Retranscription des premières minutes :
- Sud Radio, les clés d'une vie, Jacques Pessis.
- Les clés d'une vie, celles de mon invité.
- Le soleil du Sénégal a marqué le début de votre rayonnement international.
- Vous avez écrit des pièces qui ont été transformées en billets.
- Ceux de théâtre qui, des deux côtés de l'Atlantique, vous ont valu des vagues d'applaudissements.
- Vous déboutez aujourd'hui une carrière de romancier.
- Bonjour Pierre Laville.
- Bonjour Jacques Pessis.
- Alors, on vous connaît, on connaît votre nom, moins votre parcours, car vous avez fait des pièces de théâtre connues dans le monde entier.
- On va en parler.
- Et puis, il y a vos débuts de romancier avec ce livre, La guerre les avait jetés lâches, chez Robert Laffont, qu'on va évoquer aussi.
- C'est le principe des clés d'une vie.
- Et le principe, c'est aussi des dates.
- Et la première que j'ai trouvée, c'est le 1er avril 1966.
- C'est là où débute, à Dakar, le premier festival mondial des arts nègres.
- Et ça, je crois que vous êtes très lié à cette date.
- Vous avez parfaitement raison.
- C'est une date qui marque mon véritable...
- ma véritable entrée dans le théâtre.
- Parce que jusque-là, j'avais, pour des raisons de formation, de formation de famille aussi, été enseignant à l'université uniquement.
- J'étais docteur en droit, etc.
- Enfin bref, j'enseignais le droit.
- Et comme il y avait une opportunité d'aller exercer cette activité en Afrique, par curiosité, j'étais parti au Sénégal, où je suis resté deux ans.
- Et là, rencontre par hasard, dans une rue, ou plus exactement, sur le chemin qui longeait la côte de l'océan, deux personnes titubantes de fatigue et de chaleur me croisent.
- J'étais seul sur deux kilomètres.
- On se bouscule presque comme des gens solitaires sur le même chemin.
- C'était Aimé Césaire et Jean-Marie Serrault.
- Voilà.
- Il se trouve que ce festival mondial des arts nègres à Dakar, ça faisait cinq ans qu'il devait être organisé.
- C'est la première fois sur le sol africain qu'on voulait montrer la culture africaine.
- Et je crois que c'est Léopold Senghor qui avait voulu ce festival.
- Absolument.
- C'était même l'illustration, disait-il, je vais incarner la négritude.
- C'était sa phrase courante.
- J'ai bien connu, évidemment.
- Son meilleur ami s'appelait Aimé Césaire, c'est-à-dire la première décision de programmation que Senghor a prise pour le festival a été de programmer la pièce la plus connue d'Aimé Césaire, La Tragédie du Roi Christophe, que Jean-Marie Serrault avait mis en scène à l'Odéon à Paris et qui était un succès international.
- Donc, Serrault et Césaire venaient négocier la présentation de La Tragédie du Roi Christophe dans le cadre du Festival des Arts Nègres, qui allait réunir tous les grands interprètes noirs dans le monde entier.
- Et Césaire avait fait une belle pièce, mais ça dépassait largement tout cela.
- Le festival, porté surtout sur les arts graphiques, sur la musique, sur le théâtre, évidemment, mais surtout la chanson.
- Il y avait Mariam Makeba, il y avait Paul Robeson.
- Il y avait énormément de grands noms de cette époque là.
- Et le festival a été un événement tout à fait considérable.
- C'était la première fois que la culture africaine se manifestait de manière cohérente et de manière exemplaire.
- Parce que le monde entier est venu là.
- L'inauguration s'est faite avec l'empereur Haïd El-Selassié, qui tenait la main de Malraux, qui tenait la main de Senghor, etc.
- Vous voyez, le tout monde entier était là, comme on aurait pu dire, quand tout Paris était présent à une générale de théâtre.
- Alors, à cette époque là, effectivement, vous dirigez, Pierre Laville, l'École nationale d'économie appliquée, qui forme des cadres de haut niveau.
- Oui, pardon, je ne m'en excuse pas.
- Ce furent des années magnifiques.
- Mais ma formation était, j'étais un économiste, un juriste, donc.
- Et j'étais parti en Afrique pour enseigner et être conseiller du président du conseil de l'époque, de là-bas, Mamadou Dia, pour les questions économiques.
- Donc, je me suis trouvé, et parallèlement, c'est pour ça que je l'indique aussi, depuis que je suis tout petit, inexplicablement originaire du Sud-Ouest et dans un endroit totalement perdu et loin de tout théâtre, j'étais fou de théâtre et passionné de théâtre.
- Mais comme à l'époque, dans ces années là, on ne faisait...
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