Budget de la Sécurité sociale, compromis politique, position du groupe socialiste, rapport de force à l’Assemblée nationale, débat sur la laïcité et polémique autour de Brigitte Macron. Au micro de Sud Radio, Jérôme Guedj, député PS de l'Essonne, a répondu aux questions de Jean-François Achilli.
"Je n’ai pas le compromis honteux. Ce n’est pas un texte idéal mais nous pouvons le voter"
Jean-François Achilli : Ça passe ou ça casse à 18h30 à l’Assemblée nationale ? François Hollande dit que la meilleure façon de faire passer ce budget, c’est le 49.3. Êtes-vous d’accord ?
Jérôme Guedj : “Je ne suis pas certain qu’il parlait du budget de la Sécurité sociale. Je pense que le travail de compromis dans lequel nous sommes rentrés sincèrement depuis la nomination de Sébastien Lecornu, et moi je l’assume, je n’ai pas le compromis honteux ou la négociation honteuse, il a permis d’avancer sur ce texte. Ce n’est pas un texte socialiste, ce n’est pas un texte macroniste, ce n’est pas le texte idéal, mais on a fait la démonstration qu’on pouvait se parler sur un sujet crucial. On est arrivé à un point qui permet, et c’est la position que le groupe socialiste a prise hier, de voter le texte.”
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Olivier Faure appelle les députés socialistes à voter le budget de la Sécu. Y a-t-il un doute dans vos rangs ?
“On a eu la discussion, ça va être serré ce soir. Mais ça va être serré du fait de ceux qui font autre chose que se préoccuper du budget de la Sécurité sociale. Ceux qui s’y opposent le font pour des arrière-pensées. Certains veulent que le gouvernement tombe, qu’il y ait une dissolution, une présidentielle, c’est le RN ou la France insoumise. Et puis il y a ceux du Socle commun qui ont laissé penser qu’ils avaient d’autres préoccupations que de savoir si on a un budget acceptable pour l’an prochain.”
En voulez-vous à Édouard Philippe, qui appelle à l’abstention ?
“Je ne comprends pas trop ce à quoi il joue. Il propose quoi derrière ? Ils ont des membres au gouvernement. Et c’est Sébastien Lecornu qui, dans son discours de politique générale, a annoncé qu’il mettrait sur la table une suspension de la réforme des retraites. À ce moment-là, il fallait dire qu’on ne participait pas à ce gouvernement. Ils sont toujours au gouvernement.”
En cas d’échec, Sébastien Lecornu doit-il démissionner ?
“Je ne me place pas dans cette hypothèse parce que ce serait d’abord pas de budget pour le pays. S’il n’y a pas de budget de la Sécurité sociale, on a un déficit de 30 milliards d’euros, et des gens vont dire ‘regardez ce déficit, il faut passer à autre chose, les assurances privées’. Je suis trop attaché à la Sécurité sociale pour laisser des apprentis sorciers la laisser filer.”
Ce compromis parlementaire, est-ce un tournant ?
“On a réussi à trouver un chemin de compromis. Ce qu’on a fait ces derniers jours va nous servir pour la suite de la vie politique. C’est une forme de reparlémentarisation dans un pays où il n’y aura pas durablement de majorité. J’assume cet apprentissage et le fait d’avoir recherché ce compromis.”
“Considérations boutiquières” : vous maintenez ?
“Dire qu’on a cherché à appâter les ultramarins avec 100 millions d’euros est une lecture réductrice. Il y a des moyens pour renforcer l’investissement hospitalier dans les territoires ultramarins. C’était nécessaire.”
Les écologistes ont voté contre vendredi : cohérence ?
“Ce sont des gens rationnels et intelligents. Ils ont milité avec nous pour obtenir des moyens supplémentaires pour l’hôpital. On a combattu ensemble le doublement des franchises médicales. Le gouvernement a renoncé. Dans le compromis, chacun a fait des efforts. Je leur dis merci. Nos concitoyens en ont ras le bol de l’impression d’immaturité du débat parlementaire.”
"Sur le budget de l'État, il faudra que le Premier ministre se pose la question du 49.3"
Dans 15 jours aura lieu le vote définitif du budget de l’État. Que va-t-il se passer ?
“Sur le budget de l’État, le chemin est plus compliqué. Je préférerais qu’on arrive à construire un compromis comparable à celui de la Sécurité sociale. Sinon, je n’ai pas envie de partir dans une loi spéciale en janvier ou février, c’est anxiogène. Il faudra que le Premier ministre se pose la question du 49-3.”
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Vous aviez anticipé cette séquence dès juillet ?
“En juillet, il y avait deux jours fériés supplémentaires envisagés, une réforme de l’assurance chômage, le doublement des franchises, la mise à contribution des tickets restaurant ou des chèques vacances. Beaucoup, sur plusieurs bancs, s’y sont opposés. Et dans le même temps, d’autres ont dit qu’il fallait dégager des moyens supplémentaires pour l’hôpital. On a trouvé un compromis.”
Ce “training du compromis”, est-ce utile pour l’avenir ?
“Je l’espère. On aurait dû le faire plus tôt, dès 2022. Ce qu’on fait là servira probablement au-delà de 2027.”
"Nous avons un désaccord à gauche sur la laïcité"
Brigitte Macron aurait qualifié des militantes de “salconne”. Une première dame peut-elle dire cela ?
“Le problème, c’est que ce n’est pas privé puisque c’est capté. Il est toujours mieux de s’abstenir de paroles aussi dures envers des militants. On peut être d’accord ou pas avec la manière dont les gens s’engagent, mais chacun a le droit d’exprimer ses positions. Je trouve que cela ne participe pas de la désescalade du débat public. Je n’aime pas la crispation.”
Ces militantes ont interrompu un spectacle : un mot ?
“On peut contester les modalités, mais je me place sur la question des principes. L’engagement doit toujours être respecté.”
Le RN veut rouvrir les maisons closes. Votre réaction ?
“Dans leur palette, il manquait une forme de populisme sexuel. C’est l’idée selon laquelle c’était mieux avant. On va organiser des maisons closes, mais ça reste un système de domination sur les femmes. La prostitution, avec les conséquences que ça a, enferme des femmes. Je ne considère pas que ce soit le progrès humain. Parlons prévention, santé publique, lutte contre les trafics humains, protection des femmes, plutôt que banalisation.”
Vous proposez un défenseur de la laïcité. Pourquoi ?
“J’ai voulu lancer un signal d’alerte. On parle beaucoup de laïcité mais on ne fait pas assez connaître ce qu’elle est réellement : une loi de protection. Mon immense regret, c’est le silence assourdissant autour du 120e anniversaire de la loi de 1905.”
Vous évoquez un manque de pilotage public. À quel niveau ?
“Le comité interministériel de la laïcité ne s’est pas réuni depuis 4 ans. Cela veut dire que ce n’est pas une politique entretenue. Il faut former 100 % des fonctionnaires à ce qu’est et n’est pas la laïcité.”
Le désaccord avec LFI est profond ?
“Il y a un sujet avec ceux qui relativisent le caractère protecteur de la laïcité. La loi de 1905 protège. Revenons à Aristide Briand. Évitons l’ingérence du religieux qui mine le pacte républicain.”
Donc sans LFI ?
“Nous avons un désaccord sur la centralité de l’universalisme républicain et de la question de la laïcité.”
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