenter un budget qui soit nettement en-dessous du plafond.

C’était le grand débat des années 2000 en Europe. Finalement, en 2011, on a signé le pacte budgétaire qui contient une sorte de règle d’or, qui fixe le déficit structurel à moins de 0,5 % du PIB.

Tout ça est verrouillé en France par une loi organique, mais le déficit structurel, qui serait le déficit corrigé de la conjoncture, personne ne sait vraiment comment le calculer.

C’est un objectif à moyen terme, qui tient compte des circonstances exceptionnelles. Mais même à circonstances exceptionnelles, si vous dépassez les 0,5 %, vous devez être tenu de respecter les fameux 3 % de déficit.

Ce 0,5 % est contraignant sans l’être, mais qu’aurait-on fait, par exemple, en 2008, avec ces règles ? Nous n’aurions pas pu intervenir pour sauver le système bancaire, tout se serait écroulé et il y a fort à parier que le déficit aurait été bien supérieur à ce que fixent les textes.

Tout le monde sait que c’est une sorte d’impasse, on le voit bien aux États-Unis. Ça dure quelques jours, voire quelques semaines, mais après, il faut bien recommencer. Donc il faut, de toute façon, repousser le plafond.

Mais il y a une tentation, toujours la même, de mettre un plafond dans la Constitution pour avoir l’air rigoureux. Notamment pendant les élections, on a eu ce débat sous-jacent.

Mais encore une fois, que fait-on une fois arrivé au plafond ? On ferme, mais ça coûte cher, parce qu’un service public, malgré tout, c’est utile. Quand ça s’arrête, ça va coûter plusieurs milliards de dollars aux Américains et si ça dure, ça va leur coûter encore plus.

Au mieux, ça dure quelques jours et on vote un nouveau plafond, ou alors c’est le chaos.

Fermer brutalement le robinet ne fait pas des États-Unis un modèle de gestion des finances publiques. Avec 20 000 milliards de dollars de dette.

Ça ne sert à rien qu’à mettre du désordre et à créer l’illusion d’une rigueur budgétaire qui, en réalité, n’existe pas. On se paie une crise pour rien, qui coûte cher, et on finit par repousser les plafonds.

Écoutez la chronique d'Henri Guaino dans le Grand Matin Sud Radio, présenté par Patrick Roger et Sophie Gaillard

 

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