Vous connaissez peut-être ce nouveau continent audiovisuel : les chaînes Youtube. En particulier celles où des parents filment leurs enfants, en général dans des situations où ils découvrent des jouets, des parcs d’attraction… Il existe même un genre spécifique : l’unboxing. Des vidéos de gens en train de déballer des paquets. Et des gens, donc, qui regardent par millions cette quintessence du consumérisme aliénant. Certaines de ces familles publient jusqu’à trente vidéos par mois ! Passons sur toutes ces scènes où l’adorable bambin star s’enfile des kilos de chips ou des litres de soda, mais tout de même, entre toutes les scènes, qui ne sont pas forcément excellentes du premier coup, qu’il faut re-filmer, l’association en question estime que cela ressemble beaucoup à du travail illicite. D’autant que, contrairement au cinéma ou à la télévision, où les interventions d’enfants sont excessivement contrôlées et l’argent versé sur un compte bloqué jusqu’à la majorité de l’enfant, il n’y a pas la moindre limite sur le Net, et les parents touchent directement des sommes qui peuvent, pour les stars du secteur, aller entre 5 000 et 60 000 euros par mois. Certains avancent même des sommes comme 400 000 euros par mois pour la plus célèbre de ces chaînes.
Derrière cette machine à cash, il y a la révélation de la nature véritable du Net : c’est une jungle. On est passé du rêve libertaire d’un espace où chacun peut s’exprimer à un terrain de jeu pour les grandes marques. Parce que ces chaînes sont financées par le placement de produit. On est très très loin de la petite vidéo familiale qu’on met sur la Toile pour le plaisir des amis et parce qu’on trouve son enfant tellement mignon. De plus en plus de gens y voient un nouvel eldorado où l’on peut se faire de l’argent facilement et accomplir son rêve de possession d’objets inutiles.
Vous vous souvenez de la guerre de tranchée pour interdire les publicités alimentaires à destination des enfants à certaines heures ? Il avait fallu combattre des lobbys puissants. Eh bien c’était parfaitement inutile ! Vous avez aujourd’hui des enfants qui, dès l’âge de quatre ans, sont collés sur une tablette à regarder ces vidéos, dont le contenu est bien sûr garanti comme adapté aux têtes blondes, ce qui donne bonne conscience aux parents. Ces enfants se gavent de publicités et de fantasme d’accumulation. Monde merveilleux…