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Simone Veil au Panthéon : le paradoxal discours d’Emmanuel Macron

Ce dimanche, la dépouille de l’ancienne ministre de la Santé Simone Veil a fait son entrée au Panthéon en compagnie de son époux, au terme d’une cérémonie et d’un discours du président Emmanuel Macron.

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C’est un peu paradoxal. La République honorait une femme au parcours impressionnant, qui recouvrait les grands enjeux contemporains, et le Président a surtout parlé des hommes qui allaient l’entourer dans ce temple républicain. Simone Veil avait été déportée pour ce qu’elle était, juive, et elle expliquait elle-même à quel point le traitement et la souffrance étaient différents suivant que l’on était déporté racial – c’est l’expression qu’elle employait – ou pour fait de résistance, et c’est de la résistance que nous a parlé le Président. Comme s’il nous était impossible de sortir de cette mythologie de la résistance pour concevoir une autre forme d’héroïsme, fait des combats politiques en temps de paix, pour éviter que la barbarie ne revienne.

Le passage sur les femmes était sans doute le plus beau. Le plus court aussi. Peut-être faute d’expliquer combien le féminisme de Simone Veil, elle qui refusait le mot, était différent de celui qui tend à s’imposer actuellement. Le Président a parlé de justice. Justice pour toutes les femmes. Et tel est bien le combat de Simone Veil : un combat politique pour l’égalité. Simone Veil était profondément universaliste, héritière de ces Lumières dont se réclamait son père, ce qui lui valut pendant des décennies la méfiance et les reproches des féministes militantes, celles qui font aujourd’hui du féminisme une des dimensions de la lutte des minorités opprimées contre l’homme blanc hétérosexuel. L’intersectionnalité des luttes, ce n’était pas son combat. D’où la gêne profonde des féministes actuelles face à cette photo de Simone Veil en 2013, à la Manif pour Tous. Gardons-nous de parler à sa place, elle n’a jamais expliqué ce qu’elle en pensait. Mais il est étonnant de voir toutes les féministes évacuer cette image en expliquant qu’elle était vieille, qu’elle a été manipulée, qu’elle ne savait pas ce qu’elle faisait. Nous n’en savons rien.

On peut savoir gré au Président d’avoir évité la vulgarité de tirer ce discours vers un plaidoyer pour sa propre politique, comme François Hollande en avait le secret. Mais le seul message d’Emmanuel Macron fut de rappeler que pour la génération de Simone Veil, l’Europe, c’était la réconciliation et la paix. Un peu court. Face à la fragilisation de ces certitudes, on aurait aimé une réflexion sur l’humanisme, dont elle était l’héritière, une réflexion sur un nouvel humanisme à fonder. On eut une resucée du discours sur la résistance, sur l’héroïsme. L’avenir reste à inventer.

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