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ArcelorMittal : "Appeler à la nationalisation, c’est un réflexe pavlovien" affirme Marc Ferracci

Par Aurélie Giraud

Marc Ferracci, ministre chargé de l’Industrie et de l'Énergie, était “L’invité politique” sur Sud Radio.

Marc Ferracci ArcelorMittal
Marc Ferracci, interviewé par Jean-Jacques Bourdin sur Sud Radio, le 5 mai 2025, dans “L’invité politique”

Avenir d'ArcelorMittal, industrie, énergie, grèves, autoroutes, dette publique : Marc Ferracci a répondu aux questions de Jean-Jacques Bourdin.

ArcelorMittal : "Appeler à la tutelle ou à la nationalisation, c’est un réflexe pavlovien"

Interrogé par Jean-Jacques Bourdin sur la proposition socialiste de mise sous tutelle provisoire du site ArcelorMittal de Dunkerque, Marc Ferracci estime que "ce n’est pas la bonne solution dès lors qu’il existe des solutions industrielles". "Je ne me situe pas dans l’option où les travaux de décarbonation n’auraient pas lieu à ArcelorMittal", affirme-t-il. Pour lui, la priorité est de créer les conditions nécessaires à l’investissement.

Quant à une éventuelle nationalisation d'ArcelorMittal, il juge la proposition excessive. "Appeler à la tutelle ou à la nationalisation comme certains le font, c’est un réflexe un petit peu pavlovien." Il rappelle également les implications financières : "ArcelorMittal, c’est 22 milliards d’euros de capitalisation. Donc racheter Arcelor, ou racheter ne serait-ce que la moitié des parts d’Arcelor, c’est avec l’argent des Français. Je pense qu’il y a de meilleurs usages de l’argent des Français."

"L’acier européen fait face à une concurrence déloyale de l’acier chinois"

Marc Ferracci explique que l’une des raisons de la suspension de l’investissement d'ArcelorMittal à Dunkerque est la pression exercée par les importations massives d’acier chinois. "Aujourd’hui, l’acier européen est en difficulté parce qu’il fait face à une concurrence déloyale de l’acier chinois." Selon lui, cet acier est "massivement subventionné" et entre "de manière trop significative en Europe".

Le ministre rappelle que des mesures ont été prises au 1er avril 2025, et que la France demande davantage. "Nous poussons pour plus de protection commerciale, avec des droits de douane plus élevés et des quotas d’importation." Il évoque aussi une mesure européenne à venir. "Il y a une taxation carbone aux frontières qui va rentrer en vigueur au 1er janvier 2026 et que nous proposons de renforcer." Le ministre affirme travailler en coordination avec Bruxelles. "J’ai moi-même créé une alliance de l’industrie lourde pour mettre de la pression sur la Commission."

"Nous devons sortir d’une forme de soumission aux énergies fossiles"

En matière énergétique, Marc Ferracci défend la stratégie gouvernementale visant à "sortir d’une forme de soumission aux énergies fossiles". Il rappelle que la France importe 60% de son énergie, ce qui représente "70 milliards d’euros par an", et "70 milliards de plus" en cas de crise géopolitique comme celle déclenchée par la Russie.

Le ministre défend un mix énergétique équilibré, combinant nucléaire et renouvelables. "Il ne faut pas opposer les deux". Il rappelle que six nouveaux réacteurs EPR sont en cours de planification, avec une entrée en service du premier prévue en 2038. La décision sur huit réacteurs supplémentaires sera prise "en 2026". Concernant la part des énergies renouvelables, il reste prudent : "Peut-être qu’il y aura des évolutions" à l’issue du débat parlementaire en cours.

"Nous devons investir dans l’hydroélectrique pour renforcer les barrages existants"

Sur l’hydroélectricité, Marc Ferracci veut investir dans "une énergie souveraine et pilotable". Il déplore un contentieux ancien avec la Commission européenne, qui empêche certains investissements. "Nous nous opposons à la mise en concurrence des concessions hydroélectriques", affirme-t-il. Le gouvernement propose des alternatives pour sortir du blocage et renforcer les capacités existantes.

Pour le ministre, l’hydroélectricité est un atout stratégique face à l’intermittence des énergies renouvelables : "Un système électrique résilient a besoin d’une part significative d’électricité pilotable". Il souligne que cette énergie, souvent négligée, peut jouer un rôle décisif dans la stabilité du réseau.

"Pour qu’un système électrique soit résilient, il faut de l’électricité pilotable"

Interrogé sur la grande panne intervenue en Espagne et ses possibles liens avec les énergies renouvelables intermittentes, Marc Ferracci reste prudent. "Il y a une enquête qui est faite, et c’est des enquêtes très compliquées. C’est un peu comme la boîte noire d’un avion." Sans tirer de conclusion hâtive sur l’origine de l’incident, il rappelle un principe fondamental de gestion du réseau électrique. "Pour qu’un système électrique soit résilient, il a besoin d’avoir une quantité significative d’électricité qui soit pilotable." Il cite en particulier l’hydroélectricité et le nucléaire comme sources permettant de moduler la production selon la demande.

Marc Ferracci précise que la France a fait un choix différent de celui de l’Espagne. "La France a fait le choix d’une électricité majoritairement nucléaire. Je pense que ça rend notre système plus résilient." En tant que ministre de l’Énergie, il annonce avoir prévu un échange avec son homologue espagnol dans la journée. "Dans trois heures, j’ai un échange en visio avec mon homologue espagnol pour discuter des causes, des implications et des suites à donner à cette grande panne."

Grève SNCF : "Le dialogue social doit être la clé de sortie du conflit"

Interrogé sur les grèves SNCF, Marc Ferracci refuse l’idée d’interdire les mouvements sociaux à certaines périodes, comme en Italie. "Je crois en l’esprit de responsabilité", affirme-t-il, privilégiant la voie du compromis. "Chaque pays a son histoire". Selon lui, "le dialogue social doit être le vrai point de sortie des conflits".

Concernant une proposition de loi visant à encadrer davantage le droit de grève dans les transports, il reste ouvert au débat parlementaire mais sceptique sur l’efficacité d’un durcissement législatif. "Je ne suis jamais contre le débat, mais je pense que les équilibres doivent se construire par le dialogue".

Budget : "Nous devons évaluer l’efficacité des politiques publiques"

Alors que le gouvernement prépare un budget avec au moins 40 milliards d'euros d'économies, Marc Ferracci insiste : "Certaines dépenses ne sont pas efficaces". L’ancien député, spécialiste de l’évaluation des politiques publiques, appelle à une approche rigoureuse. "Il y a des dépenses qui créent des effets d’aubaine, qui ne changent pas le comportement des entreprises". Pour lui, "chaque euro dépensé doit être justifié par son efficacité".

Il évoque notamment les niches fiscales : "Nous avons des centaines de niches, certaines très utiles, d’autres beaucoup moins". Concernant les aides aux entreprises et aux ménages, il demande une évaluation "au cas par cas" plutôt que des coupes généralisées. Il soutient aussi l’idée d’associer les citoyens au débat : "Consulter les Français sur ces sujets, via référendum ou convention citoyenne, a du sens".

"Aujourd’hui, la renationalisation des autoroutes ne fait pas partie des pistes du gouvernement"

À propos de la renationalisation des autoroutes, régulièrement évoquée dans le débat public, Marc Ferracci est catégorique. "Aujourd’hui, ça ne fait pas partie des pistes qui sont sur la table". Il rappelle les enjeux d’investissements lourds pour l’entretien des infrastructures. "Investir constamment dans la qualité du réseau, ça coûte cher". Selon lui, un retour à la gestion publique poserait une double contrainte : racheter les parts avec l’argent public et financer les pertes éventuelles.

Il rappelle que "nationaliser, c’est payer avec l’argent des Français, les actionnaires", reprenant son argument sur Arcelor. Pour le ministre, "il faut un modèle économique viable", capable d’assurer un service de qualité sans peser sur le contribuable.

Contrôle technique : "Tous les ans, c’est trop fréquent"

Sur le projet européen imposant un contrôle technique annuel pour les véhicules de plus de dix ans, Marc Ferracci émet des réserves. "Ça mérite débat, mais tous les ans, c’est trop fréquent".

Il rappelle que cette mesure, si elle renforce la sécurité, doit être conciliée avec la question du pouvoir d’achat. "Le contrôle technique génère des coûts. Or le pouvoir d’achat est un sujet essentiel". Pour lui, "il faut trouver un équilibre entre sécurité et contraintes financières pour les Français".

Retrouvez "L’invité politique" chaque jour à 8h30 dans le Grand Matin Sud Radio avec Jean-Jacques Bourdin

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