single.php

Thibault de Montbrial : "La justice n'est pas laxiste, elle est conformiste"

Thibault de Montbrial, avocat, président du centre de réflexion sur la sécurité intérieure et candidat aux régionales en Île-de-France (liste de Valérie Pécresse), était l’invité du “petit déjeuner politique” de Patrick Roger le 28 mai 2021 sur Sud Radio, à retrouver du lundi au vendredi à 7h40.

Thibault de Montbrial interviewé par Patrick Roger sur Sud Radio le 28 mai 2021 à 7h40.

Thibault de Montbrial : "La justice n'est pas laxiste, elle est dans un certain conformisme"

Éric Dupond-Moretti est revenu sur l’idée qu’il y a plus de répression aujourd’hui qu’autrefois. "On peut mettre tout ce qu’on veut derrière le mot répression", estime Thibault de Montbrial. "La réalité c’est : qu’est-ce qui est utile ? C’est-à-dire qu’est-ce qui est impactant en termes de réponse à une délinquance donnée aujourd’hui ?"

L’avocat juge que la délinquance suit "une dérive d’explosion de violences", des violences qui sont, de plus, "commises par des gens de plus en plus jeunes". Il souligne que le "taux d’homicidité", comprenant meurtres ou encore violences volontaires graves, a "statistiquement beaucoup augmenté" mais qu’il y a aussi un autre phénomène : "depuis la fin du premier confinement, il y a une augmentation localement constatée de la violence des atteintes aux personnes, et en particulier des atteintes graves, de l’ordre de 20%", estimation "empirique" précise le président du Centre de réflexion sur la Sécurité intérieure.


Face à ces violences, "on a une justice", que l’avocat se refuse "à dire qu’elle est laxiste", "qui est dans un certain conformisme et qui n’a sans doute pas compris que face à ces délinquants de plus en plus brutaux et de plus en plus jeunes, il fallait impacter tout de suite". Pour Thibault de Montbrial, "la bienveillance qui consiste à dire on va mettre un premier, un deuxième, un troisième voire un quatrième avertissement, c’est en face aujourd’hui considéré comme de la faiblesse". "Il faut marquer, pas par une sévérité excessive voire injuste", souligne-t-il, "mais par des peines qui soient des peines adaptées mais impactantes dans la vie du délinquant. Vous ne pouvez pas dire à un jeune qui a frappé un policier, même s'il ne l'a pas frappé gravement, lui mettre un Travail d'Intérêt Général 6 mois après ; il va considérer qu'il peut passer au stade d'après".

 

"La justice n’a sans doute pas compris la nécessité d’impacter tout de suite"

Lorsque les faits sont commis en bande, par exemple lors de réunions ou manifestations où participent des dizaines voire des centaines de personnes, il est "extrêmement difficile" d’établir "la responsabilité judiciaire", concède l’avocat. "Parce qu’on ne peut pas faire une rafle dans le quartier et condamner tous les gens qui étaient là : on est en démocratie, heureusement." Si les enquêtes sont longues et coûteuses, "on y arrive : il y a quand même des bandes qui sont arrêtées".

Toutefois, Thibault de Montbrial rappelle le principe judiciaire de la coaction "qui fait que toutes les personnes qui ont concouru sans qu’on puisse distinguer laquelle d’entre elles a lancé, par exemple, le cocktail molotov" devraient "être condamnées à la même peine. En pratique, ce n'est pas toujours le cas concède-t-il".

 

"Je ne remets pas en cause la sincérité d’Éric Dupond-Moretti"

Éric Dupond-Moretti avait créé la polémique en parlant de l’insécurité comme d’un "sentiment". "Moi, je ne remets pas en cause la sincérité d’Éric Dupond-Moretti", explique l’avocat colistier de Valérie Pécresse aux Régionales. Mais quand vous avez pendant 40 ans établi votre notoriété professionnelle sur la base d'un exercice brillant du métier d'avocat, mais exclusivement dans une logique de défense qui consistait à attaquer la justice, à attaquer la police, à attaquer nos institutions, c’est extrêmement difficile, en 24 heures, d’endosser tout à coup le rôle d’un Garde des Sceaux et être à la tête d’un des deux ministères qui concourent à la sécurité des FrançaisLa Justice concourt autant à la Sécurité que l’Intérieur, tient-il à rappeler.


"Comment voulez-vous incarner tout à coup la part judiciaire de cette autorité quand vous avez vécu toute votre vie professionnelle à dire l'inverse ? s'interroge Thibault de Montbrial. Il y a un problème de crédibilité qui, attention, ne touche pas la personne d’Éric Dupond-Moretti, je ne le mets pas en cause personnellement, mais ce qu’il est et son parcours ne le qualifient pas pour venir porter, aujourd’hui, une autre parole".

 

"On ne peut pas faire du ‘en même temps’ sur le régalien"

Il estime que si Gérald Darmanin est cohérent, "il a des vraies convictions sur le sujet et il fait des pas dans la bonne direction, même si sans doute pourrait-on faire plus, Éric Dupond-Moretti se distingue par les déclarations" qui ont fait polémique. Toutefois, "au-delà de la politique, c’est la limite du ‘et en même-temps’". "On ne peut pas faire du ‘en même temps’ sur le régalien." Sur l’islamisme ou encore celle qu’il juge être "la dérive dans nos quartiers, Thibault de Montbrial juge que c’est une autorité massive qui est attendue".

"Qui sont les premières victimes des dérives ?, demande l’avocat. Ce sont les gens qui habitent dans ces quartiers, qui sont stigmatisés sur leurs CV parce qu’ils viennent d’un quartier. Ceux qui ont fait le choix de travailler, de jouer le jeu de l'intégration, quand ils postulent pour un job et qu'on voit qu'ils viennent des quartiers, on ne les prend pas ! Parce que le quartier a une sale réputation à cause des 5 ou 10% de racailles qui leur pourrissent la vie", déplore-t-il.

 

"Pendant 20 ou 30 ans, quiconque parlait d'autorité, du drapeau, de la patrie, se faisait traiter de facho !"

Pour Thibault de Montbrial, la montée des violences ces dernières années et derniers mois s'expliquent par "des racines anciennes et profondes. La France a vécu un tournant qui, avec le recul, s'avère de plus en plus catastrophique il y a une quarantaine d'années. Une politique d'immigration très mal maîtrisée qui fait qu'en 40 ans, la population de la France a changé, analyse-t-il. En 40 ans, une partie de la culture qui s'exprime en France a changé : 10 à 15% de la population n'a plus du tout les mêmes référents culturels qu'il y a 40 ans".

Face à ça, ça aurait pu marcher, il y aurait pu avoir une intégration réussie s'il y avait eu sur la durée un maintien des repères et de l'autorité, mais comme on était dans la démarche post-68, la classe politique à cette époque a abandonné tous les grands thèmes régaliens au Front National. Pendant 20 ou 30 ans, quiconque parlait d'autorité, du drapeau, du respect de la nation, de la patrie, se faisait traiter de facho ! Même la droite dite de gouvernement n'osait plus le faire".

 

"Je suis désolé de voir l'effondrement de mon pays"

Thibault de Montbrial est candidat aux régionales en Île-de-France sur la liste de Valérie Pécresse. "J'ai accepté la proposition de Valérie Pécresse de m'inscrire symboliquement à la fin de sa liste pour illustrer mon adhésion à la façon dont elle voit les questions de sécurité, explique-t-il. Je la connais bien, j'ai vu son évolution : elle est aujourd'hui à la fois comme présidente de région mais aussi comme femme politique convaincue de la justesse de tout ce que je vous dis, assure-t-il. Tout ce qu'elle a fait notamment sur les transports dans la région sur la sécurité l'illustre, mais bien au-delà des régionales".

"J'ai 52 ans, ça fait 30 ans que je suis avocat, je travaille aussi beaucoup avec la police et la gendarmerie, je suis désolé de voir l'effondrement de mon pays ; je suis un spectateur de plus en plus engagé. La violence est devenue aujourd'hui un mode de résolution du conflit dans notre pays, regrette-t-il, ce qui est un problème gravissime".

Sur le front de la lutte contre le terrorisme, "le contrôle des frontières est la mère de toutes les batailles, soutient-il par ailleurs. On peut faire tout ce qu'on peut contre le terrorisme et l'islamisme, si on ne ferme pas le robinet, le problème ne se règlera pas".


Cliquez ici pour écouter "L’invité politique" avec Patrick Roger

Toutes les fréquences de Sud Radio sont ici !

L'info en continu
13H
12H
11H
09H
07H
23H
22H
21H
19H
18H
17H
Revenir
au direct

À Suivre
/