L'OMS vient de classer l'addiction aux jeux vidéos comme pathologique, au même titre que l'addiction à la cocaïne. Exagéré ou justifié ?
Anticipons d'abord un point : l'édito qui va suivre va faire hurler les adeptes de jeux vidéos parce qu'ils ont une conception religieuse de leur passion. Ils refusent d'admettre que sur certains profils, ces jeux, qu'ils arrivent à gérer tout à fait normalement, se révèlent problématiques et même dangereux. C'est exactement comme les fumeurs de cannabis qui refusent de voir que la gentille herbe qui les détend fait sombrer les plus fragiles dans la dépression et l'absence totale de volonté.
Pourtant, ces choses-là méritent d'être dites, avant tout parce que le processus est toujours le même. Les industriels du secteur nous expliquent qu'il n'y a aucun problème, qu'ils sont de grands démocrates et qu'ils respectent donc la liberté du joueur, lequel choisit tout seul de s'absorber dans le jeu. On connaît les techniques employées par les concepteurs de jeux avec les principes de bonus et de gratification pour inciter les joueurs à rester le plus longtemps devant leurs consoles. À ce niveau de manipulation, qui peut encore parler de liberté ? La démocratie repose sur l'exercice du libre arbitre. Tout est fait au contraire pour l'ôter aux joueurs, de même que tout est fait pour nous rendre dépendant des technologies numériques, dont on nous explique à longueur de temps qu'il est impensable d'en questionner l'usage. Dans un monde où 67 % des 7-12 ans ont une console de jeu et 36 % une tablette personnelle, le combat est presque perdu.
Alors bien sûr, certains diront que c'est aux parents d'en limiter l'usage. Certes, mais quand l'ensemble de la société envoie des messages contradictoires, les parents ne peuvent pas s'en sortir. L'école veut interdire les portables mais elle est encore sous la pression de pédagogues, faussement modernistes, qui oublient que le numérique n'est qu'un outil et qui se lancent dans la course à l'échalote des projets les plus racoleurs à base de tchat, de Sms... On explique aux parents que leurs enfants vont rater leur vie s'ils ne sont pas initiés à ces nouvelles technologies dont on ne pourra pas se passer dans le futur. Mais on oublie de leur dire que tous les dirigeants de la Silicon valley mettent leurs enfants dans des écoles sans aucun écran.
Le seul message à envoyer aux parents, c'est avant tout de contrôler leur propre usage et surtout de ne pas se sentir obligé de céder à l'invasion des écrans, sous prétexte que l'enfant réclame pour faire comme les autres. Bref, il faut retrouver un peu d'autonomie, de liberté.
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