Narcotrafic, dépénalisation éventuelle du cannabis, fermeté pénale, mais aussi prospective, retraites, budget et service militaire volontaire. Au micro de Sud Radio, Clément Beaune a répondu aux questions de Maxime Lledo.
"Ce n'est pas du tout le moment d'avoir un débat sur la légalisation du cannabis"
Maxime Lledo pour Sud Radio : Quand on voit les milliards générés par le narcotrafic et les centaines de milliers de consommateurs, faut-il envisager de légaliser ou dépénaliser certaines drogues ?
Clément Beaune : “Il ne faut y avoir aucune naïveté. On ne va pas résoudre un débat qui nécessite une réponse pénale, une réponse policière, une sanction extrêmement ferme face au drame qu’on a vécu en disant qu’on laisse tomber, qu’on est en quelque sorte défaitiste et qu’on va tous les légaliser.”
Sur les drogues dures, notamment la cocaïne dont la consommation explose, peut-il y avoir un débat ?
“Sur les drogues dures, cocaïne qui explose, il n’y a aucun débat même à avoir sur une quelconque légalisation.”
Les autorités ont saisi 47 tonnes de cocaïne l’an dernier. Que vous inspire ce chiffre ?
“C’est ça qui augmente sans doute le plus et c’est ça qui fait l’objet de trafic international. La question du cannabis est très spécifique mais tant que la loi est celle-ci, c’est-à-dire interdiction, elle doit être appliquée. C’est la plus mauvaise période pour avoir ce débat sur légalisation. Quand on voit le drame qui s’est passé encore à Marseille avec cette famille de nouveau endeuillée, avec quelqu’un qui n’avait rien à voir avec le trafic de drogue, on doit rien lâcher dessus.”
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À moyen ou long terme, faudra-t-il malgré tout ouvrir ce débat ?
“Oui, il faudra le mener.”
Ce débat doit-il être mené à l’échelle européenne plutôt qu’au niveau national ?
“Je pense que c’est un débat qu’on doit avoir au niveau européen. Quand un pays légalise ou dépénalise et que le pays d’à côté a des sanctions plus dures, il y a une concentration des consommateurs avec des phénomènes qu’on a vus aux Pays-Bas qui les ont fait reculer.”
Quelle est votre position personnelle sur l’avenir du cannabis en France ?
“On a une forme de chance : l’Allemagne, un grand pays, a changé sa législation. Si ça améliore les choses, si ça lutte contre les trafics, si ça améliore la santé publique, si ça réduit cette hydre financée avec des milliards d’euros de trafic, ouvrons le débat chez nous. Dépénalisation, pas légalisation.”
Et si l’expérience allemande se révèle contre-productive ?
“Si cette expérience est mauvaise, si elle renforce les trafics, si elle dégrade la santé publique, si elle concentre la consommation, alors gardons et durcissons encore peut-être même notre législation.”
"Regardons scientifiquement les pratiques européennes"
Certains experts disent que la France a ignoré le narcotrafic pendant trente ans. Partagez-vous ce constat ?
“Non je ne crois pas. Je voudrais penser aux proches et à la famille Kessaci parce que c’est d’abord un drame. En France, il y a eu des actions de différents gouvernements mais qui ont été beaucoup renforcées, notamment à Marseille, ces dernières années, avec un nombre de démantèlements de points de deal.”
Ces actions suffisent-elles face à l’ampleur prise par les réseaux ?
“C’est un combat qui va être long, qui va être difficile. Nous sommes des cibles de trafics internationaux avec des milliards d’euros en jeu. Il faut à la fois la fermeté locale, démonter des filières, des points de deal, emprisonner, sanctionner, et en même temps la coopération internationale, aller à la source.”
L’action publique progresse-t-elle malgré la gravité de la situation ?
“Il n’y a pas de baguette magique mais il y a une action déterminée. Le pilonnage des points de deal, les emprisonnements et les sanctions ont augmenté.”
Retraites : "Nous aurons besoin de travailler au long de la vie plus longtemps"
La réforme des retraites fait à nouveau débat au Parlement. Pourquoi ce sujet revient-il constamment ?
“Nous avons publié une note sur les retraites qui montre qu’on est encore, même si on appliquait toute la réforme Borne de 2023, trois ans en dessous de la moyenne des pays européens en âge de départ.”
Cela signifie-t-il que les Français devront travailler plus longtemps ?
“La réalité va nous rattraper : nous aurons de toute façon besoin de travailler au long de la vie plus longtemps. Sinon on produira moins ou on financera moins notre modèle social.”
Retraites : "Même si l'on appliquait la réforme Borne, nous serions encore trois ans en dessous de la moyenne européenne. La réalité nous rattrapera : nous aurons besoin de travailler plus longtemps !" affirme @CBeaune #GrandMatin
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Vers quel modèle faudrait-il aller selon vous ?
“Je suis séduit par certaines propositions évoquées par Gabriel Attal, notamment les points et la question de donner plus de liberté.”
Une retraite à points pourrait-elle remplacer l’âge pivot ?
“Une retraite à points, jouée sur la durée de cotisation, avec potentiellement une suppression de l’âge pivot.”
Pourquoi maintenir malgré tout une référence d’âge ?
“Parce qu’il est une forme de référence pour les employeurs et les salariés pour savoir à quel âge on part, calculer ses recrutements ou ses durées de cotisation.”
Comment accompagner la fin de carrière ?
“Il faut repenser la dernière période de la vie active : retraites progressives, 90 % du temps de travail, 80 %, plus de télétravail.”
Quand paraîtra le rapport complet du Plan ?
“Premier semestre 2026.”
"Je suis favorable à un service militaire volontaire ou à un service civique généralisé"
Le chef d’état-major a évoqué la possibilité de “perdre ses enfants” dans un conflit. Comment interprétez-vous cet avertissement ?
“Il a alerté sur une menace russe très violente. Il a raison de le dire tel que c’est la réalité. Ce n’est pas dire qu’on est en guerre demain matin mais qu’il faut se préparer.”
Le contexte actuel justifie-t-il un retour à une forme de service national ?
“On a travaillé là-dessus. Je suis favorable à un service militaire volontaire ou à un service civique généralisé.”
Faut-il rendre cet engagement obligatoire ?
“Un service civique pourrait être obligatoire pour tous, avec une variante militaire volontaire.”
Quel serait le coût d’une telle réforme ?
“Entre 1 et 5 milliards d’euros par an.”
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