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Walter Benjamin : "Ma première réaction, c'est que ma vie est foutue"

Par Benjamin Jeanjean

Rescapé de l’attentat de Bruxelles du 22 mars 2016, Walter Benjamin raconte son expérience dans un livre, J’ai vu la mort en face. Il était l’invité du Grand Matin Sud Radio ce mardi.

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Quelques mois à peine après les attentats du 13 novembre à Paris, Bruxelles était elle aussi frappée par le terrorisme le 22 mars 2016 à l’aéroport de Zaventem. Rescapé de cet attentat, Walter Benjamin a décrit son expérience vécue ces jours-là et dans les mois qui suivirent dans un ouvrage intitulé J’ai vu la mort en face. Une expérience sur laquelle il est une nouvelle fois revenu ce mardi au micro du Grand Matin Sud Radio.

"Je partais voir ma fille qui habite avec sa mère en Israël. J’arrive pour l’enregistrement, et il y a eu une première explosion dans la première partie du terminal. Je ne me rends pas compte directement qu’il s’agit d’un attentat. Neuf secondes après, à trois mètres de moi, un deuxième terroriste se fait exploser avec une ceinture explosive et une valise remplie de TATP. J’ai été projeté en arrière et je me suis retrouvé au sol. Ma jambe a été arrachée, elle est en face de moi à quelques mètres. La deuxième jambe a un gros trou dedans, j’ai des clous dans la tête, je vois une tête arrachée qui passe au-dessus de moi, une dame est morte à côté de moi… Bref, c’est une scène de guerre à Bruxelles, en Europe ! Il y a des cadavres, des gens brûlés, des corps déchiquetés", décrit-il.

"Je n’avais plus qu'un ou deux litres de sang dans le corps"

"Ma première réaction, c’est que ma vie est foutue ! Je pensais que c’était un cauchemar, je ferme les yeux à plusieurs reprises et je réalise que non, c’est bien réel. Je revois le sang, les lambeaux de chair… On a très mal, mais à ce moment-là, comme on a été blessé physiquement, il se passe quelque chose dans le cerveau. Finalement, le choc atténue la douleur. (…) La mort m’appelait. Je perdais le contrôle de mon corps, je n’étais plus capable de faire des choses. J’ai refusé cette mort parce que j’avais constamment en tête l’image de ma fille. Je ne voulais pas mourir, pour elle. J’ai tenu très longtemps parce que j’ai été admis aux urgences à 9h41 du matin, presque deux heures après. Je suis arrivé comme ont dit les urgentistes en état de quasi-mort clinique, je n’avais plus que 1 ou 2 litres de sang dans le corps. Ça a été une grosse opération", ajoute-t-il.

Walter Benjamin raconte également le long processus de rééducation physique mais aussi mentale à l’hôpital. "À la fin de la journée, je me suis retrouvé en soins intensifs. J’avais une vue sur tout Bruxelles, j’étais très triste car on avait semé la mort dans ma ville, la capitale de l’Europe. Je réalise ce qui m’est arrivé : un attentat. J’ai deux solutions : ou je me laisse sombrer, et c’est terminé, ou je me relève. La première chose que je fais, c’est de demander aux médecins si je vais remarcher. Ils m’ont dit oui, mais la question qui se posait, c’était de savoir si je pourrais garder ma deuxième jambe fortement endommagée. Cela a duré deux mois. (…) C’est une leçon de vie, et à l’hôpital j’ai découvert un monde que je ne connaissais pas. Tous les jours je me levais pour aller dans cette salle de revalidation et je boostais moi-même les autres patients qui étaient là. Ils étaient contents de me voir, jusqu’au jour où le médecin lui-même m’a demandé d’aller voir des patients dans leur chambre. J’ai alors compris ce qu’il se passait : il y a un effet miroir, car même si l’on est un bon psy, on ne peut pas comprendre", explique-t-il.

Réécoutez en podcast l’interview de Walter Benjamin dans le Grand Matin Sud Radio

 

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