Encore un attentat au couteau : le pays finit-il par s’habituer ? C’est pire que ça : les médias annoncent un "attentat qui a fait deux morts et quatre blessés". Au mieux, précise-t-on deux morts "dont le terroriste". Alors, si les mots ont encore un sens, la moindre des choses serait de prendre le temps de dire : "un mort et quatre blessés, et le terroriste a été abattu par les policiers en état de légitime défense". Ce n’est pas qu’anecdotique ou symbolique. Cela signifie que nous n’assumons toujours pas la mise au ban des tordus et des ordures qui sont capables de s’en prendre à des victimes sans défense. Un jeune homme de 29 ans a payé le prix cette fois-ci de notre impuissance. Personne, bien sûr, ne peut prétendre qu’il existerait une solution immédiate et simple. Mais il serait temps tout de même cesser de hurler à la rupture de l’union nationale dès que quelqu’un ose mettre les pieds dans le plat, et de regarder en face quelques réalités.
Un minimum d’honnêteté oblige à reconnaître que depuis quelques temps, ce profil est récurrent. Un étranger, parfois naturalisé, qui se radicalise au point qu’il est fiché S. Le terroriste de Trèbes était un Marocain naturalisé, celui de la gare Saint Charles à Marseille était tunisien… Ceux qui hurlent dès qu’on prononce dans une même phrase les mots terrorisme et immigration seraient bien inspirés de remiser leurs leçons de morale et de répondre à cette question : comment nous prémunir contre des gens qui viennent vivre chez nous mais qui cultivent progressivement à notre égard une rancœur et une haine récupérée par l’État Islamique ?
En l’occurrence, le terroriste était Tchétchène naturalisé Français. Et voilà déjà des années que l’on sait que la Tchétchénie constitue un vivier, d’abord pour la formation de djihadistes dans les années 2000, puis pour l’envoi de combattants en Irak et en Syrie ces dernières années. Il y a dans les communautés tchétchènes en Europe un phénomène de radicalisation spécifique. Et la répression féroce de Vladimir Poutine a provoqué un afflux de réfugiés. Or, toute la rhétorique du Président Russe consiste à dire que nous, occidentaux, n’avons pas pris la mesure du terrorisme islamiste et sommes désarmés, là où lui n’hésite pas à utiliser la manière forte. On se souvient de son expression : "traquer les terroristes jusque dans les chiottes". Ça n’a pas empêché les attentats en Russie, mais le fait est que notre bienveillance ne les empêche pas non plus. Le cas tchétchène nous montre qu’il faut traiter à la fois les foyers mondiaux de radicalisation, et les communautés installées chez nous.
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